Chaque vendredi, retrouvez "Médias le mag, l'interview", en partenariat avec France 5. Julien Bellver, co-rédacteur en chef de puremedias.com et chroniqueur dans "Médias le mag" le dimanche à 12h35 interrogera une personnalité des médias toutes les semaines. Pour ce nouveau numéro, Julien Bellver reçoit Anne-Elisabeth Lemoine, chroniqueuse dans "C à vous" sur France 5 et joker d'Anne-Sophie Lapix.
Quand vous voyez ce qui se passe à Canal+, vous vous dites que vous avez bien fait de partir il y a un an ?
Je me dis que j'ai quitté Canal+ pour de bonnes raisons, pas nécessairement au bon moment. On me faisait une belle proposition sur France 5, qui est une chaîne que j'apprécie, dans une émission qui fonctionne hyper bien et dans laquelle je m'épanouis.
Mais vous n'êtes pas soulagée d'être partie ?
Franchement, si j'avais pu imaginer ce qui se passe aujourd'hui, j'aurais vendu mes visions au PAF ! Mais je n'avais aucune idée de ce qui allait se passer.
Le Canal+ que vous avez connu pendant 7 ans, il est mort avec l'arrivée de Vincent Bolloré ?
Là, franchement, je ne crois pas qu'il soit mort. Je n'en sais rien du tout ! Je n'ai jamais vraiment su ce que c'était, l'esprit Canal, je n'ai jamais su vraiment le définir. En tous cas, il y a une vraie mutation, c'est sûr, qui s'opère sous nos yeux.
Dans "C à vous", vous êtes aussi le joker officiel d'Anne-Sophie Lapix. Vous prenez les commandes de l'émission la semaine prochaine. Vous étiez déjà joker d'Ali Baddou et de Bruce Toussaint sur Canal+. Vous n'en n'avez pas marre de jouer les numéros 2 ?
J'entendais Raymond Poulidor récemment à la radio, qui disait qu'il était toujours numéro 2 et qu'il était très content de l'être. C'est pas mal d'être le Raymond Poulidor de la télé !
Etre numéro un, vous en avez envie quand même ?
Oui, et on me l'a proposé. Mais j'ai toujours raisonné en me disant "Est-ce que tu préfères être numéro un d'un projet qui ne te correspond pas, auquel tu ne crois pas et qui ne va peut-être pas marcher, ou être numéro 2 d'une émission en laquelle tu crois ?". Le calcul est vite fait.
Votre propre émission sur France 5, c'est possible ? Vous en discutez avec la chaîne ?
Oui, il y a des discussions qui ont été entamées, avec France 5 mais aussi avec d'autres chaînes du groupe France Télévisions.
Sur quel type de projets ? On avait parlé d'un "C à vous" du samedi...
Ce qui est dans les tuyaux, c'est un magazine, c'est sûr, mais peut-être pas dans la forme à laquelle vous pensez. Pas forcément un talk show. En tous cas, on a des projets sur lesquels on discute et on travaille. Donc c'est hyper valorisant.
On a sélectionné une image médias cette semaine pour vous. Evelyne Thomas fait son come back, à 51 ans avec "C'est mon choix" sur Chérie 25. Elle a beaucoup ramé avant ça. On a une date de péremption quand on est une femme à la télévision ?
Cette question est compliquée. Je pense qu'il n'y a pas de date de péremption mais je pense que c'est plus difficile pour une femme de vieillir à la télévision que pour un homme. De la même façon qu'on fait plus attention à la façon dont une femme est habillée ou coiffée que sur un homme. C'est très injuste, mais c'est la réalité.
Ca dépend des dirigeants des chaînes ? Il y a une femme désormais à la tête de France Télévisions, ça peut faire bouger les choses ?
Je suis sûr que ça va faire changer les choses. D'ailleurs, c'est son intention. Elle pense qu'il n'y a pas assez de femmes à la télévision, elle l'a dit, donc je pense qu'elle peut impulser des changements.
