Interview
Nathalie Iannetta : "J'aborde cette Coupe du monde avec beaucoup d'humilité et un peu d'angoisse"
Publié le 11 juin 2018 à 16:10
Par Florian Guadalupe | Journaliste
Passionné de sport, de politique et des nouveaux médias, Florian Guadalupe est journaliste pour Puremédias depuis octobre 2015. Ses goûts pour le petit écran sont très divers, de "Quelle époque" à "L'heure des pros", en passant par "C ce soir", "Koh-Lanta", "L'équipe du soir" et "La France a un incroyable talent".
A l'occasion de la Coupe du monde de football en Russie, l'intervenante de TF1 s'est confiée auprès de puremedias.com.
Nathalie Iannetta Nathalie Iannetta© CHRISTOPHE CHEVALIN-TF1
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puremedias.com au rythme de Moscou. A l'occasion de la Coupe du monde de football en Russie du 14 juin au 15 juillet, les personnalités de l'univers du ballon rond se confient pendant un mois pour parler du mythique tournoi de football et de leurs actualités à la télévision ou à la radio. Ainsi, Nathalie Iannetta, présentatrice du groupe TF1 pour la Coupe du monde et ancienne conseillère de François Hollande, a répondu à notre sollicitation.

Propos recueillis par Florian Guadalupe. Entretien réalisé le 8 juin.

Partie Coupe du monde

puremedias.com : Quel est votre meilleur souvenir d'une Coupe du monde ?
Nathalie Iannetta : Malgré tout, c'est la match France/Brésil de 2006. Parce que c'est le match parfait de Zinédine Zidane. Jamais plus on ne verra un match de cette qualité. Pour moi, c'est le match le plus abouti. On le regarde, on dirait une danseuse. C'est artistique.

"Je suis rentrée chez moi avec une espèce de sentiment mêlé d'incompréhension, de colère et de honte" Nathalie Iannetta

Quel est le plus mauvais souvenir ?
C'est la journée de Knysna. Je suis à l'antenne de Canal+ toute la journée. J'ai le souvenir d'être rentrée chez moi, au bout de huit heures d'antenne, avec une espèce de sentiment mêlé d'incompréhension, de colère et de honte.

Quel joueur a marqué ce début de siècle ?
Je pense que c'est Zidane pour l'Euro 2000, pour la Coupe du monde 2006 et pour, d'une certaine manière, la Coupe du monde 2002. On a senti à quel point il manque. Il est l'un des rares à avoir traversé une période assez longue.

Qui sera la surprise pour cette Coupe du monde en Russie ?
Je crains que ce soit le Pérou. On les a vu jouer. On a vu comment ils ont été accrocheurs. On connait assez mal la qualité de leur jeu. Mais quand on connait la mentalité péruvienne, on se dit que les mecs ne vont pas venir faire du tourisme. Par ailleurs, je mets une petite pièce sur le Maroc. Ils peuvent bien figurer. Il va y avoir un facteur psychologique qu'on ne peut pas complètement mettre de côté. L'attribution de la Coupe du monde 2026 aura eu lieu la veille de la compétition à Moscou. Soit ils remportent l'organisation et ça les porte, soit ils perdent l'organisation et ça les porte aussi, par vengeance et par colère.

Les Bleus peuvent-ils aller jusqu'au bout ?
Ils le peuvent. Sur le papier, c'est possible avec cet entraîneur, avec ce staff, avec ces joueurs. Ce n'est pas incompatible avec un beau parcours.

Partie Médias
"Je n'ai qu'une trouille, c'est de les décevoir" Nathalie Iannetta

Comment abordez-vous cette Coupe du monde sur le groupe TF1 ?
Avec beaucoup d'humilité et un peu d'angoisse aussi. Ca fait quatre ans que je n'ai pas fait ça. Ce n'est pas ma maison même si vraiment, j'ai été accueillie de manière admirable par les personnes de TF1 et de LCI. J'arrive sur la pointe des pieds, en me disant : "Mon dieu, pourvu que tout ça se passe bien". Moi, je n'ai pas d'enjeu personnel sur la Coupe du monde. C'est une parenthèse que j'ouvre et que je vais refermer le 15 juillet. Mais c'est un tel cadeau de pouvoir revivre de l'intérieur une compétition comme celle-là. Je n'ai qu'une trouille, c'est de les décevoir.

