"Mediapart" veut assurer son indépendance. Hier, Edwy Plenel, médiatique co-fondateur du site d'information lancé en 2008, a présenté un plan visant à doter "Médiapart" d'un nouveau cadre juridique censé empêcher toute prise de contrôle. "Il s'agit d'une invention capitalistique, qui vise à sanctuariser le capital de 'Mediapart' pour le rendre incessible, inviolable et inattaquable. L'indépendance de 'Mediapart' sera éternelle", a expliqué le célèbre journaliste à moustache.
Prévu pour une mise en place cet automne, ce plan passera par la cession à 100% du capital de "Médiapart" à une structure, un fonds de dotation dénommé le Fonds pour la Presse Libre, non-capitaliste et à un but non-lucratif. C'est la première fois que ce statut sera expérimenté par un titre de presse en France. Outre la détention des titres de "Mediapart", le fonds, dont la mission sera d'agir en faveur de la liberté de la presse et du pluralisme de l'information, pourra notamment collecter des dons.
Fruit de trois ans de concertation, ce nouveau système est "l'événement le plus important depuis la création du journal" a commenté Fabrice Arfi, responsable des enquêtes. "On ne travaille pas pour demain mais pour les vingt, quarante ou soixante années à venir", a ajouté le journaliste précisant que "ça ne changera rien au modèle économique et éditorial de 'Médiapart'". François Bonnet, Edwy Plenel, Laurent Mauduit et Marie-Hélène Smiejan, les quatre co-fondateurs de "Médiapart" ont indiqué s'être inspirés du modèle du "Scott Trust", la structure sanctuarisée qui protège le capital du quotidien britannique "The Guardian" depuis 1936.
D'ici cet automne, les 42% de parts qu'ils détiennent aux côtés des salariés, et d'une "Société des amis", avec laquelle ils forment un "pôle d'indépendance" (soit 62% du capital), vont être rachetés par la Spim (société pour la protection de l'indépendance) de "Médiapart". Les parts détenus par les investisseurs partenaires (Doxa et Écofinance) seront également reprises. L'ensemble sera racheté sur la base d'une valorisation, par des experts indépendants, de "Médiapart" à 16,3 millions d'euros. Le rachat sera financé par les excédents de "Médiapart" (4,4 millions d'euros), par les donations des actionnaires (1 million d'euros) et par un emprunt de 10,9 millions d'euros.
La direction de "Médiapart" a précisé que ce nouveau dispositif a été validé par le fisc et approuvé par les salariés à hauteur de 93% lors d'une consultation interne.