2018, l'année Anne Charrier. Après avoir crevé l'écran en février dernier dans le téléfilm "Prêtes à tout", la comédienne brille en tête d'affiche de "Maman a tort", la nouvelle mini-série événement de France 2, dans laquelle elle incarne Marianne Aubrais, une flic brute de pomme. Pour ces deux rôles, l'actrice qui monte a respectivement reçu les prix de meilleure interprétation féminine au festival de la fiction de La Rochelle en 2017 et de meilleure actrice à Séries Mania. À l'occasion du lancement de "Maman a tort", puremedias.com s'est entretenu avec Anne Charrier.
Propos recueillis pas Pierre Dezeraud.
puremedias.com : Comment présenteriez-vous Marianne, votre personnage dans "Maman a tort" ?
Anne Charrier : Marianne est une flic d'une quarantaine d'années, plutôt sauvage et assez solitaire. Elle est à la tête du SRPJ du Havre et n'a à peu près que ça dans sa vie. Elle n'est "que" flic en résumé. Sa vie est dénuée de sens au moment où débute la série. C'est une femme qui est accomplie d'un point de vue professionnel mais qui n'a rien à quoi se raccrocher sur le plan personnel.
Qu'est-ce qui vous a plu dans ce rôle ?
Le fait que ce soit un flic, déjà. J'avais très envie de jouer cette partition. Et ce qui est très intéressant, c'est que ce n'est pas une femme qui est dans la séduction. Au contraire, c'est une femme de pouvoir avec un vrai côté clébard. J'avais envie de ce genre de personnage qui ne réponde pas à un archétype déjà connu.
Ça va dans le sens de votre évolution depuis "Maison Close" ?
Non, je ne crois pas qu'il y ait un sens d'évolution ou même une image à casser. En tout cas, je ne me pose pas la question. Ça faisait un petit moment que je pensais à un rôle de ce type. J'avais été hyper séduite par une série comme "Brown Girls" où les personnages féminins étaient hors genre.
Votre personnage est un peu différent de celui du roman de Michel Bussi...
On l'a dessinée comme on la sentait. Moi, je souhaitais vraiment qu'elle ne soit pas maquillée, pas coiffée. C'était une vraie volonté. Je l'aurais même poussée encore plus loin dans le roots. D'ailleurs, c'est volontairement que je n'avais pas lu le roman. Je voulais vraiment pouvoir trahir totalement l'auteur. Je crois, d'après ce que dit Michel, que le personnage est effectivement très différent dans le roman.
"Je ne vois pas comment cette série pourrait revenir"
"Maman a tort" est une série à priori bouclée. En cas de succès, on peut imaginer une saison 2 ?
Non, aucune suite n'est possible ! Pour moi, c'est bouclé. Sauf twist extraordinaire... J'ai du mal à aller travailler s'il n'y a plus de surprise. Là, je ne vois pas du tout comment ils pourraient.
Et faire revenir votre personnage et celui de Pascal Elbé dans un autre contexte vous paraît envisageable ?
Je ne crois pas, j'ai du mal à l'imaginer. Pour faire un duo basique de flics ? Ça existe déjà... Mais, encore une fois, s'ils nous proposaient un scénario de dingue, je pense que Pascal et moi, nous dirions oui. J'ai quand même du mal à l'imaginer.
Après avoir été récompensée à La Rochelle en septembre dernier pour "Prêtes à tout", vous voilà titrée à Séries Mania pour ce rôle. Deux récompenses en une saison pour deux rôles différents, c'est une sacrée reconnaissance, non ?
Je ne suis pas du tout dans la course au prix mais c'est une très jolie surprise. Même si je ne travaille pas du tout dans cette optique, je vous confirme que je ne boude pas mon plaisir.
"Je ne suis pas mariée à France 2"
Ça vient surtout couronner le fait que vous êtes l'une des comédiennes qui monte en télévision ou, à minima, sur France 2.
J'ai une grosse méfiance pour cela. Je suis une "comédienne qui monte" depuis des années et finalement, je suis toujours à la même place. Je n'ai aucune ambition dans ce sens-là. Je sais que les places sont volatiles. La confiance de France 2 m'honore et me fait plaisir. Après, nous ne sommes pas mariés !
Vous pourriez jouer dans une fiction de TF1 ?
Totalement ! Si la fiction est bonne et qu'elle m'intéresse, bien sûr. Je fonctionne au projet. Certaines chaînes se disent que certains acteurs sont maqués avec des chaînes alors que ce n'est pas le cas du point de vue du comédien !
Et devenir comédienne d'une fiction récurrente comme Marine Delterme ("Alice Nevers") ou Cécile Bois ("Candice Renoir"), ça pourrait vous tenter ?
Peut-être... Mais la difficulté, c'est de se renouveler. C'est un peu dur de répondre comme ça. En soi, oui mais si c'est pour remettre le même costume sans renouvellement des enjeux, non. Après, je ne regarde pas les séries que vous citez même si j'apprécie les deux comédiennes.
"Je ne sais pas pourquoi France 2 arrête 'Marjorie'"
En mars dernier, vous avez annoncé l'arrêt de "Marjorie", la série dans laquelle vous interprétez une psychologue. Les audiences étaient correctes. Pourquoi France 2 l'arrête-t-elle ?
Je ne sais pas, probablement pour une raison interne à la chaîne. Avec l'équipe, nous nous étions dit que nous ne ferions pas cette série pendant dix ans. Aujourd'hui, nous sommes d'autant moins en deuil que France 2 nous a offert la possibilité de clôturer la série. C'est une chance de pouvoir conclure une histoire, ce n'est pas pareil que d'être sanctionné par l'audimat. Voilà, ça s'arrête mais il n'y a aucune rancoeur. Ça a été une aventure très heureuse. France 2 a d'ailleurs encore deux épisodes à diffuser.
Vous êtes une consommatrice de fiction française ?
Oui, je prends énormément de plaisir à regarder "Engrenages", c'est hyper tenu. J'ai aussi beaucoup aimé "Zone Blanche". Je trouve qu'on développe une écriture de plus en plus intéressante.
Et comment jugez-vous la place des femmes dans ces fictions ?
C'est une question qui m'importe notamment pour mes collègues noires. Je pense au mouvement "Noire n'est pas mon métier". C'est grotesque cette situation. Je m'intéresse aussi au mouvement autour des femmes de 50 ans qui disparaissent des fictions télévisées. Là encore, c'est grotesque alors qu'il y a tout un champ à explorer autour des femmes d'un certain âge. On progresse lentement sur ces questions-là mais il y a encore beaucoup à faire... Il faut être en vigilance permanente.