Quel sera votre rôle dans ce dispositif ?
J'ai un double rôle. Sur TF1, je vais faire partie de la bande des consultants autour de Denis Brogniart. On me demande d'avoir un certain regard, aux côtés des spécialistes du football et des consultants, Ludovic Giuly, Pascal Dupraz, Christophe Jallet. Avec mon expérience à Canal+ et après Canal+, à l'Elysée et à l'UEFA, je vais essayer de donner aux téléspectateurs des clés pour comprendre l'organisation de la compétition. Je vais donner le contexte en Russie, l'histoire de certaines fédérations et par exemple la relation de certaines fédérations entre elles.

Vous serez également sur LCI.
Je ne serai pas dans le rôle du consultant. Je serai dans le rôle du numéro 1. Ce sera ce que j'ai fait pendant 20 ans. Je vais avoir la chance d'être entourée de personnes d'horizons très différents. Ce sera sur la dernière heure de la journée. Il n'y aura plus de matchs. La promesse est d'inviter pendant 45 minutes chez nous les téléspectateurs pour revoir les moments forts de la journée, pour analyser les événements d'un point de vue du football et de la politique et pour se projeter sur les rencontres du lendemain.

"Si TF1 n'avait pas eu les images, j'aurais dit non" Nathalie Iannetta

Pourquoi avez-vous accepté de rejoindre le groupe TF1 ?
Je l'ai fait pour deux raisons. Je dis toujours oui à des gens. En l'occurrence, là, ce sont François Pellissier, Gilles Pélisson et Thierry Thuillier qui m'ont fait cette proposition. J'avais envie de dire oui pour eux et pour les images. S'ils ne les avaient pas eues, j'aurais dit non. Pour le coup, j'ai eu la chance de travailler pour une chaîne où la star était le produit, les joueurs. Là, le groupe TF1 est le seul à tout avoir. Il y a beIN Sports aussi, mais c'est TF1 qui m'a fait cette proposition. J'ai dit oui à des hommes et à cet événement unique qui est la Coupe du monde en images.

Comment remet-on le pied à l'étrier quatre ans après avoir quitté le monde de la télévision ?
Je n'en sais rien. On verra jeudi soir quand je vais arriver sur le plateau. J'espère que ça va bien se passer. Tout le monde me dit : "Tu sais, c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas". Donc, j'espère que ça ne s'oublie pas.

Vous êtes une ancienne figure de Canal+. Comment avez-vous réagi après l'échec du groupe lors de l'appel d'offres de la Ligue 1 ?
Je n'ai pas réagi parce que ça fait quatre ans que j'ai quitté cette chaîne. Ca fait quatre ans que l'histoire a changé, la leur et la mienne. Après, ce sont des sentiments personnels. Je n'ai pas pour habitude de livrer mes sentiments personnels. Ce que j'ai ressenti, ça n'intéresse personne. En revanche, je n'ai pas à commenter la stratégie d'une chaîne qui n'est plus la mienne depuis quatre ans. Je n'ai pas grand chose à en dire.

Les grandes affiches de Ligue 1 représentent tout de même l'un des points forts de Canal+.
Il y avait plein de choses qui étaient des points forts de la chaîne et qui ont changé. Les émissions en clair, c'étaient des points forts. La création, c'est le point fort. Le football avec la Ligue 1 et la Ligue des champions en particulier, c'étaient des points forts. Ca ne vous a pas échappé que depuis quatre ans, tout ça a changé. Je pense que c'est la fin d'une époque. Ca ne veut pas dire que la nouvelle époque qui s'ouvre sera moins bien pour eux. Je n'en sais rien. En tout cas, c'est la fin d'une époque et c'est la fin de notre époque.

