Il brise le silence. Le 30 juin dernier, le contrat de Gilles Favard avec la chaîne L'Equipe a pris fin. Depuis 2014, il était l'une des figures phare de "L'équipe du soir", présenté par Olivier Ménard. Personnage clivant et controversé de l'émission, l'homme d'affaires avait été suspendu d'antenne plusieurs fois après des propos polémiques tenus dans l'émission.
Durant l'été 2016, le consultant originaire de Gironde avait été écarté trois mois pour avoir comparé le joueur Hiroki Sakai à un "vendeur de sushis". Lors de l'Euro de football en 2021, il avait été suspendu un mois pour avoir "prédit que les Belges allaient vite rentrer chez eux manger des frites". La direction l'avait également mis à l'écart durant quatre mois à la suite d'une violente altercation hors antenne avec Yoann Riou en 2017.
S'il avait regretté son altercation avec Yoann Riou et s'était défendu de tout racisme lors d'un documentaire pour la 3.000e de "L'Equipe du soir" en février dernier, Gilles Favard avait considéré d'une "injustice sans nom" d'avoir été suspendu pour ces propos sur l'équipe de Belgique. S'il était très peu réapparu à l'antenne après, les téléspectateurs l'avaient retrouvé dans "Touche pas à mon poste" sur C8 où il s'était illustré lors de virulents échanges avec Gilles Verdez.
Auprès de puremedias.com, Gilles Favard a accepté d'évoquer la fin de sa collaboration avec la chaîne L'Equipe.
Propos recueillis par Florian Guadalupe.
"Le courant ne passait plus entre certaines personnes au sein de la chaîne"
puremedias.com : Votre contrat n'a pas été reconduit par la chaîne L'Equipe. Etait-ce une surprise pour vous ?
Gilles Favard : Non. Par rapport à ce qu'il se passait depuis un an, je sentais que le courant ne passait plus entre certaines personnes au sein de la chaîne. J'ai rencontré la direction. Selon elle, je n'étais pas "dans l'institution".
Qu'est-ce que "l'institution" ?
Je voudrais bien le comprendre et qu'on me l'explique. Pour moi, l'institution, c'est le journal. Quand le journal écrit des conneries, on aimerait que je dise que ces conneries sont bien. Ce n'est pas dans mes gènes.
Est-ce que votre éviction est la conséquence de vos suspensions répétées ?
Non. Je n'ai pas l'impression. Je n'ose le croire.
S'est-il passé autre chose que ces suspensions pour que la chaîne ne veuille plus collaborer avec vous ?
Non. Jamais. Mais je l'ai senti, c'était un peu intuitif. La dernière suspension (liée aux propos sur l'équipe de Belgique, ndlr) est complètement inique. On m'a dit que c'était du racisme que de dire que les Belges mangeaient des frites. Posez la question à 100 personnes, vous aurez la réponse.
"Peut-être ont-ils fait la 3.000e de 'L'Equipe du soir' pour mieux me tuer"
Si la chaîne L'Equipe estime que votre comportement n'est pas adéquat, n'est-ce pas logique de ne pas vous reconduire ?
Je pense surtout que le groupe L'Equipe est dirigé par des gens qui sont lisses. Ils veulent des gens lisses. Est-ce qu'ils auront raison ou est-ce qu'ils auront tort ? L'avenir nous le dira.
Si ce n'est pas lié aux suspensions, ni à un comportement en interne, pourquoi n'ont-ils plus voulu de vous ?
Je vais vous dire. C'est lié à un tweet ironique où j'ai écrit "Bonne question" à un article d'un journaliste (du quotidien "L'Equipe, ndlr) qui vantait les mérites de Gérard Lopez (actionnaire des Girondins de Bordeaux, ndlr) fin mars. On voit aujourd'hui où sont les Girondins. Alors, qui avait raison ? Pas besoin de se poser la question.
La non-reconduction de votre contrat n'a-t-elle pas de lien avec vos propos tenus dans le doc sur la 3.000e de "L'Equipe du soir" en février dernier ? Vous disiez alors avoir été victime d'une "injustice sans nom" de la part de la direction.
Possible. Peut-être ont-ils fait la 3.000e pour mieux me tuer. Je ne l'ai pas vu arriver. Ils ont bien joué le coup.
Vous tuer ?
Oui. Je considère que la 3.000e devait être une émission drôle. J'avais pris ce documentaire comme un truc amusant. C'est devenu une arme contre moi.
"A l'antenne, je ne regrette rien"
Concernant la suspension liée à l'altercation avec Yoann Riou, avez-vous essayé d'en parler avec lui après ?
