Un retour aux sources. En juin 2016, quelques mois après son éviction très médiatisée d'Universal Music par Vincent Bolloré, Pascal Nègre débarquait sur RFM pour une émission d'interview d'artiste, plus de trente ans après avoir débuté sa carrière à la radio. Diffusé cette saison chaque samedi et dimanche de 18h à 19h, cet entretien n'est que l'une des nombreuses activités de Pascal Nègre, qui a depuis créé sa société de management, en partenariat avec Live Nation, mais aussi son label en association avec M6.
Dans le "Quart d'heure médias" de Pure Médias, il revient sur son émission, les artistes qu'il reçoit, mais aussi son départ d'Universal, la brouille entre MC Solaar et Universal ou encore le harcèlement sexuel dans le monde de la musique. puremedias.com vous propose de découvrir l'intégralité de l'interview en vidéo ci-dessus, et une sélection de ses réponses ci-dessous.
Sur son arrivée sur RFM
J'ai démarré à la radio ! 1981, j'ai 20 ans, Mitterrand arrive, les radios libres... Et moi j'étais animateur, puis patron d'une radio dans l'ouest de Paris. Puis j'ai arrêté, j'ai commencé au smic dans le disque et j'y ai fait ma carrière. Donc le retour aux sources m'a beaucoup touché - d'autant plus touché qu'à l'époque, la radio de référence, c'était RFM. La première radio qui avait créé la radio à l'américaine. C'était la plus grande, la plus belle radio, la modernité, etc.
Sur son émission, "L'invité de Pascal Nègre"
On m'a proposé de rejoindre la station, on m'a donné carte blanche pour faire ce que je voulais. On a trouvé un concept, on a d'ailleurs déposé un concept - ce qui n'était pas arrivé en radio depuis je ne sais combien d'années - et ce concept c'est d'avoir un animateur et un assistant vocal qui interviewent un artiste. C'est une machine qui pose les questions parce que moi, je ne suis pas journaliste. Donc je ne suis pas dans une interview, mais dans une discussion. Et c'est la machine qui pose les questions. Et ce que j'essaie de faire, c'est de montrer ce qu'il y a d'humain dans l'artiste. Je ne cours pas après le scoop.
Sur son éviction d'Universal
Je fais partie des gens qui vont toujours regarder devant, jamais derrière. Aujourd'hui, je regarde le futur, et le futur, c'est cette émission sur RFM, une boîte de management que j'ai montée avec Live Nation, et j'ai la chance de bosser avec des artistes comme Marc Lavoine, Julien Clerc, Jérémy Frérot, Carla Bruni, Zazie... J'ai monté un label avec M6, Zazie nous a rejoints sur ce label. C'est ça qui m'excite ! On est déjà une dizaine, et je pense qu'on est en train d'écrire la suite de ce que sera le modèle de la musique demain.
Sur la gestion de Canal+ par Vincent Bolloré
Je n'ai pas à commenter. Je ne sais pas. Est-ce que Canal+ est un succès pour l'instant ? Je ne sais pas, je n'ai pas le sentiment. Les audiences sont moins bonnes, je crois. Et je ne sais pas s'il n'y a pas un problème de désabonnement... Universal, c'est une belle boîte, il a touché la France mais il n'a pas touché le reste.
Sur le départ de Mylène Farmer d'Universal pour Sony
C'est un choix qu'elle a fait. Elle était en licence chez Universal, qui assurait la promotion, le marketing et la distribution. Et là, elle a décidé de gérer toute la communication autour d'elle et de chercher uniquement une distribution.
Sur les soupçons de triche dans le streaming et le problème de répartition des revenus
Il y a deux débats. D'une part, le débat de la triche. Est-ce qu'il y en a ? Oui. Evidemment que ça triche. Mais le vrai débat de fond est la question de la répartition des revenus générés par le streaming. Aujourd'hui, Spotify prend le chiffre d'affaires du mois dans le pays, puis divise par le nombre de streams et obtient le prix au stream. Mais je trouve ça absolument injuste : imaginez quelqu'un qui paie 10 euros, qui a 55 ans et écoute 100 chansons par semaine, et quelqu'un qui paie ces mêmes 10 euros mais a 17 ans et écoute 2500 ou 3000 streams dans le mois. Eh bien une toute petite partie des 10 euros du premier va aller à ses artistes, tandis que le reste financera la musique qu'il n'écoute pas. Aujourd'hui, la répartition devrait se faire par abonné. Si on ne le fait pas, on va tuer la monétisation de la world music, du jazz, de la musique classique, de la variété française... On aura un vrai problème de diversité.
Sur l'absence d'un artiste urbain dans le jury de "The Voice"
Clairement, la musique urbaine est une partie fondamentale de la création française. Est-ce qu'il n'en manque pas un là ? Je ne sais pas, est-ce que c'est peut-être un peu trop tôt ? Est-ce que ça correspond à l'esthétique de l'émission ? Je ne sais pas. Mais j'ai vu qu'il y avait Soprano dans "The Voice Kids". C'est un début. La télé est toujours un peu en retard, il ne faut pas lui en vouloir.
Sur le différend opposant MC Solaar à Universal
Universal a eu un procès, la décision de la Cour de cassation a été de dire : "Vous continuez à posséder les bandes mais vous les donnez à Solaar". Donc si on veut les exploiter, il faut renégocier un contrat avec Solaar. Mais jusqu'à présent, visiblement, le manager n'a pas souhaité renégocier le contrat. Pourquoi ? Parce que le premier album qu'il a sorti après avoir quitté Universal est un live, dans lequel il y a tous les fameux tubes qui ne sont pas disponibles par ailleurs. Donc le manager a dû se dire que si les gens voulaient les écouter, ils pouvaient écouter le live qu'ils ont produit eux-mêmes et qui leur rapporte donc plus d'argent. Sauf que le public préfère la version originale. Je suis certain que rapidement, il y aura un deal qui fera qu'Universal et le manager de l'artiste tomberont d'accord. Mais le fait que le fond de catalogue ne soit pas disponible n'est pas la faute d'Universal ! Je vous jure sur ce que j'ai de plus cher que jamais le manager de Solaar ne m'a appelé pour en parler.
Sur les propos de Christine Angot dans "On n'est pas couché"
Ca prouve qu'elle ne bosse pas ! J'aurais quitté Universal il y a quinze jours, OK. Mais là, ça fait quand même un an et demi ! Donc là il faut qu'elle retravaille ses fiches !
Sur le harcèlement sexuel dans la musique
Fondamentalement, je n'ai pas souvenir de grands scandales. Des lourdeaux, il y en a partout ! Perso, je suis tranquille, parce que j'ai un vieux principe qui est "No zob in job". Après, des lourdeaux qui ont voulu draguer certaines personnes, ça a dû exister. En tout cas, je trouve que ce qui est en train de se passer, c'est formidable. Ca rappelle que respecter l'autre, c'est important, essentiel. C'est une partie de ma vision de la vie.