Souvent Lagardère varie, bien fol est qui s'y fie. Après avoir encore juré publiquement de ne faire "jamais sauter la commandite" lors de l'assemblée générale des actionnaires de mai 2019, Arnaud Lagardère s'est finalement résigné aujourd'hui à renoncer officiellement à ce statut qui le rendait indéboulonnable. C'est ce qu'annonce ce matin un communiqué de son groupe, qui précise que la transformation de Lagardère en une classique société anonyme sera soumise au vote des actionnaires lors de la prochaine assemblée générale, le 30 juin prochain.
D'apparence technique, ce changement de statut est une révolution bien concrète pour le groupe aux activités aussi variées que le Travel Retail (boutiques d'aéroport et de gares), l'édition (Hachette), ou les médias (Europe 1, "Paris Match", "Le journal du dimanche"). Actionnaire minoritaire avec seulement un peu plus de 7% du capital, Arnaud Lagardère était jusque-là protégé par la forteresse de la commandite bâtie par son père, Jean-Luc Lagardère, en 1992. Celle-ci le rendait maître absolu de son groupe, en échange d'une responsabilité sur son patrimoine personnel.
En échange de sa renonciation, l'homme d'affaires de 60 ans a notamment obtenu de conserver un poste de PDG dans la future organisation pendant six ans. D'après "Le Point", son éventuelle révocation devra recueillir l'assentiment d'une majorité des deux tiers du futur conseil d'administration. Une "compensation" est également prévue pour les associés commandités, qui se verront attribuer un total de 10 millions d'actions nouvellement émises, d'une valeur d'environ 230 millions d'euros. Montant ainsi mécaniquement au capital de son groupe, Arnaud Lagardère devrait en devenir le troisième actionnaire derrière Vivendi et Amber Capital. Cette transformation en société anonyme rendra aussi le groupe Lagardère "opéable", c'est à dire que ses actionnaires, comme Vivendi (27%), Amber Capital (19%) ou le fonds du Qatar (13%), pourront à l'avenir céder leur participation au plus offrant et ainsi changer sa gouvernance.
Bien que PDG, Arnaud Lagardère devra rendre des comptes à un conseil d'administration de onze membres renouvelé qui reflétera le poids des actionnaires. Outre deux administrateurs représentant les salariés, il sera composé de trois administrateurs proposés par Arnaud Lagardère, trois proposés par Vivendi, un administrateur proposé par le fonds du Qatar, un administrateur proposé par Amber Capital, et enfin un administrateur indépendant proposé par Financière Agache. Mardi 27 avril, Lagardère a affirmé qu'aucune activité ne serait cédée si le projet devait aboutir. Souvent Lagardère varie.