Partenariat. Elle a révolutionné l'art de l'interview cathodique. En 1959, la journaliste Denise Glaser convainc Jean d'Arcy, alors directeur de la télévision française, d'accepter son projet d'émission de télévision baptisée "Discorama". Celle-ci consiste en un grand entretien avec une figure des variétés françaises ou internationales. Révolution à l'époque, "Discorama" sera animée et surtout produite par une femme. Et une femme pas comme les autres : Denise Glaser, que la plateforme de l'INA, madelen, a décidé de mettre à l'honneur.
Parmi les partis pris novateurs de "Discorama", on retrouve le fait de filmer l'envers du décor de l'émission. Les câbles, les caméras et les techniciens apparaissent ainsi à la vue des téléspectateurs, en contradiction avec tous les codes de la télévision de l'époque. Cette idée originale est imposée par le génial réalisateur du programme à partir de 1964, Raoul Sangla. Adepte des questions existentielles lancées à ses invités, Denise Glaser impose aussi ses choix artistiques audacieux, invitant les chanteurs et chanteuses dans lesquels elle croit, même si leur notoriété est faible. C'est ainsi qu'elle impose "Le métèque", une chanson de Georges Moustaki refusée à l'époque par toutes les maisons de disques. Le natif d'Alexandrie interprète finalement son titre en plateau, lui permettant de devenir une oeuvre culte de la chanson française. Quitte à agacer fortement sa direction, Denise Glaser n'hésite pas non plus à inviter Jean Ferrat pour qu'il entonne "Nuit et brouillard", une chanson interdite à la radio à l'époque.
Dans le sillage de mai 1968, la position de Denise Glaser sera toutefois progressivement fragilisée à l'ORTF par ses idées jugées trop à gauche par le pouvoir en place. Après l'arrivée de Valéry Giscard d'Estaing à l'Elysée, la journaliste sera même carrément interdite d'antenne avec un dernier numéro de "Discorama" consacré au chanteur canadien Gilles Vigneault, et diffusé en 1975. S'en suivra une longue et douloureuse descente aux enfers pour Denise Glaser. Refusant de pointer au chômage, l'animatrice sera abandonnée par ses anciens collègues et les artistes qu'elle a pourtant lancés. Quelque temps avant sa mort, elle aurait ainsi confié à son amie et confidente Dominique Desanti à propos des chanteurs et chanteuses : "Maintenant qu'ils sont célèbres, ils m'ont oubliée". Denise Glaser meurt en 1983 dans le dénuement et la solitude, à 62 ans.