"Tourne sept fois ton tweet dans ta tête avant de tweeter". Telle pourrait être la leçon retenue par ces internautes qui, n'accordant pas assez d'intérêt aux conséquences de leurs actes, ou, se sentant tout simplement dans un univers (trop) distinct de la réalité, ont subi les conséquences d'une publication de tweet(s) déplacé(s) sur la plateforme de microblogging aux quelques 200 millions de membres.
Dick Costollo, PDG de Twitter, expliquait dernièrement : "Nous devrions pouvoir utiliser Twitter partout, tout le temps, quelles que soient les plateformes, Twitter sera alors comme de l'eau, et ce que nous verrons alors, ce sont nous-mêmes". Et il est vrai que dans le principe, sur la toile, rien n'est plus simple que la publication d'un message de 140 caractères –ou moins– sur ce réseau. Une pensée, un clic, et la communauté tout entière peut potentiellement profiter de votre écrit. Des millions d'adolescents, journalistes, professionnels du web ou autres célébrités tweetent comme ils respirent. Bien qu'il s'agisse d'un objectif (atteint) pour la société californienne, cela n'exclut par pour autant que les conséquences peuvent parfois s'avérer regrettables pour leurs auteurs. Car de petits coups de sangs à moments d'égarement, le résultat est souvent le même : un préjudice minime peut engendrer une sanction dont, clairement, leurs victimes se passeraient volontiers.
Que dire, tout d'abord, de ceux dont l'emploi a été menacé par l'oiseau bleu ? Tout le monde se souvient de cet employé de Nespresso dont l'avenir dans l'entreprise avait été remis en cause –par excès de zèle ?– suite à la plainte d'un client sur la plateforme de microblogging, jugeant son attente trop longue. Ce n'est pourtant pas un cas isolé ; une simple recherche sur Google permet d'identifier de nombreux cas similaires, avec, pour les plus malchanceux d'entre eux, un licenciement au nom du tweet. Que dire également des avertissements et autres fautes plus ou moins graves issus d'une inattention certaine sur Twitter ? Si vous êtes un adepte du microblogging, alors vous connaissez certainement un internaute ayant déjà supprimé au moins un tweet suite à une réprimande (qui curieusement, elle, n'a pas été tweetée) de la part de parties prenantes, dans un cadre professionnel ou non. Vous-même, peut-être ?
Regrets ou non, certains gazouillis font parfois perdre bien plus que des plumes à leurs auteurs. Qu'il s'agisse d'une sanction interne, d'un arrangement afin d'éviter une procédure judiciaire ou du verdict d'un juge, certains tweets s'avèrent parfois très onéreux. Le meilleur exemple est certainement celui de Courtney Love, qui, suite à un différend avec la styliste de mode Dawn Simorangkir, publia une série de huit tweets dans lesquels cette dernière recevait notamment la distinction de "sale menteuse" ou encore de "voleuse". Un acte qui obligera l'ex compagne de Kurt Cobain à remettre la coquette somme de 430.000$ à la "Boudoir Queen", à travers divers versement échelonnés jusqu'en 2014. De quoi (de nouveau) placer toute sa garde-robe sur eBay.
Il serait d'ailleurs possible de classer ces tweets dans trois différentes catégories : les tweets "plainte" (ceux de Courtney Love en font partie), qui peuvent générer d'éventuelles représailles lorsque la victime considère qu'ils engendrent un préjudice ou qu'il s'agit tout simplement de diffamation (ces tweets peuvent concerner tous les utilisateurs de Twitter), les tweets "mauvais timing", qui sont généralement publiés par des personnalités, à un moment durant lequel il leur est interdit de tweeter (avant, pendant et après un match chez certains sportifs, par exemple), et enfin les tweets "sarcastiques", généralement publiés par des internautes déçus d'une situation ou d'un produit ou service. Pensant simplement se soulager de leur frustration, ces utilisateurs de Twitter sont à mille lieux de s'imaginer que cela pourrait leur porter préjudice (et surtout, leur coûter cher). En voici quelques exemples réputés :
- Rasheed Wallace (Bolton Celtics, NBA, USA) a été condamné par la NBA à payer 30.000 US$ pour "public criticism of officials".
