"Tout est pardonné". Le 14 janvier dernier, sept jours après l'attentat qui avait coûté la vie à 10 membres de la rédaction de "Charlie Hebdo", le journal satirique faisait son retour dans les kiosques avec ce "numéro des survivants", tiré à plus de huit millions d'exemplaires. Une édition dont la Une, signée Luz, montrait le prophète Mahomet tenant une pancarte et annonçant que tout était pardonné, la larme à l'oeil.
"J'ai fait ce dessin à la dernière minute. Je suis restré prostré des heures à convoquer ceux que les autres auraient pu faire. J'en ai pondu des dizaines pour arriver à cette dernière goutte", explique aujourd'hui le dessinateur dans un entretien accordé aux Inrocks, en pleine promo de son album de dessins baptisé "Catharsis", sorti cette semaine. "Ca m'a fait pleurer comme une madeleine. Dessiner Mahomet n'avait rien à voir avec la revanche, la Une devait avoir un lien direct avec la raison de ce drame et c'est pour ce dessin que les copains sont morts", poursuit Luz.
Trois mois et demi après le drame et après cette Une, le dessinateur évoque dans cet entretien la situation du journal, les tensions internes et son indignation face aux propos de Philippe Val, ancien patron de "Charlie Hebdo", qui affirmait que les terroristes avaient "gagné". Pourtant, Luz annonce qu'il ne prendra plus le crayon pour caricaturer le prophète. Pas par peur des représailles, précise malgré tout le dessinateur. Juste par lassitude. "Je ne dessinerai plus le personnage de Mahomet, il ne m'intéresse plus", assure Luz. "Je m'en suis lassé, tout comme celui de Sarkozy. Je ne vais pas passer ma vie à les dessiner", conclut-il.