En matière de création française, en-dehors de la fiction, point de salut ? C'est la question que s'est posée La Fabrique des formats, un réseau de professionnels du secteur audiovisuel, à travers une étude qui vient d'être rendue publique sur la place de la France dans la création et le développement de formats. Il en ressort que nous sommes surtout un pays importateur, principalement tourné vers le Royaume-Uni, qui a fourni 33% de nos adaptations en access et en prime time en 2018. Le peloton de tête de ce concert des nations est complété par l'Allemagne et les Etats-Unis (17% chacun). Et seulement deux formats made in France figurent dans le top 100 des formats qui voyagent à l'international : "Fort Boyard" et "Vendredi tout est permis".
La mise à l'antenne de nouveaux formats français, hors fiction, est ainsi peu fréquente ; le flux étant encore considéré chez nous comme le parent pauvre de la création. "Il y a une vraie différenciation entre flux et fiction en France, à la différence de plusieurs pays étrangers, dont tous les genres peuvent bénéficier d'aides ou de crédits d'impôt. Ici, il n'y a pas de coups de pouce du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée, ndlr) pour les premiers", explique Fiona Bélier, secrétaire générale de La Fabrique des formats, interrogée par "Les Echos". L'étude recommande d'ailleurs de mettre fin à cette dichotomie entre flux (jeux, divertissements) et stock (fictions, documentaires) qui n'a plus de sens dans un secteur en plein bouleversement.
Même si elle reste modeste, la création française a été marquée par un "intérêt plus fort qu'avant" selon l'étude, entre janvier 2018 et mars 2019 : sur les 32 nouveaux formats de flux diffusés sur les chaînes françaises, 20 sont des créations et 12 des adaptations comme "Big Bounce" sur TF1 ou "Together" sur M6. 65% des lancements ont eu lieu en prime time, case stratégique s'il en est, tandis que la période estivale a permis aux chaînes de tester de nouveaux programmes en limitant la casse, compte tenu du faible enjeu d'audience et publicitaire à cette période-là de l'année.
A noter que la moitié des formats de création française, soit 10 nouveautés, a été diffusée par le groupe TF1, que ce soit sur la chaîne principale ou sur TFX. Elles ont été suivies par M6 avec 20% des créations (4 nouveautés) et France 2 et France 3 avec 15% (3 nouveautés). Mais l'audace n'est pas souvent récompensée. Sur 19 créations françaises étudiées, seules 4 ont été des succès d'audience.
Pour éviter que la dynamique ne retombe, La Fabrique des formats préconise en tout cas une collaboration plus active entre le producteur et le diffuseur dans la création de formats, avec un partage des droits et du financement en amont. Elle insiste aussi sur la nécessité de mieux former aux métiers du format en France, mais aussi d'accompagner davantage la montée en gamme des professionnels français et leur déploiement à l'international.