C'était la relecture de trop ! Ce lundi, "La Voix du Nord" annonce mettre fin à la pratique de relecture de ses interviews par les personnalités politiques. Cette décision a été officialisée à travers un éditorial signé du rédacteur en chef du quotidien régional, Patrick Jankielewicz. Il dénonce ainsi une pratique "imposée" par le personnel politique "depuis des décennies".
Après le refus d'une interview d'Emmanuel Macron, en déplacement dans le Nord, l'Elysée a proposé à "La Voix du Nord" d'interroger le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, "sous réserve qu'il puisse relire et corriger le texte avant publication", explique le rédacteur en chef. "Jusque-là, comme la quasi-totalité de nos confrères, nous acceptions cette relecture sous prétexte que la parole d'un ministre a quasiment force de loi", déclare Patrick Jankielewicz, avant d'ajouter : "Mais si certains des interviewés jouent le jeu en corrigeant à la marge des aspects techniques, la relecture est devenue un exercice de réécriture pour la plupart."
Ainsi, le journaliste pointe du doigt un texte "renvoyé dernièrement" qui a été "totalement caviardé", "coupant des réponses qui avaient été faites" et "ajoutant des questions qui n'avaient pas été posées". "La pratique de l'interview nécessite qu'on bouscule un peu les intéressés sans les piéger. La spontanéité de leurs réponses est un élément important. À quoi bon publier des propos polis, lissés, rabotés, aseptisés par des communicants ?", interroge Patrick Jankielewicz dans son éditorial.
Pour ces raisons, il décide, au nom de son quotidien, de "mettre fin aujourd'hui à cette pratique" de relecture, précisant que cela "conduira à enregistrer les entretiens et à les restituer fidèlement dans leur contexte". De plus, le rédacteur en chef assume les conséquences d'une telle décision éditoriale : "Nous avons bien conscience que vous trouverez désormais moins d'interviews de personnalités politiques dans ces pages et sur nos sites, mais nous pensons devoir cette indépendance aux lecteurs qui nous font confiance."