Le premier "off" du président de la République. Pour la première fois de son mandat, Emmanuel Macron a reçu hier des journalistes pour une conversation libre dans son bureau. Durant ces échanges, il est notamment revenu sur la couverture médiatique des Gilets jaunes et le rôle de l'ensemble des médias, de la presse écrite aux chaînes d'information, en passant par les réseaux sociaux.
Présent parmi les journalistes conviés, Emmanuel Berretta, journaliste au "Point", a publié ce vendredi certains propos du chef de l'Etat. Evoquant le cas d'Eric Drouet, Emmanuel Macron estime qu'il "est un produit médiatique" et "des réseaux sociaux". Selon lui, "l'envers du décor de cette crise a été très peu montré" et les médias ont très peu parlé des "différentes strates de Gilets jaunes", de "la déconstruction de ce qu'est le mouvement" et de "ses influences extérieures". "Il y a une forme aussi de légitimation accélérée de ce qu'a été ce mouvement qui est un problème", glisse-t-il.
Pour le président de la République, "l'éditorialisation de la vie politique a changé" à partir d'avril ou mai 2018 : "Les quotidiens, quels qu'ils soient, ne font plus l'actualité. Ils suivent les chaînes d'information en continu qui, de plus en plus, suivent les réseaux sociaux. Or, vous pouvez manipuler les débats". Il estime qu'il y a "quelqu'un qui est à la frontière technologique de cette transformation", c'est le président américain Donald Trump. "C'est une question que l'on doit se poser. Ca veut dire que le zapping est permanent, qu'il n'y a plus rien de fixe", déclare Emmanuel Macron. Et d'ajouter : "Cela veut dire que l'une des fonctions qu'ont les journalistes qui est justement de hiérarchiser ce qui, dans l'information, est accessoire et ce qui est important ou a du sens, a été abandonnée."
"Ce qui est en train de fixer ça dans la vie politique, c'est le nombre de vues (sur internet, ndlr) et les manipulations qui vont avec le nombre de vues. On l'a bien vu sur Facebook : plus j'ai d'amis, plus j'ai de capacité de diffusion, plus je suis relayé", poursuit Emmanuel Macron. Il explique que "dans l'affaire Benalla comme Gilets jaunes", "la fachosphère, la gauchosphère, la russosphère représentent 90% des mouvements sur internet". "De plus en plus, des chaînes d'information disent 'ceci est important, ceci est légitime' parce qu'il y a du mouvement sur internet", critique le locataire de l'Elysée, ajoutant : "Ce mouvement est fabriqué par des groupes qui manipulent, et deux jours après, ça devient un sujet dans la presse quotidienne nationale et dans les hebdos."
En croisade depuis sa campagne présidentielle contre certains médias russes, Emmanuel Macron assure que les Gilets jaunes "radicalisés" ont été "conseillés" par l'étranger. "Les gens qui sont surinvestis sur les réseaux sont les deux extrêmes. Et après, ce sont des gens qui achètent des comptes, qui trollent. C'est Russia Today, 'Spoutnik', etc. Regardez, à partir de décembre, les mouvements sur internet, ce n'est plus BFM qui est en tête, c'est Russia Today", a estimé le chef de l'Etat.