Un bilan peu flatteur. Dans le cadre de son deuxième état des lieux sur le sexisme en France, publié ce lundi, le Haut Conseil à l'Egalité s'est focalisé sur le sexisme dans les médias, en politique et dans le monde du travail. Dans la première catégorie, cette instance consultative créée en 2013 s'est penchée sur les clips musicaux, l'élection de Miss France ou encore trois émissions de télé-réalité pour dresser un état des lieux de la situation.
Le HCE a ainsi visionné sept épisodes des "Marseillais VS le reste du monde" sur W9, des "Anges" sur NRJ 12 et de "Koh-Lanta" sur TF1, trois émissions choisies car leurs candidat(e)s sont "captifs et captives d'un lieu ou de procédures dont ils/elles ne peuvent s'échapper". Et le rapport y pointe du doigt des "ressorts sexistes exacerbés malgré une tentative de valorisation de la puissance des femmes".
Evoquant une "culture de la virilité", le rapport explique que ces programmes, "essentiellement fondés sur la mise en scène de clashs", "valorisent d'un côté 'l'hyperféminité' des candidates et de l'autre 'l'ultra-masculinité' des candidats". Dans cette logique, "les femmes castées présentent des caractéristiques comportementales stéréotypées, s'apparentant soit aux clichés de la femme 'bimbo', soit à ceux de la 'partenaire idéale' (ou idéalisée)", poursuit le rapport.
Les femmes sont aussi parfois réduites à leur corps. Le HCE souligne ainsi qu'il n'est pas rare, dans "Les Marseillais" ou "Les Anges", que les femmes apparaissent "partiellement dénudées", ce qui n'est "pas en adéquation avec la situation du moment". Pointé du doigt, le groupe NRJ invoque le monde de la musique urbaine, "très sexualisé" et qui inspirerait les candidat(e)s. Le groupe précise que les participants choisissent eux-mêmes leur tenues et qu'ils "s'inspirent beaucoup des codes de la pop-culture et de 'l'empuissancement', traduction française de 'l'empowerment'".
Le HCE souligne également que les femmes sont souvent dénigrées, par les hommes ou par les autres femmes elles-mêmes. La rivalité est au coeur des rapports entre les candidates, et les injures sexistes sont "extrêmement fréquentes".
Les exemples sont multiples du côté des "Marseillais" ou des "Anges", mais le cas de "Koh-Lanta" est quant à lui peu évoqué dans l'étude. Le HCE souligne deux sorties sexistes de candidats, l'une émanant d'un homme ("Cindy a le profil type de la blonde un peu limitée au premier abord, mais elle est très très intelligente"), l'autre d'une femme ("Elle passe déjà pour la cagole"), et souligne que "la plupart des épreuves sont sportives et nécessitent de la force physique et de l'endurance".
"Les hommes sortent vainqueurs de ces épreuves à chaque fois. Les seules fois où des femmes ont gagné, elles étaient en binôme avec un homme. Jamais une femme n'a remporté une victoire seule ; les épreuves où elles ont gagné étaient une épreuve d'agilité et une épreuve où il fallait manger des insectes, et là encore, en binôme", liste ainsi le HCE.
Quant à Miss France, le Haut Conseil à l'Egalité dénonce "une caricature archaïque" aux critères de participation "discriminatoires", qui "normalise la femme objet" et "enferme les femmes dans des stéréotypes". "Cette dictature d'une beauté unique, être grande, mince, jeune etc. participe de la création d'une chape de plomb supplémentaire placée sur les épaules des filles et des femmes. (...) Dans ce concours censé mettre en valeur les femmes, on s'aperçoit qu'elles ne sont, en fait, que femmes objets et non sujets", assène le Haut Conseil.
Entendue sur le sujet, TF1, qui diffuse le concours, affirme que l'émission "assume son côté désuet" mais souligne sa volonté de faire évoluer le programme, où "le physique ne demeure plus l'unique critère" et où "les séquences en petite tenue ont été réduites".
Face à ces constats, le Haut Conseil à l'Egalité émet plusieurs recommandations, à commencer par un renforcement du rôle du CSA "pour imposer à chaque chaîne de progresser annuellement, à la fois sur la présence des femmes à l'antenne par type de vecteur et heure d'audience, mais aussi sur la diminution des stéréotypes dans leurs programmes".