Les journalistes du Parisien / Aujourd'hui en France ne disent pas "Merci Patron !". Dans un communiqué publié par Fakir, les syndicats SNJ, SNJ-CGT et FO ainsi que la SDJ du quotidien dénoncent la censure du film documentaire satirique de François Ruffin - également fondateur et directeur de Fakir. Le réalisateur du film qui totalise 83.000 entrées en deux semaines - malgré un nombre de salles restreint - porte à l'écran le combat de Jocelyne et Serge Klur, au chômage après la délocalisaton de leur usine qui produisait pour Kenzo, entreprise du groupe LVMH.
Outre les marques de luxe, le groupe dirigé par Bernard Arnault est également propriétaire du Parisien / Aujourd'hui en France. Et selon les syndicats, c'est pour cette raison que le quotidien a été interdit de parler du film, pas tendre pour l'actionnaire. "Ordre a été donné aux confrères du service culture-spectacle qui avaient visionné le long métrage de ne pas le chroniquer, fut-ce en 10 lignes. De même a été repoussée plus tard une proposition de sujet du service politique sur le buzz suscité à gauche par le film sous prétexte qu'il s'agissait 'd'un sujet militant', 'et qu'il y avait d'autres sujets prioritaires ce jour-là'", indique le communiqué.
"A nos yeux, et malgré les dénégations de la direction, c'est un acte de censure qui a été posé. Ou plus précisément d'auto-censure", poursuivent les syndicats qui affirment avoir été reçus par Stéphane Albouy, directeur des rédactions, qui assume ce silence. "C'est mon choix, un arbitrage comme j'en fait des dizaines d'autres", se serait-il défendu face aux responsables syndicaux, confiant "n'avoir pas voulu 'même en 10 lignes, faire la promotion d'un procédé déloyal, malhonnête qui a instrumentalisé les Klur'". Le directeur des rédactions du Parisien a toutefois démenti toute intervention de ses supérieurs.
"Nous le croyons volontiers. C'est justement le principe de l'autocensure que de rendre inutile les pressions, en anticipant la conduite supposément attendue", dénoncent les syndicats, regrettant un choix "toxique". "Le silence pour lequel a opté le directeur de la rédaction est un message dangereux envoyé à l'actionnaire LVMH", concluent-ils. De son côté, Libération souligne que Les Echos, autre titre détenu par le groupe, a également fait l'impasse sur "Merci Patron !".