Le Canal que vous avez connu était misogyne ou pas ?
Je ne sais pas s'il était misogyne mais pendant longtemps, il n'y a pas eu de femmes qui animaient des émissions en clair ! Ca a changé, ça fait partie des mutations, dans le bon sens. J'étais très heureuse de voir qu'on confiait "Le Grand Journal" à une femme, l'émission du midi à une femme, l'émission média du week-end à une femme, Daphné Roulier qui est aux commandes de "L'Effet papillon". Du coup, c'est un homme qui récupère "Le Supplément", il faut bien qu'ils existent quelque part !
Vincent Bolloré est peut-être moins misogyne que ne l'était Rodolphe Belmer à l'époque ?
Je ne peux pas dire que Rodolphe Belmer était misogyne, en tous cas je n'en ai jamais souffert. Mais pendant longtemps, ce sont les hommes qui ont eu les clés de la maison.
On vous a vue pendant deux numéros du "Grand Journal" où vous étiez chroniqueuse, puis vous avez disparu de l'antenne... Qu'est-ce qui s'est passé ?
A l'époque, au "Grand Journal", ils cherchaient la formule, ils cherchaient à constituer une bande et le producteur éditorial de l'émission, qui s'appelle Fabrice Pierrot, a pensé à moi. On a fait un test, qui n'a pas été concluant. C'est aussi simple que ça.
C'était vous qui n'étiez pas satisfaite ou la chaîne ?
Je n'étais pas très à l'aise et ça voulait dire déshabiller le midi pour habiller le soir. Est-ce que c'était vraiment indispensable ? Est-ce que j'étais la solution miracle ? En l'occurrence, non, ce n'est pas juste un élément qui peut changer les choses.
Si Maïtena Biraben est aujourd'hui autant critiquée, c'est aussi parce que c'est une femme ?
Je ne crois pas, non. Je pense que c'est parce qu'elle était hyper attendue. C'était évident que la rentrée de Canal serait scrutée. Il y a un vrai bashing qui ne met pas très à l'aise. Ca me rappelle ce qu'a subi Sophia Aram dans d'autres proportions sur France 2. C'était un bashing qui devenait insupportable. Moi, je ne veux surtout pas y participer, je ne connais pas particulièrement Maïtena Biraben mais les équipes de Flab, je les connais, j'ai travaillé avec elles pendant sept ans. Ce sont les mêmes reporters, les mêmes programmateurs, les mêmes journalistes qui y travaillent aujourd'hui. Je n'ai pas du tout envie de leur souhaiter quoi que ce soit de mal. Une émission, ça met toujours du temps à s'installer. C'était difficile de démarrer dans ces conditions, avec une nouvelle direction, avec tout ce qui a été dit sur Vincent Bolloré, donc n'en rajoutons pas.
France 5 a gagné la bataille des audiences face au "Grand Journal" mais aussi celle de la programmation. La semaine prochaine, "C à vous" reçoit Daniel Craig. Anne-Sophie Lapix revient de ses vacances pour l'occasion. Vous allez quand même pouvoir lui poser des questions ?
Bien sûr, je suis là ! L'idée, c'était que toute l'équipe soit présente. On ne reçoit pas une star internationale toutes les cinq minutes, James Bond, ça a un impact. Il a choisi un JT, un talk - "C à vous". Donc il s'agissait que tout le monde soit là.
La complicité de l'équipe en plateau, elle est réelle ou surjouée ?
J'ai une qualité, qui ressemble à un défaut, c'est que j'ai du mal à faire semblant, à jouer la comédie. Quand je suis un peu vexée, ça se voit...
Ca arrive parfois avec Matthieu Noël, d'ailleurs...
Oui, forcément, il appuie là où ça fait mal, il vous explique ce qui ne va pas. Il le fait sans méchanceté, mais parfois on peut être un petit peu touché. Mais on rigole beaucoup hors antenne, particulièrement avec Anne-Sophie et Pierre. Ce n'est pas feint, et j'aurais du mal à feindre quoi que ce soit.