Avec la fin de "Plus belle la vie", Marseille perd une précieuse "carte de visite", regrette au téléphone Jean-Marc Coppola, adjoint au maire de Marseille en charge de la culture, joint mardi par puremedias.com. Chaque soir depuis le 30 août 2004, entre une enquête du capitaine Léo Castelli, une énième rupture entre Rudy et Ninon, la préparation d'un stratagème machiavélique par Charles Frémont et un éclat de rire de Thomas au comptoir du Mistral, les téléspectateurs de France 3 ont découvert à l'écran - au cours des 4.665 épisodes que compte la série - les plus belles cartes postales de la ville de Marseille : des 18 hectares du parc Borély au palais du Pharo en passant par le parc national des Calanques, le port national ou l'un des emblèmes de la cité phocéenne, la basilique Notre-Dame-de-la-Garde.
Sur place, "les touristes et les visiteurs sont assez curieux de visiter le quartier du Panier (qui a inspiré celui du Mistral, ndlr) pensant y trouver la célèbre place du Mistral", confirme l'adjoint à la culture sans donner une fourchette de visiteurs - difficile à déterminer - "venus grâce à 'Plus belle la vie'". Raison de plus pour laquelle l'élu a insisté auprès de Newen, producteur du feuilleton, pour que les décors puissent être visités jusqu'à la fin de l'année. Tous les créneaux sont complets.
"Les décors ne sont malheureusement pas transposables et celui de la place du Mistral, si emblématique pour la ville de Marseille, sera vouée à la déconstruction", regrette Jean-Marc Coppola. "Malheureusement, une place du Mistral ne pourra jamais être reconstruite ailleurs". Pas même dans un musée dédié à la série à Marseille ? "Je ne veux pas créer d'illusions quant à la construction d'un musée. La ville de Marseille compte déjà 14 musées municipaux très lourds à gérer."
Le "premier souci" de l'équipe municipale est ailleurs. "C'est l'emploi et l'avenir professionnel des milliers d'intermittents du spectacle", assure l"élu. La série emblématique a fait travailler près de 600 personnes chaque année. La Ville espère "garder sur (ses) terres les familles de tous ceux qui se sont installés à Marseille depuis 2004 et qui font vivre la ville au quotidien grâce aux retombées économiques", explique-t-il, dénonçant une nouvelle fois l'arrêt "brutal" de la série par France Télévisions. "On aurait pu imaginer une fin en douceur d'ici un an afin que tout le monde puisse se retourner", déplore-t-il encore.
"Plus belle la vie" représentait, en effet, à elle seule 40% des tournages à Marseille, soit 240 à 260 jours de travail par an. Fort heureusement, les studios de la Belle de Mai ne seront pas déserts ces prochains mois. Sans dévoiler le nom des projets pour lesquels ils serviront de décor, "devoir de réserve" oblige, l'élu marseillais promet que des tournages de longs-métrages pour la télévision, le cinéma et même des plateformes sont en cours ou à venir.
Côté séries télévisées récurrentes, en revanche, Jean-Marc Coppola confirme que Jean-Luc Reichmann continuera à incarner "Léo Mattei" pour TF1 à Marseille, "malgré l'opération séduction tentée par la région Aquitaine". Sur France Télévisions, de nouveaux épisodes de "La stagiaire", qui a posé ses valises dans la cité phocéenne voilà sept ans, et bientôt "Candice Renoir" seront tournés à Marseille et dans sa région.
"'Alex Hugo', 'Simon Coleman', 'Marianne', 'La Peste' ou 'Bistromania' (soit un total de 583 jours de tournage, ndlr) sont autant de séries qui permettront à la filière audiovisuelle marseillaise de continuer à se développer et à faire rayonner Marseille sur tous les écrans de France", écrivait, d'après un document rapporté par l'AFP fin septembre, la présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte. Aussi nombreux soient-ils, les tournages en cours ou en projet "ne compenseront jamais une quotidienne", relève toutefois Jean-Marc Coppola.
L'élu pourra toutefois compter en 2023 sur l'enveloppe annuelle de 35,6 millions d'euros versée par France Télévisions. "Cet investissement conséquent représentera 13% de notre budget dévolu à la fiction française", assurait dans le même document Delphine Ernotte, qui compte "pérenniser cet engagement" après 2023. "Les perspectives semblent donc bonnes pour la suite", glisse l'adjoint, confiant. "Il faut être cohérent avec les annonces faites par le président de la République en septembre 2021", ajoute-t-il.
Il y a plus d'un an maintenant, Emmanuel Macron avait, en effet, indiqué, en déplacement à Marseille, vouloir faire de la cité phocéenne un grand centre de production cinématographique, annonçant la création de "grands studios" et d'un nouveau site pour offrir aux producteurs de films toutes les infrastructures nécessaires aux tournages, l'implantation d'une école "Ciné Fabrique", comme celle de Lyon, et la création d'une antenne marseillaise de la Cinémathèque française.
Quant à "Plus belle la vie", s'offrira-t-elle une seconde vie ? Un collectif de 300 personnes (comédiens, techniciens, auteurs) se refuse à voir la série s'arrêter et s'attèle à la création de "PBLV 2.0", une société coopérative de production (Scop), selon "La Marseillaise", afin de poursuivre la série qui serait diffusée sur une plateforme numérique payante ou gratuite avec publicité.
"Nous sommes en pourparlers avec Newen Studios, le producteur de la série, qui a les droits de la marque et, jusqu'à 2025, l'ensemble des baux du Pôle Média", explique le collectif à "20 Minutes". "Nous avons bâti notre projet sur essentiellement des tournages en extérieur, avec l'envie de davantage travailler dans Marseille, avec une image plus moderne", poursuit la porte-parole, Florence Demay. Cette dernière formule à Newen le souhait de conserver le décor de la place du Mistral.
"Nous soutenons ce projet que l'on juge crédible et sommes prêts à aider le collectif dans sa quête de financement auprès de la région PACA comme du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée, ndlr). Des emplois sont en jeu !", conclut Jean-Marc Coppola.