Renverser la table. Voilà ce qu'est parvenue à faire hier la Ligue de football professionnel (LFP) en attribuant les droits TV de la Ligue 1 pour la période 2020-2024. A cette occasion, puremedias.com se penche sur les gagnants et les perdants de cette opération qui ne devrait pas manquer de bouleverser le paysage audiovisuel français.
La Ligue et les clubs français
A tout seigneur, tout honneur. Le résultat de l'appel d'offres d'hier est avant tout une victoire... pour la Ligue de football professionnel. Visant un prix proche du milliard d'euros par an, la LFP est parvenue à dépasser largement son objectif avec une enveloppe globale de 1,153 milliard d'euros. Le prix annuel bondit ainsi de près de 60% par rapport au tarif actuel, fixé à 726,5 millions d'euros. Ce trésor de guerre sera redistribué pendant quatre ans aux clubs de la Ligue 1, eux aussi grands gagnants de l'opération.
MédiaPro
Si on ignore pour l'instant la somme payée par l'opérateur espagnol, et donc la soutenabilité de son investissement, force est de constater que l'agence espagnole fait une entrée fracassante sur le marché français. En raflant les deux premiers lots, les plus prestigieux, ainsi que le lot n°4, MédiaPro s'impose comme le nouvel acteur incontournable du paysage audiovisuel français. Reste maintenant à savoir si le groupe espagnol a l'intention de revendre une partie des droits de la Ligue 1 à d'autres diffuseurs, comme l'a permis pour la première fois la Ligue lors de cet appel d'offres. Annoncé par la Ligue, le souhait de MédiaPro de lancer une chaîne dédiée à la Ligue 1 en France laisse en tout cas penser que cette décision, si elle était prise, ne serait que partielle.
beIN Sports
Le groupe qatari sauve les meubles en conservant un pied dans la Ligue 1. Actuellement co-diffuseur du championnat avec Canal+, beIN conserve deux matchs par journée, dont un en prime time, le samedi. Plus qualitative, son offre sera cependant moins étoffée que les sept matchs par journée que le groupe diffuse actuellement. Ce résultat renforce ainsi les interrogations sur l'avenir de beIN Sports en France. Privées de la Ligue des champions à partir de septembre prochain et de la majeure partie des matchs de Ligue 1 à partir de 2020, les chaînes qataries auront sans doute du mal à trouver un équilibre économique qu'elles n'ont jusque-là jamais atteint...
Canal+
Le grand perdant de la journée est indéniablement Canal+. Partenaire du championnat français depuis 1984, la chaîne cryptée repart les mains vides de l'appel d'offres lancé par la LFP. A moins qu'elle ne parvienne à racheter des droits aux autres diffuseurs comme elle annonce en avoir l'intention, Canal+ ne devrait donc pas retransmettre un seul match de Ligue 1 pendant quatre ans à partir de 2020. Il s'agissait pourtant de son produit d'appel historique pour recruter des abonnés... La filiale du groupe Vivendi est ainsi à un tournant de son histoire et ne pourra sans doute pas faire l'économie d'une révolution de son modèle pour espérer survivre. "Perdre des droits est surmontable, mettre en danger l'entreprise en les surpayant, non", prévenait Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal+ il y a quelques jours. Ce dernier prédisait qu'en cas de perte de la Ligue 1, son entreprise aurait deux ans et demi pour se transformer en HBO, la chaîne américaine à péage concentrée uniquement sur le cinéma et les séries. Le défi s'annonce de taille.
SFR
Moins atteint que Canal+, le groupe dirigé par Alain Weill a cependant brillé par son absence hier. Après avoir acquis à prix d'or la Premier League et la Ligue des champions, SFR a préféré cette fois passer son tour, faute de moyens suffisants. Le dévissage en bourse à l'automne dernier d'Altice, sa maison mère, tout comme les interrogations autour de la viabilité économique de sa stratégie de convergence, ont sans doute pesé dans cette décision. La question est maintenant de savoir si les seuls droits de la Ligue des champions, de la Ligue Europa et du championnat anglais suffiront à porter ses chaînes sportives.
Le fan de foot ?
Qu'il devrait être coûteux pour l'amateur de ballon rond de voir l'ensemble des matchs joués par les clubs du championnat de France à partir de 2020 ! Pour suivre intégralement la Ligue 1, le téléspectateur devra ainsi s'abonner à la chaîne que compte lancer MédiaPro en France, mais aussi à beIN Sports. En cas de revente partielle des droits à une autre chaîne payante, il lui faudra alors prendre un troisième abonnement. Vu les montants faramineux mis désormais sur la table par les opérateurs, le téléspectateur peut légitimement craindre une forte inflation des prix d'abonnements aux retransmissions de ses matchs de foot. Au risque de le détourner de son sport préféré ?