Scott sort avec la belle Ramona depuis peu. Mais avant de vivre des jours heureux avec sa dulcinée, il doit affronter les sept ex de la demoiselle dans des combats dantesques... Pour son troisième long métrage, Edgar Wright se sépare de la team Pegg/Frost (qu’il a dirigée dans Shaun of the Dead et Hot Fuzz) pour réaliser ce film cyber-nintendo-pop. Adaptation de comics (on ne cherchera pas à savoir si l’adaptation est justifiée ou pas, votre humble serviteur n’ayant pas encore lu l’œuvre originale) sous forme de film à l’aspect de jeu vidéo, Scott Pilgrim prend les codes de tous ces médias avec enthousiasme. Le résultat est probant, il renvoie au placard plus de 15 ans d’adaptations honteuses du genre Street Fighter, Double Dragon - et surtout l’adaptation franchement ratée de Dragon Ball, qui se fait enterrer en moins de deux.
Ce qui démarque d’entrée de jeu Scott Pilgrim de toutes les autres adaptations, c’est la non-volonté de traduire une narration bédéesque/vidéoludique en une narration cinématographique. La grammaire cinéma se mélange avec celles des jeux vidéo, comics, mangas, clips, sitcoms… bref, tout pour coller au film la facile étiquette geek. Et sans aucune subtilité, le mélange fonctionne ! Cette cacophonie audio-visuelle jamais loin de l’abstraction a de quoi marquer les esprits. Le montage atteint un point d’abstraction où un instant de la baston finale se retrouve résumé à une suite de photogrammes au rythme proche de la stroboscopie.
Connaissant le travail de Wright sur le rythme soutenu de Spaced, Shaun of the Dead et Hot Fuzz, Scott Pilgrim parait être une évolution logique. Esquivant les personnages de synthèse et le film en 3D relief, il suit une autre option du « cinéma numérique >>, comme Sin City, 300 (Peplum) et Speed Racer avant lui. Ce film-photoshop utilise la culture multimédia de son auteur avec passion ; nombreux seront surpris d’entendre des thèmes de la saga vidéoludique The Legend of Zelda lors des séquences oniriques. Graphismes en pixelart et musiques en chiptune insufflent au film une âme retrogaming digérée dans la culture actuelle.
Les comédiens évoluent à leur aise. Michael Cera dans le rôle de Scott, moins looser que d’habitude, ajoute à sa capacité de nous faire rire en un regard un jeu corporel complètement cartoon, et c’est un vrai plaisir de voir Kieran Culkin, « frère de », dans un rôle décalé. Mary Elizabeth Winstead, la sublime Ramona, illumine l’écran à chacune de ses apparitions, la voir se battre est un grand moment… La ligue des ex démoniaques est un défilé de personnages plus absurdes les uns que les autres. Entre l’indien démoniaque habillé en pirate et le blond écervelé végétalien, les adversaires de Scott valent le coup d’œil.
L’histoire est structurée « à niveaux », comme dans un jeu, promettant au film d’aller de plus en plus haut dans la surenchère. Peut-être qu’il commence trop fort pour continuellement nous surprendre, on s’habitue très vite à voir les personnages s’envoyer dans les murs à coups de mandales – quand ça n’est pas un combat de monstres géants créés par des ondes sonores.
S’il faut trouver un élément négatif à ce film, c’est qu’il ne répond qu’à l’attente qu’il crée. Aucune réelle surprise ne peut nous bousculer, en tout cas, moins que dans les précédents films d’Edgar Wright. Incruster des onomatopées dans les airs à chaque coup de poing ou de téléphone, ce n’était pas vraiment nécessaire en 2010. Le film n’est certes pas innovant dans sa forme – déjà vu sur consoles –, mais difficile de bouder son plaisir devant ce machin bizarre, créature mutante multimédia ressemblant trop à un jeu pour n’être qu’un film, avec un humour con bienvenu.
Film bruyant, épileptique et bien fendard, Scott Pilgrim est un fantasme qui prend enfin vie. C’est autant le gamer que le cinéphile qui parle.
Scott Pilgrim : iFilm 3.0
Publié le 1 décembre 2010 à 12:19
Long métrage multimédia par excellence, "Scott Pilgrim" a la grâce du blockbuster au dynamisme communicatif. Une baffe sous tous points de vue.
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