Une première vouée à l'échec ? C'est en tout cas l'avis de Franck Cadoret, le directeur général France de Canal+, au sujet du futur service de streaming Salto, pour lequel TF1, France Télévisions et M6 se sont associés et où les internautes pourront retrouver tous leurs programmes télé. Le numéro 2 du groupe s'exprimait jeudi dans le cadre de la 5e édition du Trophée des apps et de la vie numérique qui avait lieu à Paris, comme le rapporte "Les Echos".
La plate-forme commune aux trois groupes permettra de regarder les programmes en direct mais aussi en replay, avec sans doute des fenêtres allongées par rapport au traditionnel J+7. Surtout, Salto sera payant et même si aucun tarif n'a pour l'heure été dévoilé, l'offre de base devrait tourner autour de 5 euros par mois. Au cours de son intervention, Franck Cadoret n'a donc pas manqué de faire allusion au conflit en cours qui oppose le groupe crypté à TF1, qui veut faire payer la distribution de ses chaînes. Le groupe dirigé par Gilles Pélisson a d'ailleurs assigné son concurrent en justice le mois dernier pour tenter d'obtenir gain de cause. "Il est vrai qu'en ce moment faire payer pour des trucs qui sont gratuits, c'est à la mode", a ironisé le dirigeant de Canal+.
Et de poursuivre sur le même ton mordant : "S'ils ont décidé de se lancer, c'est parce qu'ils ont dû avoir plein de clients qui leur ont dit oui, c'est super, on est d'accord pour payer des contenus qu'on a déjà en gratuit !". Franck Cadoret a également pointé du doigt un problème de cohérence entre l'offre et la demande. "Les gens qui regardent la télé, ils ont mon âge", a estimé le numéro 2, âgé de 60 ans. Or, le public fidèle à un service comme Netflix, dont Salto entend s'inspirer sans pour autant le concurrencer, se situe plutôt dans la cible des 15-34 ans.
Franck Cadoret a donc résumé de la façon suivante la philosophie qui préside selon lui à Salto : "un truc qui s'adresse à des vieux mais qui est pour des jeunes, qui était gratuit et qui devient payant... S'ils y arrivent, je suis prêt à leur apporter une bouteille de champagne à chacun !", s'est-il exclamé, confiant.
Mercredi dernier, auditionné par la commission culture du Sénat, le président du directoire de Canal+, Maxime Saada, avait "salué ce rapprochement" entre les principaux acteurs français de l'audiovisuel, tout en confiant que son groupe n'avait pas été sollicité pour intégrer le projet de plate-forme commune. Le dirigeant a également annoncé l'arrêt prochain de sa plate-forme de VOD CanalPlay après sept ans d'existence. Cette décision a été prise après la chute vertigineuse du nombre d'abonnés, passé de 800.000 à 200.000 utilisateurs, que Canal+ a mis sur le compte d'un cadre réglementaire trop contraignant. Un échec qui n'a pu qu'accroître la rancoeur de la filiale du groupe Vivendi à l'égard de Salto.