La nouvelle force tranquille de BFMTV, c'est lui. Bruce Toussaint a quitté la matinale de franceinfo et la présentation de "C dans l'air" le week-end sur France 5 à la fin de la saison dernière pour rejoindre la chaîne d'information en continu en cette rentrée. Dès ce lundi soir, le journaliste prend la suite de Jean-Baptiste Boursier aux commandes de "Grand Angle", l'émission de décryptage de la chaîne. Il officiera également tous les dimanches soirs à 18h à la tête de "Et en même temps", pendant le congé maternité d'Apolline de Malherbe. puremedias.com a pu s'entretenir vendredi avec Bruce Toussaint, quelques jours avant son baptême du feu.
Propos recueillis par Christophe Gazzano.L'annonce de votre arrivée sur BFM TV a été une des surprises du mercato télé. Avez-vous saisi une opportunité de dernière minute ?
Cela ne s'est pas fait à la dernière minute. C'est une réflexion que je menais depuis un certain temps puisque Hervé Béroud (patron de BFMTV, ndlr) et Céline Pigalle (directrice de la rédaction de la chaîne, ndlr) m'ont sollicité assez tôt dans la saison. J'ai d'ailleurs été heureux et flatté que ça se passe tôt, ça voulait sans doute dire que j'étais un choix réfléchi et pas un choix de circonstance, de mercato (rires). Honnêtement, ça s'est fait assez vite parce que j'étais conquis et convaincu par la proposition. Pour tout dire, cela faisait un petit moment que je pensais à BFM. J'étais très attentif à la progression de la chaîne, j'ai été concurrent à i-Télé pendant trois ans où j'ai suivi ça de très près, et ça s'est fait assez naturellement et simplement.
Y a-t-il eu discussion autour de votre case horaire ?
Non, on a discuté directement du 22h/minuit. C'était vraiment le deal de départ et ça tombait très bien parce que je sais que c'est un des primes de BFM, une case très suivie. Jean-Baptiste Boursier en a fait un succès avec ses équipes. Cela m'intéressait aussi parce que c'est une case que je n'ai jamais eu l'occasion d'animer.
Avez-vous pu échanger avec Jean-Baptiste Boursier autour de l'émission ?
Pas tellement. Il a eu la gentillesse de m'envoyer un petit mot. On ne se connaît pas très bien en fait, mais je regardais souvent le début de sa tranche puisque j'allais me coucher après pour faire la matinale.
Vous avez eu une expérience éphémère de ce créneau horaire sur France 2 en 2012 avec votre émission hebdomadaire de seconde partie de soirée "Vous trouvez ça normal ?", qui a été supprimée après quatre mois d'antenne...
Bien vu. C'est marrant parce que j'ai un peu tendance à l'occulter. On pourrait appeler ça un déni si j'étais chez un psy (rires). C'est un peu normal parce que ce n'est pas un très bon souvenir. C'est un souvenir douloureux parce que ce n'était pas facile à faire ; je pense que je n'étais pas tout à fait prêt. J'avais la chance d'avoir un super producteur, Pierre-Antoine Capton, qui a tout fait pour maintenir l'émission, mais malheureusement on a été emportés par l'audience qui n'était pas au rendez-vous. Même si on faisait un million de téléspectateurs, ce qui aujourd'hui peut être très honorable... Ça s'est terminé brutalement. Moi qui ne m'énerve jamais, qui ne suis pas un homme de clashs, là j'étais très en colère contre la décision de la chaîne.
"'Grand Angle' gardera son identité"
A quoi va ressembler le "Grand Angle" version Bruce Toussaint sur BFMTV ?
C'est une tranche qui marche très bien, donc l'idée est de garder la même philosophie, c'est-à-dire de faire du décryptage. On est dans un moment où peut raconter tout ce qui s'est passé dans la journée, approfondir. On traite de trois à quatre sujets maximum sur deux heures avec des invités, des consultants de BFMTV, des journalistes, mais aussi et surtout avec des formats de reportages plus longs. On a tous les soirs un reportage de 8 minutes, mais aussi de 5 et de 3 minutes. On prend donc le temps de se poser. C'est quelque chose qui me rapproche un peu de ce que j'ai pu faire à "C dans l'air", où on prenait une heure pour un sujet, ce qui est vraiment un luxe, mais j'ai envie de garder cette idée de décryptage long. C'est vraiment la marque de fabrique de "Grand Angle", qui aura un nouveau générique, mais gardera son identité.
Avez-vous déjà une idée du contenu du premier numéro diffusé ce lundi ?
On sait déjà que lundi sera une journée émouvante puisqu'une marche blanche est organisée en hommage à Maëlys, un an après sa disparition. Un reportage de 8 minutes sera consacré à cette affaire et à tout ce qui s'est passé depuis un an. Ce sera un des thèmes de cette émission. Le reste va se décider ce week-end et lundi.
Allez-vous introduire de nouveaux visages dans "Grand Angle" ?
Non, mais on ne s'interdit pas d'y réfléchir, un jour ou l'autre. C'est aussi la chance d'être une chaîne d'information, c'est qu'on est moins dans les codes de la télévision généraliste avec une rentrée en septembre ou en janvier. Sur une chaîne comme BFM, on peut faire des changements à tout moment.
Il y a quand même le risque de basculer en breaking news au cours de votre émission en cas d'événement majeur...
Bien sûr. Je ne m'inquiète pas pour ça, je sais que ça va m'arriver. Cela arrive souvent d'ailleurs. Je ne dis pas que c'est facile, loin de là, mais c'est pour vivre ces moments-là que je viens à BFM, pour ce goût de l'événement, de l'actualité forte... BFMTV est une position idéale pour cela.