Non, jamais. La direction de l'époque - Arnaud de Courcelles - a essayé de faire le premier pas pour une discussion, mais Yoann Riou a toujours refusé.
Est-ce que vous regrettez certains propos ?
A l'antenne, je ne regrette rien. Hors antenne, le seul propos que je peux regretter, c'est ce que j'ai dit à Yoann Riou.
Après l'annonce de votre non-reconduction, quelle a été la réaction au sein de "L'Equipe du soir" ?
J'ai gardé tous mes potes. Je déjeune et dîne avec eux. Ils m'appellent régulièrement. Ce n'est pas pour autant que j'ai fermé mon robinet d'infos à certains de mes amis.
Vous avez travaillé sur la chaîne durant près de 8 ans. Avez-vous aujourd'hui de la rancoeur ?
Je n'ai pas de rancoeur. Pour moi, il y a des gens qui sont à des niveaux de direction qui sont, pour moi, pas au niveau. C'est le jugement de Gilles Favard.
Comment ça "pas au niveau" ?
Ils ont un poste qui ne correspond pas au niveau qui est le leur.
Avez-vous désormais tiré un trait sur la chaîne L'Equipe ?
Pour l'instant, oui. Sauf changement de direction.
Avec Olivier Ménard ?
Olivier Ménard, il me demande de faire les pieds au mur, je le fais pour lui. Olivier Ménard est un homme extraordinaire. C'est une personne pour qui j'ai une profonde affection.
"J'ai reçu une proposition pour rejoindre 'TPMP'"
Vous êtes intervenu à plusieurs reprises en cette fin de saison dans "Touche pas à mon poste" sur C8. Accepteriez-vous de rejoindre l'équipe de chroniqueurs à la rentrée ?
J'ai reçu une proposition. J'y réfléchis.
Dans vos quelques passages dans l'émission, vous vous êtes écharpé avec Gilles Verdez. Êtes-vous prêt à vous donner en spectacle ?
C'est la question que je me pose. Quand je vois ce que fait Gilles Verdez, ce n'est pas très brillant. Je n'ai pas envie de devenir comme lui.
Le groupe Canal+ s'est renforcé dans le domaine du football avec l'acquisition de l'ensemble des droits des Coupes d'Europe de football à partir de 2024. Pourriez-vous vous rejoindre la chaîne cryptée en tant que consultant ?
Des gens m'ont contacté de droite et de gauche. J'ai eu des contacts. Mais moi, je suis un débatteur. Je ne suis pas un commentateur.
Vous préféreriez une radio comme RMC ?
Je pense que RMC a de très bons chroniqueurs et débatteurs. S'ils avaient besoin de moi, ils m'en feraient part. Mais je pense que leur grille est pleine. Elle est d'ailleurs très bonne.
Avez-vous encore des ambitions dans les médias ?
Je n'ai pas d'ambitions particulières. Moi, j'ai envie de m'amuser. La vie est faite pour s'éclater. J'ai eu 1.000 vies. Si je peux joindre l'utile à l'agréable, je peux le faire.
"Pour réaliser une bonne émission, il faut des gens qui n'ont pas peur et qui connaissent la matière"
Les formats des émissions de sport ont-ils trop évolué, selon vous ?
Je pense qu'elles deviennent de plus en plus en lisses. Pour réaliser une bonne émission, il faut des gens qui n'ont pas peur et qui connaissent la matière. Est-ce qu'il y a toujours autant de personnes qui connaissent l'univers du sport de l'intérieur ? Je ne le pense pas. Les gens qui connaissent cet univers vieillissent. Je ne vais pas vous les nommer. Certains ont eu des soucis... D'autres soucis qu'être chroniqueur... Ils ont été débarqués des antennes. Pour décider de qui est bon et qui est mauvais, ce sont les téléspectateurs qui décident. Ce n'est pas à moi de juger.
Enfin, en 2016, dans "L'Equipe du soir", vous aviez annoncé avec aplomb que Cristiano Ronaldo avait confié à Laurent Blanc qu'il le rejoindrait au Paris Saint-Germain. Cette séquence est devenue un "meme" sur les réseaux sociaux. Les internautes vous le ressortent souvent sur Twitter. Qu'a vraiment dit le joueur portugais au coach français ?
Très franchement, il ne lui a pas dit d'aller se faire foutre ! La vérité, c'est que c'est un pari que j'ai pris avec quelqu'un pour prononcer le nom de quelqu'un. Pour gagner ce pari, il fallait que je trouve la parade. Donc, je l'ai trouvé au dernier moment avec ça. C'était une blague. Il y a des gens qui l'ont pris au premier degré. Vous savez, il y a beaucoup de blagues à l'intérieur des émissions. Il faut les décrypter et les connaître.