Comment va le groupe TF1 en cette rentrée de saison 2016-2017 ? C'est la question posée par puremedias.com à Xavier Gandon, directeur des antennes et de la programmation des chaînes du groupe (TF1, TMC, NT1, HD1). L'adjoint d'Ara Aprikian fait un premier bilan de la stratégie multi-chaînes mise en oeuvre depuis septembre par la nouvelle direction de la Une. Au menu : les audiences de la chaîne TF1, notamment en access, la relance de TMC, devenue la tête de gondole de la nouvelle stratégie du groupe, mais aussi les ambitions de TF1 pour NT1 et HD1. Entretien.
Propos recueillis par Benjamin Meffre.
puremedias.com : Depuis l'arrivée de Gilles Pélisson à la tête du groupe, TF1 a mis en place une stratégie multi-chaînes. Pouvez-vous la résumer en quelques mots ?
Xavier Gandon : Quand Gilles Pélisson est arrivé, il a voulu en effet mettre en oeuvre une stratégie multi-chaînes avec Ara Aprikian. Il y a la chaîne TF1 qui reste le navire amiral, la chaîne de l'évènement, avec une programmation qui n'a pas d'équivalent en France ni en Europe d'ailleurs. En parallèle, l'idée était de développer nos antennes TNT avec une offre plus ciblée, plus affirmée, plus puissante. Nous voulons avoir des chaînes qui existent de manière plus forte et plus complémentaire autour du navire amiral. C'est ce qu'on a commencé à faire avec TMC, la chaîne où il y a eu le chantier le plus important à la rentrée avec une refonte de la ligne éditoriale, accompagnée d'un rebranding et d'une nouvelle grille. On a commencé à faire ce travail sur NT1 et HD1 mais de manière plus légère sur la partie "grille". On est en réflexion vers un rebranding sur ces chaînes là, sans doute en 2017.
Quel premier bilan faites-vous de la mise en oeuvre de cette stratégie pour le groupe TF1 ?
On est vraiment content du premier bilan, les audiences du mois de novembre sont assez spectaculaires d'un point de vue groupe. Le groupe TF1 dans son ensemble réalise son record de l'année sur les individus de quatre ans et plus. On est à 28,6% de part d'audience au total. Sur les cibles publicitaires, c'est encore plus spectaculaire, avec 34,2% sur les femmes responsables des achats de moins de cinquante ans pour l'ensemble du groupe. Il faut aller rechercher en 2007, soit à une époque où le groupe TF1 se résumait à la chaîne du même nom, pour retrouver ce niveau. Avec cet investissement dans nos chaînes de la TNT, on retrouve des niveaux d'audience groupe similaires à ceux d'une autre époque de la télévision, avant même l'explosion des chaînes TNT de première génération. Cela valide pour l'instant notre stratégie. Pourvu que ça dure !
N'abandonnez-vous pas du coup le combat de la puissance pour la chaîne TF1 ?
Non. Je crois qu'on voit bien que l'on continue à avoir une offre très évènementielle, très puissante sur la Une. Prenons la semaine dernière en exemple. On a deux cases de fiction inédite, dont une nouvelle série avec une des comédiennes les plus populaires du cinéma (Isabelle Nanty dans "Munch", ndlr), un blockbuster à 10,6 millions de téléspectateurs ("Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ?", ndlr), les saisons inédites de grandes franchises de flux comme "Danse avec les stars". Personne n'est capable de proposer ça en télévision aujourd'hui ! L'idée est de conserver cela et même de le renforcer pour que TF1 reste TF1 et, pourquoi pas, progresse.
On a l'impression qu'aujourd'hui les scores sur cibles priment l'audience générale. "Bienvenue à l'hôtel" en est l'exemple parfait avec des scores sur les quatre ans et plus moins élevés que "Money Drop" mais meilleurs sur cibles...
Ce sont des arbitrages. On regarde toujours ce qu'on gagne d'un côté et perd de l'autre. Sur un programme comme "Bienvenue à l'hôtel", le fait de gagner 4 à 5 points sur cible pour en perdre 2 sur les individus de quatre ans et plus est un arbitrage selon nous intéressant. Nous nous disions aussi que la capacité à bien fonctionner des jeux dépend de la dimension évènementielle de leur programmation. Le fait d'être sorti d'une année complète de "Money Drop", contrairement aux années précédentes, nous a encouragés à faire un break. Il nous paraissait nécessaire de créer un manque chez les téléspectateurs de "Money Drop" pour lui redonner de l'allant.
Un point d'audience en plus sur TF1 ne rapporte pas le même chiffre d'affaires qu'un point d'audience sur HD1. Est-ce que financièrement cette stratégie multi-chaînes est viable ?
Ces problématiques financières ne relèvent pas de ma sphère de compétence. Le travail qu'on fait l'est dans une économie de coûts maîtrisés et avec un objectif de faire prendre de la valeur à nos chaînes sur la durée.
Vous ne constatez pas pour l'instant de décrochage commercial ?
C'est une question qui s'adresse plutôt à notre régie publicitaire. Le repositionnement de TMC est très bien accueilli par le marché et nous sommes assez contents de la rentrée de la chaîne TF1 après un été durant lequel nous avons été "challengés" avec le Tour de France et les Jeux Olympiques. Nous sommes revenus très fort en septembre. Nous avons fait un bon mois de novembre et allons essayer de continuer sur cette dynamique. Il y a encore des secteurs de la journée où l'on peut faire mieux et on y travaille. Nous avons agrandi notre leadership par rapport à notre concurrent principal et, sur les cibles publicitaires, nous sommes de loin leader en access et de très loin leader en prime time. Le bilan que nous faisons est donc positif pour la chaîne TF1.
