Le grand oral. La présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte, était auditionnée ce mercredi par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale. À l'approche de l'ouverture des discussions autour de la trajectoire pluriannuelle de financement du groupe public, la présidente estime avoir donné les gages suffisants au législateur pour avoir les coudées franches.
Dans son propos liminaire, Delphine Ernotte a rappelé que l'ensemble des priorités éditoriales de France Télévisions, fixées par le plan stratégique de 2018, ont été respectées "en intégralité". Et ce, "dans un contexte budgétaire extrêmement contraint". "Sur la période", a-t-elle affirmé, "nos crédits ont diminué de 190 millions d'euros et en prenant en compte l'inflation, qui n'est pas neutre, et le déploiement sur le numérique, l'effort total représente 400 millions d'euros".
Pour compenser, des "projets structurants", tels que la fusion des rédactions, la fusion des chaînes avec désormais une direction des antennes et des programmes unique, ont été menés, permettant "des gains de productivité", a-t-elle expliqué. La baisse des effectifs - "- 1.500 équivalent temps plein (ETP) sur une base de départ de 10.000 ETP" - a aussi permis de faire des économies. Résultat : "France Télévisions coûte aujourd'hui pour la collectivité 560 millions d'euros de moins qu'il y a dix ans", a commenté Delphine Ernotte, pour qui la coupe est pleine.
"Je plaide pour que les discussions (à venir, ndlr) prennent en compte ces efforts étant donné les missions qui sont les nôtres. On ne peut pas continuer à baisser les effectifs et le budget, soyons clair", a-t-elle affirmé face aux députés, estimant, "très inconfortable" le fait "de ne pas connaître son budget à deux ans des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024", un événement dont France Télévisions est le diffuseur officiel.
Et Delphine Ernotte d'enfoncer le clou dans un deuxième temps. La présidente du groupe public "doit trouver 45 millions d'euros" pour boucler le budget 2023. En effet, la hausse de la dotation publique actuellement prévue au projet de loi de finances, de 23,7 millions d'euros (+1%) à 2,431 milliards d'euros, "ne couvre pas tout", a-t-elle ajouté. "Vous dire là tout de suite où je vais les trouver, je n'en sais rien. Mais ce qui est sûr, c'est que je vais les trouver sur les programmes. Je ne vois pas où je vais les trouver ailleurs, et c'est un peu un crève-coeur", s'est-elle désolée sans préciser le nom des programmes qui pourraient être impactés par la mesure. "On arrive à un étiage, on ne peut plus faire des économies", a poursuivi Delphine Ernotte, avant de prédire un "exercice 2023 extrêmement compliqué".
Sur le plan éditorial, il sera consacré à "la transformation de l'information avec la régionalisation des JT" de France 3 et à la préparation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.
Interrogée enfin sur le mode de financement de l'audiovisuel public, après la suppression de la contribution audiovisuelle (redevance), Delphine Ernotte a plaidé en faveur d'un dispositif qui "ne soit pas aléatoire, n'ait pas de régulation infra-annuelle" et donne "une assurance suffisante sur les années qui viennent". Et égratigné l'option de la budgétisation, qui semblerait tenir la corde pour remplacer à l'horizon 2025 le financement via une part de la TVA.
"La part de TVA versus la budgétisation, c'est beaucoup mieux, déjà. La budgétisation pure et simple, c'est ce qu'ont voulu les pays qui ont voulu privatiser, comme une partie de cette assemblée le souhaite (avec un geste en direction de la députée RN, Caroline Parmentier, ndlr), l'audiovisuel public. Ça a très bien fonctionné. Ils ont budgétisé, ils ont coupé par deux les budgets, les services publics sont exsangues", a-t-elle conclu.