La justice s'intéresse fortement aux nombreux contrats de conseil passés par France Télévisions sous la présidence de Patrick de Carolis. Une information judiciaire a ainsi été récemment ouverte pour "favoritisme et prise illégale d'intérêts" concernant ces partenariats dont le montant total aurait atteint 22 millions d'euros entre 2009 et 2010. Elle fait suite au dépôt d'une plainte par le le syndicat des cadres CGC de France Télévisions, partie civile dans cette affaire. Et selon une information du Parisien/Aujourd'hui en France, le juge en charge de l'instruction, Renaud van Ruymbeke, a procédé mercredi 10 juillet à une première audition de cinq heures de la partie civile.
Comme le révélait Le Canard Enchaîné en avril dernier, l'enquête vise particulièrement l'agence "Bygmalion", une société de conseil créée fin 2008 par Bastien Millot, ex-numéro 3 de France Télévisions, désormais communicant de Jean-François Copé, lobbyiste, mais aussi connu du grand public pour sa participation à de nombreuses émissions sur Europe 1 et i-Télé en tant qu'expert médias. En quelques années, sa société aurait perçu 1,2 million d'euros de la part de France Télévisions pour diverses prestations allant des réponses aux courriers des lecteurs à la veille sur internet.
Le journal satirique soulignait ainsi au printemps dernier les montants parfois disproportionnés de certains services rendus par "Bygmalion" et ce, "sans la moindre mise en concurrence" avec d'autres entreprises. Ce dernier évoquait par exemple une facture de 7.000 euros pour la rédaction des voeux de Patrick de Carolis aux salariés de l'entreprise publique. Il mettait également en avant 30.000 euros qui auraient été versés à la société de conseil pour "la mise en place d'un comité sur la diversité" ou encore 43.000 euros pour une étude sur l'image de France Télévisions.
Selon Le Parisien ce matin, "Bygmalion" ne serait en fait pas la seule société de conseil dans le viseur de la justice. Cette dernière s'intéresserait aussi à d'autres cabinets prestataires de France Télévisions fondés par d'anciens cadres de l'entreprise publique juste après leur départ en retraite. Le quotidien évoque ainsi le cas "Deo Gratias Image International", créé par un ex-directeur juridique du groupe public, Philippe Belingard, et "PHBD", fondé par Charles Greber, ex-conseiller pour les affaires extérieures. Renaud Van Ruymbeke serait aussi intrigué par les relations entre le cabinet de conseil "Altedia" et France Télévisions. Il faut préciser que le patron de cette société, Pierre Beretti, n'est autre que le mari de Murielle Charles, la directrice du dialogue social du groupe audiovisuel public.
Les regards se tournent également vers Patrick de Carolis, président de France Télévisions au moment de la passation de ces contrats. A-t-il joué un rôle dans la mise en place de ces "partenariats" ? Ce dernier nie fermement tout acte frauduleux. Contacté par notre confrère, il a ainsi assuré "que toutes les règles de passation des marchés avaient été respectées pour ces contrats, dont aucun n'excédait 200.000 euros". La direction actuelle affirme quant à elle "tenir tous les documents à disposition de la justice".