Ce que le Tout-Paris des affaires prédisait est arrivé, et même plus vite que prévu. Hier soir dans un communiqué, le groupe Vivendi, déjà premier actionnaire de Lagardère avec 27% de son capital, a annoncé l'achat prochain des parts d'Amber Capital dans ce même groupe, soit environ 18%. Lui faisant franchir ainsi le seuil des 30% de Lagardère, cette opération obligera Vivendi à déposer un projet d'offre publique d'achat (OPA) sur le restant des parts. Le géant détenu par Vincent Bolloré se donne jusqu'au 15 décembre 2022 pour mener à bien son acquisition annoncée à un prix de 24,10 euros par action, soit une prime de près de 24% par rapport au cours actuel.
Le propriétaire de Canal+, Prisma et Havas, compte ainsi renforcer son empire des médias en faisant tomber dans son giron Europe 1,"Le journal du dimanche" et "Paris-Match". Vivendi, propriétaire de la société d'édition Editis (Nathan, Robert Laffont) pourrait aussi rafler Hachette, la pépite de l'édition de Lagardère. L'offensive en cours devra toutefois encore recevoir l'assentiment de plusieurs autorités de contrôle, dont le Conseil supérieur de l'audiovisuel et la Commission européenne, en raison des risques de concentration dans les secteurs de l'édition et des médias.
L'OPA de Vivendi est rendue possible par le changement de statut de Lagardère, devenu une société anonyme comme les autres en avril, après une lutte homérique entre actionnaires. Perdant ainsi le contrôle absolu de son groupe, Arnaud Lagardère avait dans ce cadre réussi à s'assurer un poste de PDG pendant six ans, à moins que le conseil d'administration n'en décide autrement à une majorité des deux tiers. Vincent Bolloré n'aura, lui, attendu que trois mois avant de passer à l'action dans un groupe devenu "opéable".
Interrogé dimanche 5 septembre par son propre hebdomadaire, "Le journal du dimanche", Arnaud Lagardère avait visiblement peu anticipé les évènements en cours. Interrogé sur l'avenir d'Amber Capital au sein de Lagardère, il avait ainsi affirmé qu'il allait rester actionnaire et que tel était en tous les cas son souhait. Raté. Arnaud Lagardère avait en revanche estimé que l'arrivée de Vincent Bolloré dans son groupe était "une bénédiction". Une appréciation pas inutile alors que le milliardaire breton s'apprête à devenir probablement le seul maître à bord.