Les temps sont difficiles pour la liberté sur Internet. Après l'annonce de son intention de bloquer les messages selon les législations des pays jeudi 26 janvier, le site de micro-blogging américain Twitter est accusé de se plier à la censure par de nombreux internautes. Cette nouvelle politique suscite également l'inquiétude chez les associations défendant la liberté d'expression, puisque le réseau social avait notamment été salué pour son rôle lors des révolutions arabes.
L'ONG Reporters sans frontières a ainsi adressé une lettre ouverte au président de Twitter, Jack Dorsey : "Nous vous demandons de revenir sur cette décision nocive à la liberté d'expression et qui s'inscrit à contre-courant des mouvements de dénonciation de la censure associés au printemps arabe, dans lequel Twitter a servi de caisse de résonance" a déclaré son président Olivier Basille. RSF, qui s'avoue "très préoccupée par cette décision", s'interroge : "(...) Allez-vous bloquer les messages liés aux revendications de la minorité kurde en Turquie ? Les internautes russes verront-ils leurs critiques du pouvoir en place modérées ?" Pour sa défense, Twitter explique que cette politique s'applique a des pays respectant la liberté d'expression, et cite la France ainsi que l'Allemagne, interdisant "les messages pro-nazi".
Le site précise également au passage que les messages seront bloqués par pays et non dans le monde entier, comme c'était alors le cas : "Nous essaierons de contacter l'internaute, et nous indiquerons clairement quand le message a été bloqué", a expliqué le président de Twitter, qui signalera tout message supprimé, sur le site ChillingEffects.org.
Selon Olivier Ertscheid, spécialiste de l'internet et maître de conférences à Nantes cité par l'AFP, les motivations de cette annonce seraient clairement économiques : "Google, Yahoo! et Microsoft font aussi du filtrage sélectif dans certains pays et Twitter ne fait donc que s'aligner pour pouvoir s'installer sur certains marchés comme la Chine". Sur la toile, certains ont également souligné que cette annonce intervenait quelques semaines seulement après que le saoudien Al-Walid ben Talal a investi 300 millions de dollars au sein du site, l'Arabie Saoudite excerçant un contrôle strict d'internet.