Après six ans en poste à Pékin, une journaliste de "L'Obs" va en être expulsée. Après la publication le 18 novembre d'un article intitulé "Après les attentats, la solidarité de la Chine n'est pas sans arrière-pensées", décrivant les mesures répressives des autorités chinoises, le ministère chinois des Affaires étrangères a annoncé à Ursula Gauthier, journaliste à l'hebdomadaire et auteure de l'article, qu'elle devrait quitter le pays le 31 décembre, à la suite du non-renouvellement de sa carte de presse et de son visa.
Par la voix de Matthieu Croissandeau, patron de "L'Obs", la rédaction de l'hebdomadaire a qualifié d'"atteinte inacceptable à la liberté d'informer" l'expulsion de sa correspondante du territoire chinois et l'a considérée comme une "entrave réelle à l'exercice du métier de journaliste en Chine". Le ministère français des Affaires étrangères a pour sa part dit "regretter" que le visa de la journaliste ne soit pas renouvelé.
Dans une interview téléphonique accordée à France Inter et diffusée ce matin, Ursula Gauthier a souhaité réagir sur son expulsion imminente. "Il ne s'agit pas de moi, il s'agit d'une tentative très violente de museler la presse internationale", s'est-elle expliquée avant de considérer la réaction du gouvernement français "pas du tout au niveau de l'enjeu de ce qui est en train de se produire" en Chine.
"Ce n'est pas que moi qui suis visée là. La Chine ayant le rôle que l'on connaît maintenant, il est très important qu'on ne la laisse pas retomber dans des façons que l'on croyait totalement révolues et qui rappellent la Révolution culturelle", a précisé Ursula Gauthier. Pour la correspondante à Pékin, la presse locale a elle aussi été "totalement muselée" et ne peut plus traiter de sujets qui ne sont pas "totalement orthodoxes".
Toujours à l'antenne de France Inter, la journaliste a affirmé que les journalistes n'étaient pas les seuls concernés : "Les blogueurs qui écrivaient dans les réseaux sociaux, qui avaient des milliers, des dizaines de milliers d'abonnés et ils faisaient entendre leur voix, c'était une voix indépendante. Ceux-là ont été muselés également et on les a paradés à la télévision avec les chasubles des prisonniers pour montrer à quel point c'étaient des criminels. Donc il n'y a plus personne qui ose maintenant s'exprimer réellement."
La presse officielle chinoise a d'ailleurs révélé un sondage surprenant : "Soutenez-vous ou non l'expulsion de la journaliste française en poste en Chine qui défend publiquement les terroristes ?". Sur le site internet du "Global Times", plus de 200.000 internautes ont voté en faveur de l'expulsion, soit 95% du total.