- Helio Castroneves (Penske, IndyCar) a été condamné à payer 30.000 US$ pour avoir traité Brian Barnhart de "clown de cirque".
- Mark Cuban (Dallas Mavericks, NBA, USA) a été condamné par la NBA à payer 25.000 US$ pour s'être plaint à travers un tweet après un match.
- La société Zlio (France) a dû payer 10.000€ (13.000 US$) de dommages et intérêts pour avoir dénigré Referencement.com sur Twitter.
- Danny Gabbidon (West Ham, PL, Grande-Bretagne) a dû payer 6.000£ (9.000 US$) pour avoir dit "You know what fuck the lot of you..." à ses abonnés sur Twitter
- Matt Giteau (Brumbies, AFL, Australie) a été condamné à payer 6.300 US$ (5.000 A$) pour avoir critiqué un arbitre sur Twitter.
- Ricky Petterd et James Frawley (Melbourne, AFL, Australie) doivent payer 2.400 US$ chacun pour voir tweeté leur mécontentement.
- Antonio Cromartie (San Diego Chargers, NFL, USA) a dû payer 2.500 US$ pour avoir critiqué la nourriture servie dans son club.
- Digby Ioane (Queensland, AFL, Australie) a dû payer 1.900 US$ pour avoir nommé un arbitre "pire arbitre de tous les temps".
- Chad Ochocinco (Cincinnati, NFL, USA) a dû payer 25.000 US$ pour deux tweets publiés à une période qui lui était interdite (soir de match).
- Brandon Jennings (Milwakee, NBA, USA) a dû payer 7.500 US$ pour avoir tweeté trop tôt après la fin d'un match.
- Amare Stoudemire et Tyson Chandler (NBA, USA) ont du payer 7.500 US$ pour avoir tweeté durant un match (tweet par un stagiaire, et tweet automatique).
- Carlton Cole (West Ham, PL, Grande-Bretagne) a dû payer 20.000 US$ pour "comportement non approprié" suite au match Ghana – Angleterre.
- Ryan Babel (Liverpool, PL, Grande-Bretagne) a dû payer 16.000 US$ pour avoir tweeté une image moqueuse au sujet de l'arbitre Howard Webb.
- Paul Chambers (Grande-Bretagne) a dû payer 1.500$ pour avoir plaisanté sur la sécurité de l'aéroport de Robin Hooh Airport.
Il paraît fort improbable que vous n'ayez pas déjà deviné la morale de cette chronique. Twitter est un univers sur lequel il paraît envisageable de publier tout et n'importe quoi, sans conséquence, c'est d'ailleurs très clairement ce qui fait son succès. Que l'on possède un compte personnel, professionnel ou d'entreprise (au nom d'une marque, par exemple), n'oubliez cependant pas que tout égarement ou acte malveillant –bien qu'innocent dans le principe– subi les mêmes lois que celles appliquées au web en général, et plus largement, au "offline" : un utilisateur n'est donc jamais à l'abris de conclusions similaires à celles citées précédemment, même si bien entendu, l'expérience souligne nettement que les sanctions les plus coûteuses concernent des sportifs conditionnés par des règles strictes et des personnalisés aux tweets à fort impact. Mais qui d'entre-vous ne regretterait pas de perdre l'équivalent d'un SMIC en un clic ?
Il devient donc nécessaire de s'habituer dès aujourd'hui à évaluer les conséquences de chacune de ses publications, sinon quoi, ce genre d'expériences devrait se renouveler de manière régulière, au grand damne des utilisateurs. Il paraît également essentiel de rappeler qu'un tweet publié à une certaine date peut avoir des conséquences jusqu'à plusieurs années après, donc autant prendre de bonnes résolutions dès maintenant !
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