Il ne lui aura pas fallu longtemps pour répliquer. Moins de 24 heures après la tribune de Patrick Cohen sur Le Plus et dans les colonnes de la version papier du Nouvel Observateur, Daniel Schneidermann répond à l'animateur de la matinale de France Inter dans son "neuf-quinze" sur son site Arrêt sur images. Le journaliste titre sa tribune "La mort dans l'âme : réponse d'un idiot à Patrick Cohen", après avoir été considéré par celui qui officie également dans "C à vous" sur France 5 comme "l'idiot utile des dieudonnistes", celui-ci jugeant que Dieudonné et Alain Soral se servaient d'extraits de chroniqueus de Daniel Schneidermann dans Libération pour leurs vidéos de début 2013.
"Décidément, les temps sont chauds. Après un site de traqueurs de sionistes, qui nous accuse d'être à la solde du sionisme international, voici que surgit de l'autre extrémité de la scène une accusation symétrique du matinalier de France Inter Patrick Cohen : je suis le chef d'orchestre des dieudonnistes. Leur 'idiot utile'. Quand Dieudonné et Soral sont en panne d'inspiration pour leurs vidéos, hop, ils plongent dans @si, ou dans mes chroniques de Libé, et les voilà requinqués, repartis pour un tour" débute Daniel Schneidermann, soulignant qu'"il a fallu à Patrick Cohen, 324 jours pour trouver ça". "Ca valait le coup" ironise-t-il.
"Je ne vais pas perdre de temps à me défendre" prévient le fondateur d'Arrêt sur images qui préfère dans un premier temps s'adresser à ses lecteurs plutôt qu'à Patrick Cohen. "Si on voulait, comme il nous en accuse élégamment, draguer l'abonné dieudonniste, on aurait pu mieux s'y prendre. Mais j'oubliais : on est idiots" écrit-il après avoir détaillé le "dossier Dieudonné" de son site, avec entre autres des contradicteurs et des "chroniques au vitriol" de Didier Porte, avant de s'adresser directement à Patrick Cohen.
"Prudemment, d'ailleurs, vous vous gardez bien, Patrick Cohen, d'évoquer @si. Vous vous concentrez sur ma chronique du 17 mars 2013 dans Libé. Et donc, 324 jours plus tard, vous me reprochez, à l'égard de Dieudonné et Soral (tiens, où sont d'ailleurs passés Ramadan et Nabe, que vous citiez aussi à l'époque ? Toujours des 'cerveaux malades' ?), des formulations euphémisantes. J'ai écrit que Soral était 'un publiciste inclassable'. OK, j'admets. Le 'inclassable' sur Soral était absurde. Soral : affaire classée" poursuit Daniel Schneidermann.
"A la seule question qui compte : le procès que vous avez fait à Frédéric Taddeï d'inviter sur son plateau les affreux, les 'cerveaux malades', comme vous dites, et qui est à l'origine de notre micro-polémique, était-il professionnellement justifié ? A mes yeux, non" continue le journaliste, pour qui "le rôle d'un journaliste, c'est de tenter d'appréhender et de montrer toute la réalité. Même celle qui lui déplait. Même la réalité désespérante. Même la réalité nauséeuse". "Non, elle n'est pas belle, la France des dieudo-soraliens. Mais la France d'aujourd'hui, ce ne sont pas seulement les puissants et les sachants. La France, ce ne sont pas seulement les ministres, les corps constitués, et les intellectuels labellisés, qui se succèdent bi-quotidiennement à votre micro, de matinale en access prime time, en un ballet immuable" lâche-t-il.
"L'ironie de cette polémique, c'est que je n'ai jamais invité, moi non plus, ni Dieudonné, ni Soral, et les dieudonnistes de notre forum nous le reprochent assez, idiots qu'on est décidément. Ni à l'époque de France 5, ni depuis 2008 sur ce site" note Daniel Schneidermann un peu plus loin, accusant toutefois Patrick Cohen de participer au succès des spectacles de Dieudonné, au même titre que Manuel Valls.
"Vous noterez que je viens de vous répondre, Patrick Cohen, comme si votre papier de L'Obs était, à mon égard, une critique acceptable. Je suis décidément un gentil garçon. Car acceptable, il ne l'est pas. Vous ne me reprochez pas seulement de vous avoir critiqué. Vous me reprochez de vous avoir critiqué en tant que Juif. 'Le Juif Cohen', glissez-vous au détour d'une phrase. Et ça, cette manière de brandir son étoile jaune en bouclier, je vous le dis, c'est infâme. Qui vous a mis en cause 'en tant que Juif', Patrick Cohen ? Trouverez-vous sous ma plume une ligne vous autorisant cette grotesque imputation larvée d'antisémitisme ? Et alors, pourquoi ne pas avoir porté plainte, comme France Inter l'a fait, à raison, contre Dieudonné ? Relisez-moi" écrit Daniel Schneidermann dans sa conclusion.