Pourquoi le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a-t-il reçu deux fois le chèque énergie ? C'est la question à laquelle "Libération" a tenté de répondre, après que le député européen s'est lui-même étonné, ce mardi 17 janvier sur RTL, d'être bénéficiaire de ce dispositif réservé aux foyers les plus modestes, et auquel il n'est pas éligible.
Ce chèque qui contribue à financer les factures d'énergie est, en effet, attribué de manière automatique sous condition de ressources, avec un plafond fixé à 17.400 euros de revenu fiscal de référence (année 2020) dans le cas d'une personne vivant seule. Jordan Bardella, qui a pris soin de préciser ne pas avoir encaissé le chèque, a pointé "un problème de ciblage" de la mesure et renvoyé la responsabilité de ce raté au gouvernement.
Dans un article du vendredi 20 janvier, "Checknews", le service de vérification du quotidien national, a émis une autre hypothèse. "S'il a bénéficié de ce coup de pouce", avance-t-il, "c'est plus probablement parce qu'il ne déclare pas ses revenus de député européen en France, comme un certain nombre de parlementaires européens".
Ce que Jordan Bardella, invité ce dimanche 22 janvier de l'émission politique de CNews et Europe 1, "Le grand rendez-vous", a démenti. "Je rassure tout le monde, je déclare tous mes revenus, et bien entendu mes revenus de députés européens, en France à l'administration fiscale chaque année. Et vous vous doutez bien que si je ne les déclarais pas, je pense que cela se serait su depuis très longtemps compte-tenu de mon exposition médiatique", a-t-il assuré au micro de Sonia Mabrouk.
Avant de fustiger les "méthodes de voyou" employées, selon lui, par "Libération", "qui probablement ne vendant plus de papier cherche un peu à faire du buzz quitte à salir des responsables politiques". Le président du RN de conclure : "Je trouve cela particulièrement malhonnête, déloyal que de balancer de telles invectives et des accusations diffamatoires sans pour autant les justifier. Donc nous avons publié un droit de réponse et 'Libération' sera poursuivi en diffamation". puremedias.com vous propose de visionner la séquence.
Dans sa démonstration étayée, le journal explique que depuis 2009, "les eurodéputés perçoivent tous la même rémunération, versée par le Parlement européen et non plus par le Parlement national" et que, par conséquent, un impôt européen leur est prélevé à la source. Quid alors de l'imposition par la France de cette rémunération versée par le Parlement européen ? Diverses versions s'affrontaient jusqu'à l'été dernier, quand, relate "Libération", le Conseil d'Etat a "disposé que les élus rémunérés par le Parlement européen n'étaient pas imposables en France à l'impôt sur le revenu, en l'état actuel du droit fiscal".
Depuis, la situation fiscale des eurodeputés a évolué : le projet de loi de finances pour 2023 prévoit en effet que les revenus perçus par les députés européens français à compter du 1er janvier 2022 soient imposés en France. En attendant, "Libération" s'interroge : "Cela veut-il dire que Jordan Bardella, anticipant la décision du Conseil d'Etat (et en faisant donc une lecture correcte du droit fiscal), ne déclarait pas les revenus tirés de son mandat européen au fisc français en 2020 ?".
Précisons que Jordan Bardella a refusé de répondre dans l'article de "Libération", à la fin duquel un député RN, dont le nom n'est pas cité, admet, de son côté, ne pas avoir déclaré ses revenus d'eurodéputé en France en 2020, "car déjà imposés côté européen".