"L'Etat est une machine à la fois formidable et infernale" Nathalie Iannetta

Après avoir quitté Canal+, vous avez rejoint l'Elysée. N'avez-vous pas le sentiment d'avoir franchi le Rubicon ?
Non, c'était prévu que je n'allais pas faire marche arrière. Je ne suis pas partie à l'Elysée en me disant à un moment donné que j'allais revenir. Je suis partie parce que j'avais envie de changer de métier. Je ne voulais plus faire ce métier de journaliste, dans le contexte qui est le vôtre aujourd'hui. Il n'y a pas de jugement de valeur dans ce que je dis. Moi, je ne me reconnaissais pas dans cette manière-là de travailler à Canal et partout. Ce n'est pas le sujet de Canal en particulier. J'y étais encore très bien. J'avais encore cette chance. Mais je voyais bien que le métier était en train de changer. Je n'avais pas fait ce métier pour ça. Je suis partie parce que j'avais estimé, moi, ne plus être adaptée au système médiatique comme il était en train de se mettre en place. Par ailleurs, il se trouve que j'ai eu une proposition professionnelle unique que j'ai acceptée.

Qu'avez-vous appris de cette expérience à l'Elysée ?
J'ai appris que chaque milieu à ses codes, son vocabulaire, ses règles. J'y ai appris que ce n'est pas si simple quand on est dedans, parce que l'Etat est une machine à la fois formidable et infernale. J'y ai appris la violence d'un monde dont je n'ignorais rien, tout le monde sait que le monde politique est violent. Mais franchement, à ce point-là, c'est quand même spectaculaire. Moi, je n'ai jamais été une politique ou une militante d'aucun parti, j'ai toujours été libre. Ca m'a confortée dans l'idée que ce monde-là n'est pas le mien.

Êtes-vous satisfaite du bilan de François Hollande dans le domaine du sport ?
Plutôt, en fait ! Pour plusieurs raisons. Grâce à la loi sur le statut des sportifs de haut niveau, ils ont désormais un statut qui les protège davantage. J'ai toujours considéré qu'un pays ne va pas bien quand des champions olympiques, des jeunes athlètes galèrent parfois à avoir 100 euros par mois alors qu'ils font la fierté du pays. Je suis plutôt satisfaite de l'organisation stricto sensu de ce grand événement qu'a été l'Euro 2016, dans un contexte particulier. Quand je suis arrivée, j'étais là pour organiser une fête populaire. Je me suis retrouvée à organiser un événement sécuritaire. On s'adapte, on apprend. Et enfin, je suis satisfaite de la candidature olympique qu'on a réussi à faire évaluer, atterrir, porter puis gagner.

Avez-vous fait une croix définitivement à la télévision ?
J'ai monté une agence de communication et de stratégie avec notamment Gaspard Gantzer. La Coupe du monde sur TF1 sera une parenthèse de ma vie qui s'est définitivement éloignée du monde des médias. J'ai fait une croix en 2014 à la télévision. C'est limite un peu égoïste d'avoir accepté juste un mois de revenir à la télé pour me faire plaisir et pour, je l'espère, vivre un événement qui sera réussi.

Début 2018, vous avez rejoint Gaspard Gantzer dans l'agence 2017 en tant qu'associée. Quelle sera votre mission au sein de cette société ?
Nous, on est une agence de communication et de stratégie à l'adresse des dirigeants d'entreprise. On les accompagne dans ce qu'on considère être un monde - je ne vais pas dire un nouveau monde parce que ça va être connoté - en mutation profonde où il est difficile aujourd'hui de communiquer, de faire passer des messages, d'être entendu. Les canaux de diffusion sont aujourd'hui plus nombreux qu'avant. C'est beaucoup plus difficile de communiquer. Les dirigeants eux-mêmes changent, rajeunissent, se renouvellent. Il faut les mettre en adéquation dans le monde qui est le leur et dans lequel ils évoluent. Ensuite, on a chacun notre spécificité. Moi, je continue d'être ce que j'ai été quand j'étais journaliste depuis 20 ans ou à l'Elysée. Je prends un sujet donné et j'essaie de trouver le bon angle pour raconter la bonne histoire, en essayant de construire des personnages, des émotions, des projets pour transformer ou accompagner des stratégies d'entreprise. Je m'intéresse notamment au monde du sport, au nouveau financement du monde sportif, dans un éco-sportif en pleine mutation et dans la responsabilité sociale des entreprises sur lequel le sport et l'économie sociale et solidaire ont un impact très fort.

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