Daniel Schneidermann ne partage pas les réactions indignées des médias français contre les sanctions du CSA pour leur couverture des récents attentats. Dans un billet publié aujourd'hui dans Libération (article payant) et intitulé "Info continue : la double hypocrisie", le journaliste, fondateur du site "Arrêt sur images", a raillé dans cette affaire une "bataille de postures".
Posture du CSA d'abord, accusé d'être d'avoir prononcé des sanctions "platoniques" sans véritable conséquence. Posture des médias ensuite, coupables selon lui de "dérapages multiples" durant les attentats et qui, "sans la moindre autocritique", répondent "en hurlant à la liberté de la presse menacée". "C'est l'Allemagne de l'est. C'est la Corée du Nord. C'est vrai : que va-t-on devenir si on ne peut plus balancer en direct toutes les images qui arrivent, tous les noms qui buzzent, toutes les infos qui passent par là ?", a raillé Daniel Schneidermann dans son billet.
Le journaliste s'est ensuite lancé dans une critique plus générale des chaînes d'information en continu, décrivant leur formidable pouvoir d'attraction. "On était là, dans les bureaux, dans les salons, dans les cuisines, tétanisés, anesthésiés, maraboutés par BFMTV qui n'en finissait pas de meubler dans l'attente du bain de sang", a raconté Daniel Schneidermann. Et d'ajouter : "On était là parce que vous gesticuliez, hors d'haleine, pour nous retenir. On n'était pas fiers de nous (...) On regrette d'avoir été là. On aurait préféré être ailleurs. On n'aurait rien perdu en attendant le soir pour connaître l'épilogue".
A en croire Daniel Schneidermann, l'info continue est ainsi "nocive en temps de crise, où elle peut tuer", mais aussi "par temps calme", en "hystérisant le débat politique". Les dérapages constatés durant les attentats sont ainsi inévitables selon lui avec des chaînes d'info continue mises en concurrence. "L'Etat ne semblant pas disposé à exproprier BFMTV et i-TELE pour attribuer leurs fréquences à des chaînes culturelles ou documentaires, rien d'autre à faire que de subir comme un spectacle supplémentaire la situation actuelle et ses moulinets hypocrites", a-t-il conclu, résigné.