Bonne surprise pour C8. La chaîne gratuite du groupe Canal+ fait une percée très remarquée dans la catégorie des jeux et empoche le titre avec sa nouveauté, "Guess My Age". Largement plébiscité aux TV Notes 2017, le jeu animé par Jean-Luc Lemoine se paie le luxe de distancer - très largement - les jeux emblématiques de TF1 et France 2, dont "The Wall", la nouveauté à gros budget de l'année. puremedias.com s'est entretenu avec Jean-Luc Lemoine, humoriste, chroniqueur dans "Touche pas à mon poste" et animateur de "Guess My Age".
Propos recueillis par Pierre Dezeraud.
puremedias.com : "Guess My Age" est devant les jeux mastodontes de TF1 et France 2. Comment expliquez-vous votre succès ?
Jean-Luc Lemoine : Je crois que les gens ont accroché avec le concept assez simple et évident. En général, avec "Guess My Age", au début, on se dit que c'est tellement simple qu'on va vite se lasser. Finalement, on se prend vite au jeu et je pense que les gens ont apprécié. Merci à tous ceux qui ont voté surtout ! Je savais que l'accueil était bon mais expliquer pourquoi le jeu a fait la différence dans votre enquête, c'est difficile. Il y avait peut-être aussi une prime à la nouveauté à l'heure où le jeu est un genre qui a du mal à se renouveler. C8 a été courageuse de le mettre à l'antenne, c'est quand même un format original français - même si le titre ne l'indique pas (sourire).
Quand ce jeu vous a été proposé, la simplicité du programme sur le papier vous a-t-elle effrayé ?
Oui, beaucoup ! Ma première réaction a été : "C'est bien mais ça va durer cinq minutes votre jeu". Le premier réflexe que j'ai eu a donc été de dire que ce n'était pas pour moi. Puis, ils m'ont dit "Viens tester". J'ai fait une simulation et je me suis rendu compte que ce jeu était diabolique avec une mécanique addictive. Surtout, ce que j'aime dans ce jeu, c'est les indices. Il n'y a pas que de l'instinct, il y a aussi besoin de culture générale. Ce que je n'aime pas dans les jeux, c'est quand les questions sont trop simples. Là, on ne peut pas vraiment dire que c'est le cas.
Est-ce que "Guess My Age" va revenir sur C8 ?
Oui. Il y a encore des inédits en stock. Dans l'immédiat, il n'y a pas de tournage prévu mais il y a un prime qui sera diffusé ce jeudi, un autre est en boîte, et il reste au moins une vingtaine de numéros inédits à diffuser. Je crois qu'il y a une vraie volonté de la chaîne de capitaliser sur ce jeu. C'est vrai que c'est un produit maison et ce serait dommage de ne pas en profiter.
On reverra "Guess My Age" en quotidienne cet été, comme l'année dernière ?
Ce n'est pas impossible que ce soit le cas dans la deuxième partie de l'été. Cela fait partie des options envisagées par la direction de C8.
Beaucoup de téléspectateurs s'interrogent sur votre avenir la saison prochaine. Vous restez au sein du giron de C8 ?
Normalement, oui. Je n'ai pas encore signé mon contrat mais nous sommes actuellement en discussions. J'arrive à un moment où j'ai très envie de faire du jeu. Ce n'était pas prévu dans mon plan de carrière mais je me suis vraiment beaucoup amusé sur "Guess My Age". J'ai aussi eu la chance de travailler avec des producteurs avec lesquels je me suis très bien entendu. J'ai envie de poursuivre avec eux, de continuer à m'amuser dans "Touche pas à mon pote" et surtout de reprendre mon métier véritable, c'est-à-dire humoriste.
Vous avez discuté de votre envie de faire des émissions sur l'humour avec votre direction ?
Oui. C'est pour ça que ça prend peut-être un peu plus de temps que les autres mais c'est important. J'avais déjà connu ça à l'époque où je faisais "On a tout essayé" avec Laurent Ruquier. Je lui avais dit : "Là, j'ai l'impression que si je ne fais que 'On a tout essayé', je vais tourner en rond" et je suis parti dans ses bagages à "On n'est pas couché", ce qui m'avait permis de démarrer deux rubriques purement humoristiques. Ça m'avait fait beaucoup de bien, et là, j'ai besoin de revenir à des choses comme ça.
En tant que chroniqueur historique de "Touche pas à mon poste", comment avez-vous vécu les dernières semaines très agitées autour de l'émission ?
Vous trouvez ? (rires) Franchement, j'ai eu l'impression de me retrouver au coeur d'un cyclone qui me dépassait un petit peu. Parfois, je suis un peu dépassé car il ne faut pas oublier que "TPMP", à la base, c'est une émission légère pour divertir les gens. Par moment, j'ai eu l'impression, quand on me demandait des comptes sur l'émission, de faire partie du gouvernement. C'est assez surréaliste. Tout prend parfois tellement d'ampleur autour de ce programme que ça me dépasse un peu.
