"Couvrez ce sein que je ne saurais voir", s'écriait Tartuffe dans la célèbre pièce de Molière de 1664. Près de 350 ans plus tard, le réseau social américain Facebook adresse le même message aux Femens, ces activistes féministes qui mènent leurs actions "seins nus". Samedi et dimanche, les services de modération de Mark Zuckerberg ont en effet décidé de fermer les pages anglaises et françaises de l'organisation féministe, comme l'a dénoncé hier la leader des Femen, Inna Schevchenko, dans une tribune du Huffington Post.
Raison invoquée par l'entreprise californienne : ces pages contreviendraient au code d'utilisation du réseau social qui interdit strictement la publication de tout contenu à caractère pornographique ou proumouvant la prostitution et bannit de facto toute représentation de la nudité sur Facebook. Le problème est que la marque de fabrique des Femen est précisément leurs actions coup-de-poing réalisées top-less.
Une raison qualifiée de "grotesque" par la chef du mouvement, Inna Schevchenko. Dans sa tribune, la jeune femme affirme voir dans cette censure "la continuation logique de la guerre contre les Femen que livrent sur Internet différents groupes réacs : les Nazis de l'Europe et des dictatures post-soviétiques jusqu'aux fondamentalistes islamiques". Et la leader ukrainienne de l'organisation d'annoncer que "le mouvement des Femen a fait appel de cette fermeture de ses pages Facebook et a demandé au site de revenir sur sa décision le plus rapidement possible, pour que la révolution féministe retrouve au plus vite son meilleur porte-parole". Elle s'adresse directement au patron du réseau social : "Zuckerberg, le Femen n'est pas de la pornographie". Précisons qu'aujourd'hui, la page française du mouvement féministe est accessible sur Facebook.
Ce n'est pas la première fois que la politique de modération de Facebook concernant la nudité fait débat. En mars dernier, le réseau social avait déjà suspendu la page du musée du Jeu de Paume au motif qu'une affiche de promotion d'une exposition montrait une femme nue en photographie. Quelques mois auparavant, en octobre, c'est cette fois le compte du journal suisse "La Tribune de Genève" qui avait été bloqué. La raison : un des articles du quotidien était illustré par le célèbre tableau du peintre français Gustave Courbet, "L'origine du monde", une toile représentant en gros plan un sexe féminin. Plus surprenant encore, en juillet 2011, c'est la page officielle du groupe de rock Nirvana qui se voyait sommée de retirer la pochette, pourtant devenue mythique, de l'album "Nevermind" car celle-ci représentait un bébé flottant nu dans l'eau d'une piscine.