Lundi. Frémissement. Dans le cadre de mes nouvelles fonctions professionnelles, je vais rencontrer Orelsan, célibataire, rappeur, craqueur sous pression, amateur de film amateur. Tout comme moi. Ah non, je ne suis pas célibataire. Ah Orelsan... Quand ton premier album est sorti, j'ai senti ma fibre gansta grandir (ou plutôt naître vu mon style néo-bobo-romantico-rock). Jusqu'à ce moment-là, je me sentais bling bling quand j'enfilais un bracelet brésilien et Booba était avant tout un petit ourson. Après ton premier album, je me suis mise à fredonner à tue tête dans le métro "Nous on s'en bat les couilles d'être différents...", soufflant ainsi un vent de rébellion dans mon brushing L'Oréal. Je n'avais plus peur de faire des "wesh gros", "yo" ou "ziva" (oui parce que moi je suis une caillera vintage). Jviens pas du 9-3 mais du 5-7 et crois moi Orel, la Moselle parfois, c'est aussi dangereux que la banlieue. Surtout les soirs de feux de la St Jean.
Le jour où tu as chanté "des fois j'vois tout en noir, comme Gilbert Montagné", je me suis dit qu'on se comprenait toi et moi. L'une de tes nouvelles chansons s'appelle même "1990", comme mon année de naissance. Sur la pochette de ton nouvel album, tu ressembles à un super héros. En vrai, t'es un post ado qui peut crier "Sale Pute" dans l'une de ses chansons et s'extasier sur des figurines des Chevaliers du Zodiaque : ça me bouleverse. D'ailleurs "Sale Pute", c'est un peu une déclaration d'amour finalement. Le mec, il aime tellement sa copine qu'il veut lui casser une jambe et lui défoncer la mâchoire. Stendhal aurait probablement trouvé ça très romantique. Alors pour toi, Orelsan, j'ai décidé de lâcher mon flow. Âmes sensibles s'abstenir.
"Orelsan, je t'attends dans une boutique de manga. Je me suis dit que j'allais t'appâter avec des jeux vidéos et du fanta. T'es trop mignon avec ton yogging, tu me rappelles un peu mes amoureux de lycée, fans de tuning. T'adores les BD, les super héros, tu dis bonjour à la dame qui vend des boites à bento. On se fait une partie de Tortue Ninja sur une vieille console Sega. Tu me mets la raclée. On va dire que je t'ai laissé gagner. J'te dis que ton album est beau comme des stilletos. Tu rougis, t'es plus vraiment couleur Kiri Tu me dis qu'il ne faut pas avoir peur de toi Moi, Orelsan, je te crois. On va rassurer la ménagère de plus de 50 ans qui va regarder, terrorisée, mon sujet devant son écran. D'ailleurs t'as même arrêté la junkfood pour prendre soin de toi : bravo Orel, t'es presque plus une grosse caillera."
Je ne suis pas tout à fait certaine de décrocher le Prix Constantin avec mon rap mais Orelsan, j'espère que tu kifferas. Pardon, j'ai juste un peu dérapé quand je t'ai demandé d'improviser un numéro de beat box. 21 heures. En rentrant le soir à la maison, je me suis à peine réconciliée avec les gangstas que je découvre Jean-Luc Delarue au JT de France 2 . Son mea culpa version "la drogue, c'est mal" me donne envie de me rouler dans la coke. Comme quoi, une caillera peut vraiment en cacher une autre...