À titre personnel, avez-vous été gêné par le canular homophobe ?
Si des gens l'ont perçu comme homophobe, il faut essayer de comprendre pourquoi. Pour moi, ce n'était pas homophobe. Si j'avais le moindre doute sur le fait que "TPMP" avait des relents homophobes, je ne serais plus dans l'émission depuis très longtemps. Par contre, qu'il y ait des maladresses, que ça dépasse les bornes, oui, cela peut arriver, c'est du direct. Je n'essaie pas d'excuser quoi que ce soit mais je pense que les accusations d'homophobie sont un mauvais procès. Il y a deux volets dans ce canular : une caricature de l'homosexuel qui est un peu datée et que l'on ne doit plus faire en 2017 et le fait d'exposer la vie privée de quelqu'un. Là, c'était dérangeant, il y a eu une erreur. Cyril s'en est rapidement excusé mais pour moi, il n'y a pas d'homophobie là-dedans.
Thierry Moreau puis Enora Malagré ont quitté "TPMP" aux cours des dernières semaines. Vous avez conscience qu'une page se tourne dans cette émission ?
Je ne sais pas si c'est une page qui se tourne. L'émission a un certain âge mais il y a un renouvellement assez naturel. Je l'ai vécu à l'époque de "On a tout essayé". Au bout d'un moment, il y a des gens qui sont remplacés, d'autres qui partent d'eux-mêmes. Enora a dit elle-même qu'elle avait eu l'impression d'être devenue sa propre caricature. J'ai l'impression qu'elle s'était lassée de son rôle dans l'émission. Son départ est très légitime. Est-ce que c'est la fin d'une époque ? Je ne pense pas, la marque est forte. De toute façon, j'ai toujours dit que l'émission reposait sur Cyril. Il est le plat de résistance et nous, les chroniqueurs, nous sommes la garniture. Au fil des années, on a vu des gens s'intégrer très rapidement à l'émission. Gilles Verdez par exemple mais aussi, pour prendre le cas de cette année, Maxime Guény, Géraldine Maillet et Benjamin Castaldi.
Vous avez imaginé arrêter "TPMP" ?
Oui, je me suis posé la question dès l'année dernière. Ce n'est pas un secret, je m'en étais ouvert dans l'émission. C'est très chronophage de faire "TPMP". Comme j'ai envie de revenir à mon métier de comédien, il m'arrive de me poser des questions, même si je m'amuse beaucoup. Je ne suis pas lassé, j'ai juste besoin pour m'équilibrer de faire du flux mais aussi de faire des choses plus durables comme l'écriture. C'est vrai que je n'ai plus beaucoup de temps pour faire du durable et ça me manque un petit peu.
La séquence dans laquelle Capucine Anav pose sa main sur le sexe de Cyril Hanouna a été lourdement sanctionnée par le CSA. Ce sont des images qui sont passées dans les 4/3. Vous avez eu un regret par rapport à cela ?
Les 4/3 en gros, c'est "Je vous fais participer à une discussion entre amis". A chaque fois, je me demande si les gens vont rentrer dans le contexte. Honnêtement, quand Cyril m'a dit que certains parlaient d'agression sexuelle à propos de cette séquence, je lui ai répondu : "Arrête tes conneries". À aucun moment, je n'ai pensé que ça prendrait de telles proportions. Il y a deux ans, j'ai fait les 4/3 avec Enora qui faisait exactement la même chose, un chat-bite. À l'époque, les gens disaient juste : "Elle n'a pas froid aux yeux". Deux ans plus tard, c'est devenu : "agression sexuelle". Non, c'est juste très potache. Franchement, si j'avais pensé que c'était une agression sexuelle, je ne l'aurais pas montré et j'aurais dénoncé Cyril à la police. Là où je peux faire mon mea culpa, c'est peut-être que, pour des gens qui rentrent dans une séquence comme ça, il n'ont pas forcément tout le contexte autour. C'est notre responsabilité de leur donner des clés pour comprendre ce qu'il se passe à un instant T.
Il y a eu une forme d'hystérisation ?
Oui. J'ai toujours dit à Cyril : "Je pense que les gens t'adorent mais qu'un jour, ils vont te détester pour les mêmes raisons". Ils ont adoré Cyril parce qu'il était excessif. Maintenant, on lui reproche d'être excessif. C'est un cycle assez naturel par lequel sont passés de nombreux animateurs. Dans le même ordre d'idée, c'est assez hallucinant de voir la différence de traitement de "TPMP" entre Paris et la province. À Paris, il y a une grille d'analyse qui a été posée, on cherche ce qui pourrait faire le buzz. En province, c'est plus positif, l'émission est simplement vue comme un programme rigolo. C'est vraiment quelque chose que j'ai constaté en faisant ma tournée.