Du côté de l'access de TF1, "Bienvenue à l'hôtel" va revenir ?
On tire un bilan assez satisfaisant des performances de ce programme. Il a réalisé des scores importants sur les individus de quatre et plus. Il nous a aussi permis de reprendre le leadership sur cibles. Je pense donc qu'il est assez probable que l'émission revienne. Nous sommes également très contents de retrouver Laurence Boccolini et "Money Drop". En parallèle, nous travaillons aussi sur des nouveautés. On a fait des pilotes de jeu.
Justement, où en est-on des projets de jeux comme "Au suivant" ou "On Fire" ?
Nous n'avons pas pris de décision définitive sur ces nouveaux projets. L'idée est de tester des nouveautés en cours de saison 2017 sur cette case. Nous étudierons aussi comment se comporte "Money Drop" dans la case.
La ligne de flottaison de TF1 dans cette case, c'est 20% de part d'audience ?
Nous n'en sommes pas là. Nous regardons les choses globalement, et surtout relativement aux scores précédents. Un des objectifs importants est de retrouver un access plus performant. C'est un de nos chantiers.
Christophe Dechavanne a un projet de jeu avec France 2. Est-il toujours un "animateur TF1" ?
Oui, sans nul doute. Dans les nouveaux projets que nous lançons pour l'access de TF1, il y a beaucoup de pilotes faits avec Christophe. En tout cas, il y a une envie de TF1 de retrouver Christophe Dechavanne à l'antenne dans de nouvelles émissions. L'idée est de se donner le temps pour choisir le bon projet.
Yann Barthès va-t-il finalement débarquer en hebdo sur TF1 avec son late show ?
Il n'y a pas de décision définitive prise sur ce sujet. Il y avait une frustration des équipes de "Quotidien" de ne pas faire une émission le vendredi, notamment par rapport à l'actualité politique et les nombreux débats qui ont lieu le jeudi soir. On partageait ce constat. L'idée pour l'instant est donc plutôt d'avoir le temps de faire une émission le vendredi et de garder quand même cette idée de faire un late show version Yann Barthès. Pour l'instant, nous allons le faire, mais de manière évènementielle dès le vendredi 9 décembre. Nous verrons ensuite si nous avons la capacité de le faire plus régulièrement dans un second temps.
Quel bilan faites-vous de la rentrée de TMC ?
Nous sommes vraiment ravis. Il y a ce petit "truc" symbolique mais pas neutre de reprendre le leadership. TMC a été leader TNT jusqu'en 2012. C'est un peu la cerise sur le gâteau de cette très belle rentrée de retrouver cette place. Ces performances traduisent le succès de la stratégie de repositionnement et de transformation de la grille. L'élément majeur est bien entendu le succès de "Quotidien" en access. Au départ, nous nous disions que cela serait formidable si Yann Barthès arrivait à doubler l'audience de la case en un an. Il l'a quadruplée en trois mois ! Il y a aussi eu des progressions sur l'ensemble de la grille avec la programmation de fiction en daytime, l'ambition de la programmation cinéma et spectacle en prime time. Nous enregistrons une augmentation de près 50% de nos scores sur les cibles de TMC, c'est à dire les 25-49 ans et les CSP+. Nous notons aussi une recomposition du public. Les gens qui regardent TMC aujourd'hui ne sont pas forcément ceux qui la regardaient avant.
On a parfois l'impression que vous faites de TMC votre C8 et de NT1 votre NRJ 12, on se trompe ?
Oui. Nous ne raisonnons pas comme ça. Ce qui est sûr, c'est qu'en termes de cible, l'idée est d'avoir un TMC positionné vers une cible plus jeune, plus mixte et davantage CSP+. Sur NT1, nous avons voulu faire une chaîne plus jeune, plus féminine. On parle beaucoup des audiences de TMC à cause de "l'effet Yann", mais les performances de NT1 sur la rentrée sont tout aussi spectaculaires que TMC, même si c'est moins visible car la chaîne est globalement moins puissante. En moyenne sur les trois mois de cette rentrée, nous avons une part de marché de 4% sur les FRDA-50. NT1, sur cette cible de référence du marché fait plus que W9 !
"Secret Story" va revenir sur NT1 ?
C'est possible, nous étions très contents de cette saison. Nous allons en discuter avec Endemol mais il n'y a pas d'automatisme.
Eric et Quentin sont sur TMC, apparaissent dans les NRJ Music Awards, et ont lancé depuis hier une pastille humoristique sur HD1. Mettre vos talents sur toutes vos chaînes, n'est-ce pas une remise en cause de l'identité de chacune d'entre-elles ?
Eric et Quentin interviennent dans des registres différents. Ils font partie de la bande de "Quotidien" et vont avoir des primes sur TMC. Concernant les NRJ Music Awards, c'est un peu l'occasion qui a fait le larron, c'était du "one shot". Sur HD1, on avait l'ambition de faire un feuilleton quotidien sur HD1, notre chaîne de la fiction. Comme eux sont aussi tentés par la fiction, on leur a proposé ce projet lors de nos discussions à leur arrivée dans le groupe. Ils avaient dans leur carton cette idée d'un feuilleton policier un peu absurde. Elle nous a plu car c'est un exercice particulier qui nous paraît adapté à la ligne éditoriale de HD1.
Tous vos animateurs ont-ils vocation à devenir multi-chaînes, comme Christophe Beaugrand le fait déjà par exemple ?
Non, pas spécialement. Ce n'est pas élevé au rang de stratégie. Mais il n'y a pas non plus de blocage particulier à le faire quand cela nous paraît une bonne idée.