Chaque vendredi, retrouvez "Médias le mag, l'interview", en partenariat avec France 5. Julien Bellver, co-rédacteur en chef de puremedias.com et chroniqueur dans "Médias le mag" le dimanche à 12h35 interrogera une personnalité des médias toutes les semaines. Pour ce nouveau numéro, Julien Bellver reçoit Hubert Besson, le producteur de "Plus belle la vie" sur France 3.
Si vous êtes là aujourd'hui, c'est à cause de la Une de "Télé Loisirs", "Il faut sauver Plus belle la vie". Commençons par parler des audiences, en baisse. Y a-t-il une lassitude ?
Ce n'est pas une question de lassitude, c'est une question sur la façon dont on visionne la série aujourd'hui et qui a changé. D'abord, tous les programmes ont baissé, il faut qu'on se le dise. Le marché de la télévision a changé, la TNT aujourd'hui fait quasiment 20% de parts de marché. Ca n'existait pas il y a dix ans, le marché s'est fragmenté. TF1, qui faisait des parts d'audience de 30%, fait plutôt du 24-25 aujourd'hui. Nous, on maintient nos audiences, on est environ à un point près des audiences qu'on a connues. Mais les gens connaissent désormais le feuilleton et savent qu'ils peuvent le regarder autrement que sur la télévision.
En replay, par exemple, sur Pluzz...
Exactement ! Juste, il y a des chiffres qui sont un peu vertigineux mais je vais les donner, comme ça "Télé Loisirs" les aura pour la prochaine fois. Il y a aujourd'hui 100 millions d'épisodes vus en délinéarisé légalement, sur Pluzz ou sur une box, par exemple. A cela s'ajoutent 50 millions d'épisodes vus de manière illégale.
Autre point soulevé, les stars qui, comme Laetitia Milot, prennent le large, ailleurs, sur d'autres chaînes. C'est la loi du genre ou vous n'arrivez pas à les retenir ?
On en est très fier ! Quand on a démarré et que j'ai appelé les agents pour leur expliquer qu'on allait lancer un feuilleton, j'avais seize rôles à caster et la moitié des agences m'ont fermé la porte. Aujourd'hui, on est très fier que toutes les agences viennent, qu'on nous pique des stars... Ca ne veut pas dire qu'on est faché, au contraire ! J'ai déjeuné lundi avec Laetitia et son agent, on est en train de voir comment on va travailler ensemble. On a développé une arche vraiment importante pour son avenir, et si vous interrogez Laetitia, vous aurez le même retour ! Nous, on est content, on a toujours fait en sorte que les comédiens puissent travailler ailleurs. Je ne considère pas qu'on me les pique, je considère qu'ils sont valorisés à l'extérieur. Qu'une comédienne qui travaille avec nous fasse un très beau succès sur TF1... Tant mieux !
Les héros de "Plus belle la vie" comme Mirta ou Roland, on les voit moins, au profit de nouveaux personnages. Et les fans ne sont pas contents... Il faut renouveler le casting pour que le feuilleton continue ?
On n'arrête pas de le renouveler ! On a démarré à 16 comédiens, on en a 40 aujourd'hui. C'est un problème pour les auteurs ! Faire vivre 40 personnages à l'antenne, quand on doit gérer les indisponibilités de chacun, et ainsi de suite, félicitations aux auteurs, vraiment !
"Plus belle la vie", c'est aussi du prime, le prochain aura lieu le 20 octobre. Mais pas de spin-off cette fois, vous proposez un retour à l'intrigue quotidienne. Ce sont les audiences moyennes récentes qui vous ont convaincu de changer de stratégie ?
C'est un travail qu'on a développé avec la chaîne. On a fait des expériences. Aujourd'hui, on sait que, au niveau du feuilleton, si on veut se maintenir, il faut qu'on se renouvelle, qu'on trouve des idées régulières, qu'on soit différent, qu'on renouvelle le casting, qu'on trouve des histoires différentes, etc. Sur le prime, c'est un peu pareil. A un moment donné, on a fait douze prime qui étaient des histoires prises dans le feuilletonnant et à un moment donné, on s'est demandé comment on allait faire ! C'est un casse-tête pour les auteurs, ça a énormément d'implications dans le processus d'écriture et de production. Il y a deux ans, on a essayé les spin-offs. "La Vie en Nord" a bien marché, après le deuxième a moins pris. La chaîne nous a demandé de refaire du feuilletonnant donc on fait du pur feuilletonnant. Là, on va régler trois histoires : deux amorcées dans la série et une totalement inédite dans la soirée.
La série évoque souvent les sujets de société ou d'actalité. On a déjà vu des joints, du poppers, et des plans à trois... Dernière polémique en date, c'est un ado qui embrasse une quadra qui pourrait être sa mère. Ca a choqué certains téléspectateurs... C'est pour parler des cougars ou faire de l'audience ?
Il y a quarante ans je crois, il y a eu un film de cinéma qui s'appelait "Mourir d'aimer", où on voyait déjà un professeur qui avait une relation avec un élève, il y avait même un abus de position dominante, ce qu'il n'y a pas ici...
Dès que vous sortez du cadre, ça ne plait pas aux fans...
Mais c'est la force du feuilleton ! Et ce n'est pas que ça ne plait pas aux fans ! C'est qu'il y a des fans qui estiment que ce n'est pas bien pour le personnage, par exemple. Ca, c'est de la réaction de fans, et ça n'empêche pas qu'ils vont suivre l'histoire et adhérer au projet. On aime que nos personnages qu'on suit régulièrement fassent des écarts, ça nous arrive à tous d'en faire. Tant mieux ! C'est là qu'on voit la force du feuilleton : cette histoire, elle est classique, mais quand ça arrive à des personnages de "Plus belle la vie", ça fait un buzz. Alors que, le dimanche sur TF1, il y avait "20 ans d'écart". Personne n'en a parlé !
Un dernier mot sur le piratage...
Aujourd'hui, dans les consommations du feuilleton, ce sont des chiffres vertigineux ! On fait tout un travail pour essayer de l'arrêter. Un épisode de "Plus belle la vie" est regardé en moyenne entre 150 et 200.000 fois illégalement...