Avez-vous des objectifs d'audience ?
On ne m'a pas parlé d'audience, ça ne fait pas partie de mes objectifs contractuels. Je vous laisse poser la question à mes patrons mais moi, je me fixe comme objectif, même si on n'en a pas parlé, de maintenir "Grand Angle" au niveau où il est actuellement. Il faut que ça continue à être un succès et une émission de référence. On se donne les moyens pour que ce soit le cas.
Pour combien de temps vous êtes-vous engagé avec BFMTV ?
Pour la vie (rires) ! J'ai la chance d'être en CDI.
Vous serez à l'antenne du lundi au jeudi, mais vous reviendrez aussi chaque dimanche à 18h pour remplacer Apolline de Malherbe pendant son congé maternité dans "Et en même temps".
Oui, avec deux invités : un à 18h et un autre à 19h. La particularité de cette émission, c'est qu'on commente toute l'actualité avec un invité, mais qu'on est moins sur des profils d'invités politiques. On est plutôt sur des profils d'artistes, d'intellectuels, pourquoi pas de sportifs. C'est ce qui me plaît beaucoup. La première aura lieu le 2 septembre. Je serai accompagné de Laurent Neumann et de Nicolas Domenach, qui seront en plateau pour questionner également les invités.
"BFMTV est une machine de guerre"
Comment se passe votre intégration au sein de BFM TV pour le moment ?
Je n'ai pas encore vu Jean-Jacques (Bourdin, ndlr) que je connais un petit peu. J'ai vu Ruth Elkrief, qui m'a accueilli très chaleureusement, tout comme Alain Marschall. Cela fait une semaine que je suis dans la rédaction et je suis frappé par la sympathie qui m'est exprimée, ça fait toujours plaisir. Et je suis aussi frappé de voir à quel point ce que je pensais se confirme, c'est-à-dire que BFMTV est une machine de guerre. C'est une rédaction en mouvement perpétuel, un endroit où on traque l'info et où on est ultra-réactifs. Je le savais en tant que téléspectateur, je le savais en tant que concurrent, mais le voir de l'intérieur, c'est impressionnant.
Est-ce-que le terrain ne vous manque pas ?
Je n'ai jamais été vraiment reporter, malgré quelques expériences il y a très longtemps. Quand j'étais sur Europe 1, on a fait beaucoup de délocalisations de matinales en extérieur : à Kaboul en Afghanistan, à New York pour les élections américaines... Ce sont des moments formidables parce qu'ils sont plus rares pour moi dans mon parcours. Mais après tout, peut-être qu'ici j'aurai l'occasion de faire des "Grand Angle" sur les lieux d'événements. Ça se produira peut-être, je le souhaite en tout cas.
"Je crois que Laurent Guimier sait ce dont Europe 1 a besoin"
En parlant d'Europe 1, dont vous avez présenté la matinale entre 2011 et 2013, que vous inspirent les propos d'Yves Calvi qui a affirmé vendredi dans le quotidien "Sud Ouest" que la station "n'est pas dirigée" ?
Aujourd'hui, Europe 1 est dirigée par des gens que je connais vraiment très bien, que j'estime et pour qui j'ai même de l'amitié. Je pense à Laurent Guimier (vice-PDG d'Europe 1, ndlr), à Guy Birenbaum (conseiller du vice-PDG)... Je sais ce qu'ils vivent, je sais que c'est très dur et qu'ils ont devant eux une sorte d'Everest à gravir, une "remontada" historique, donc on doit tous être humbles face à ces moments délicats parce qu'un jour ou l'autre – je l'ai vécu – ça peut vous arriver de vous retrouver comme ça dans une situation extrêmement difficile. Je crois qu'ils vont dans la bonne direction. Laurent Guimier connaît vraiment très bien Europe 1, il y a passé beaucoup de temps, c'est sa maison. Je crois qu'il sait ce dont Europe a besoin. Les choix qu'il a fait jusqu'ici me paraissent vraiment très judicieux. Des choix populaires, intelligents avec Nikos Aliagas, Laurence Boccolini ou Wendy Bouchard. C'est malin. Je pense qu'Europe 1 est une grande radio populaire.
Vous restez auditeur de la station ?
Je reste auditeur, mais comme je suis très corporate, j'écoute aussi beaucoup RMC (rires) ! Je suis un grand fan de foot. J'ai toujours eu de bonnes relations avec Jean-Jacques Bourdin. Quand j'ai été viré d'Europe 1, peu de gens ont pris la parole pour me soutenir, ça fait partie du jeu, c'est normal, mais lui l'a fait. A l'époque, il avait estimé publiquement qu'on aurait dû me laisser ma chance. Je ne l'ai jamais oublié parce que je peux vous dire qu'il n'y avait pas beaucoup de gens qui disaient ça dans Paris. Ça m'avait frappé et ça m'avait vachement touché - parce que ce sont des moments où on est un peu fragile, il faut bien le dire... - et rien que pour ça, mais aussi pour le parcours qui est le sien, j'ai vraiment un immense respect pour Jean-Jacques Bourdin.
Dans le cadre de la complémentarité entre les antennes du groupe NextRadioTV, pourra-t-on vous voir également sur Numéro 23 ou RMC Découverte ?
Ce n'est pas du tout prévu. J'ai déjà suffisamment de choses avec BFMTV, d'autant qu'à la demande d'Hervé Béroud, je serai également aux commandes des soirées de débats autour des longs formats. Il y a en a déjà eu trois avec l'affaire Fillon, Emmanuel Macron et Johnny Hallyday. Un quatrième est en préparation. Chaque film a fait plus d'un million de téléspectateurs, ce qui est formidable.