L'inéluctable est arrivé. Comme le rapporte "The Hollywood Reporter", Netflix s'apprête à perdre les droits de "Friends" à partir de 2020 aux Etats-Unis. La plateforme américaine a confirmé la nouvelle dans un tweet, faisant au passage un clin d'oeil subtil aux fans de la série. Elle a ainsi commencé par écrire dans son message : "The One Where We Have To Say Goodbye" ("Celui où on doit dire au revoir") - une référence aux titres des épisodes de "Friends" qui débutent systématiquement par "The One" ("Celui").
Netflix a ensuite ajouté : "Nous sommes navrés de voir 'Friends' rejoindre le service de streaming de la Warner au début de l'année 2020 (aux États-Unis). Merci pour les souvenirs, les gars".
La perte de "Friends" par Netflix est en effet la conséquence directe de la mise sur pied de la plateforme SVOD de Warner baptisée HBO Max, du nom de sa puissante chaîne à péage. Pour chiper "Friends" à son rival, la filiale du câblo-opérateur américain AT&T aurait ainsi mis sur la table près de 425 millions de dollars sur cinq ans (85 millions par an) alors qu'elle a pourtant produite la série via ses propres studios dans les années 1990. Il faut dire qu'en 2018, Netflix n'avait pas hésité à casser sa tirelire - entre 80 et 100 millions de dollars selon les estimation - pour s'offrir pour un an supplémentaire les 236 épisodes de "Friends".
Concernant le sort de la série en France, rien n'est encore sûr. Les droits étant négociés différemment et l'arrivée de HBO Max dans l'Hexagone n'étant pas encore annoncée, il est possible que "Friends" reste disponible sur Netflix dans nos contrées. L'antenne française de Netflix n'a en tout cas pas communiqué sur le sujet pour l'heure.
"Friends" ne sera pas le seul produit d'appel de la future HBO Max, dont le lancement est attendu au printemps 2020 aux Etats-Unis. Comme le rapporte la presse américaine, le service de SVOD de Warner devrait proposer à son lancement près de 10.000 heures de programmes, dont ceux de HBO, de la Warner et de la CW. Parmi eux, "Game of Thrones" et "Les Soprano" bien sûr (vidéo de promotion ci-dessous), mais aussi l'intégral du "Prince de Bel-Air", autre sitcom culte des années 1990, ou encore "Pretty Little Liars". Afin de densifier son offre, HBO Max a aussi mis en production plusieurs séries originales, notamment "Dune: The Sisterhood", adaptée du livre "Dune", ou "Gremlins", déclinaison télévisée des films du même nom.
La perte des droits de "Friends" est un nouvel effet concret de "la guerre des plateformes" qui point depuis plusieurs mois. Alors que Netflix domine outrageusement le marché de la SVOD, la firme de Reed Hastings va devoir faire face à de nouveaux concurrents, et non des moindres. Outre Hulu et Amazon Prime Video, ses deux rivaux actuels, elle devra ainsi affronter Disney, qui lancera sa propre plateforme, Disney+ dès la fin de l'année, tandis que Warner et NBCUniversal feront de même à partir de 2020.
Afin de maximiser ses chances de victoire, chacun a d'ailleurs déjà commencé à rapatrier ses contenus chez soi. C'est ainsi que Disney a pris soin de faire annuler ces derniers mois toutes les séries de sa filiale Marvel proposées sur Netflix, et que NBCUniversal a déboursé 500 millions de dollars (100 millions par année) pour récupérer "The Office" à partir de 2021. Cette fiction était le contenu le plus consommé sur Netflix aux Etats-Unis.
Netflix a anticipé cette situation de longue date en investissant massivement dans la production de ses propres contenus. En 2018, la plateforme a ainsi dépensé pas moins de 8 milliards de dollars à cet effet. En 2019, cet effort d'investissement devrait être encore plus soutenu, de l'ordre de 15 milliards de dollars selon certains analystes cités par la presse américaine. Pour palier la défection des séries phare de son catalogue et constituer ses propres titres cultes, la plateforme a cassé sa tirelire pour s'offrir l'exclusivité des services de deux des créateurs de séries les plus puissants de la télé américaine : Shonda Rhimes ("Grey's Anatomy", "Scandal"), dont les équipes planchent sur huit projets pour Netflix, et Ryan Murphy ("Glee", "Amarican Horror Story"). La "guerre des plateformes" ne fait que commencer.