Une nouvelle aventure. A partir de lundi, Eric Brunet sera aux commandes d'une nouvelle émission sur LCI de 10h à 12h. L'essayiste fera ses premiers pas sur la chaîne du groupe TF1 après avoir collaboré pendant plusieurs années avec le groupe NextRadioTV, que ce soit sur la chaîne BFMTV ou à l'antenne de RMC. Afin d'évoquer sa rentrée télévisuelle, Eric Brunet s'est entretenu avec puremedias.com.
Propos recueillis par Florian Guadalupe.
puremedias.com : Quelle sera l'émission que vous présenterez à partir de lundi sur LCI ?
Eric Brunet : Elle s'appellera "Brunet Direct". Ce sera tous les jours de 10h à midi sur LCI. C'est une révolution ! Je vais faire ce que je sais faire. Je vais monter des débats sur des sujets qui me passionnent, avec des experts, des politiques, des responsables syndicaux et des personnalités de la société civile. Je vais aussi convier des téléspectateurs. Mon souhaite est d'avoir des téléspectateurs par Skype qui débattent sur les sujets que je souhaite, avec mes invités et moi-même - vous me connaissez, je prends part au débat. Je rêvais de le faire. Je n'avais pas réussi à le faire dans mon ancienne maison. Ca fait deux ans que j'en discutais avec LCI. La chaîne m'a dit qu'elle voulait tout mettre en oeuvre pour que ce soit possible de le faire chez elle, et elle l'a fait.
"Ce serait formidable que les gens qui me suivent depuis des années aient la curiosité de venir jeter un coup d'oeil à mon émission."
Aurez-vous des chroniqueurs dans votre émission ?
La réponse est non ! Il n'y aura jamais de chroniqueurs. Ce rôle de débatteur sera tenu par les téléspectateurs qui appelleront. J'ai déjà pu observer à la télévision que les gens qui appellent, les auditeurs à la radio ou les téléspectateurs à la télé, sont des alibis. On l'a notamment vu au moment du Covid-19. Des gens racontaient leurs symptômes, puis des experts prenaient la parole. Moi, je ne veux pas ça ! Dans cette nouvelle émission, j'aimerais faire intervenir des témoins de l'actualité. Par exemple, un médecin généraliste au fin fond de l'Auvergne. Il me dira : "Je n'ai pas eu de cas de Covid depuis trois semaines, mais là, pour la première fois, j'en ai eu trois". Ce sont des gens qui participent à l'information. Ils nous donnent des infos précieuses. Les témoins sont dépositaires d'informations très importantes pour notre boulot. Ils vont permettre de faire de meilleures émissions.
A qui va s'adresser cette émission ?
Je ne vise pas un public en particulier. J'avais un million de fidèles à la radio sur RMC. Ce serait formidable que les gens qui me suivent depuis des années aient la curiosité de venir jeter un coup d'oeil à mon émission. Je suis un enfant de la radio. J'ai tissé des amitiés avec beaucoup d'auditeurs. J'ai tellement envie de reproduire ça sur LCI. Je veux que cette petite communauté me suive. Je veux parler à ces gens qui sont des Français, de toutes les générations, de la vie réelle, passionnés de politique et d'information. Ce qui est bluffant, c'est qu'ils sont souvent plus experts et plus pointus que les soi-disant experts.
"Je ne me sens pas du tout être un 'Pascal Praud' bis."
Avez-vous eu la garantie de garder une totale liberté de ton sur LCI ?
Oui. Ça a été ma grande surprise. Si je n'avais pas eu cette garantie, j'aurais peut-être hésité à me rendre sur LCI. J'ai eu beaucoup d'échanges avec Fabien Namias. Il m'a dit : "Tu es une personnalité avec des aspérités, originale, singulière. C'est ça que nous venons chercher chez toi. Ta liberté te sera garantie". Oui, je suis convaincu qu'ils sont eux-mêmes attachés à ça. Ils savent que s'ils s'amusent à m'imposer des thèmes à traiter, ce sera moins bon. Ce type d'émission se fonde sur un principe de liberté.
Vous avez en effet un ton très libre à l'antenne. Vous a-t-on recruté pour être le Pascal Praud de LCI ?
Non. Je ne regarde pas les émissions de Pascal Praud. Je ne suis pas du tout dans son registre. J'étais là bien avant lui. J'avais les engagements que l'on connaît, les passions que l'on connaît bien avant que Pascal Praud n'arrive sur CNews. Puis, quand j'ai écrit mon premier livre sur le fait que tous les journalistes étaient de gauche, en 2004, lui, il faisait du football ! Je n'ai aucun complexe avec lui, d'autant plus qu'on a grandi ensemble. On a vécu à Nantes, lui et moi. On se connaît bien. Je lui dis toute mon amitié. Mais je ne me sens pas du tout être un "Pascal Praud" bis. Je suis quelqu'un qui est très attaché au public. Mon truc, c'est la proximité. C'est la seule chose que je revendique. J'aime instaurer un langage et une relation particulière avec les téléspectateurs.
"La censure n'est pas si présente que ça dans nos médias"
Votre émission s'appellera donc "Brunet Direct". Est-ce un clin d'oeil à Jean-Jacques Bourdin et "Bourdin Direct" sur RMC ?
Non, non. J'y ai pensé après. Brunet, c'est mon nom. Direct, c'est le terme le plus utilisé depuis le début de l'histoire de la télévision. Oui, ce n'est pas très original. Mais le mot "Direct" sera encore utilisé pendant des années et des années, dans toutes les chaînes infos. Donc, non, ce n'est pas du tout un clin d'oeil à Jean-Jacques. Même s'il y a plein de formules de Jean-Jacques que j'apprécie. Quand il dit "l'homme libre", moi, je me sens libre. Quand j'étais à RMC et aujourd'hui à LCI, je n'ai jamais subi aucune pression de personne. On ne m'a jamais rien imposé. Ça démontre que la censure n'est pas si présente que ça dans nos médias. Il y a beaucoup d'auto-censure. Beaucoup de journalistes n'écrivent pas ce qu'ils pensent et ne disent pas ce qu'ils pensent. Mais il est très rare que les rédacteurs en chef ou que les patrons décrochent leur téléphone pour faire pression. J'ai bien l'intention de demeurer libre comme l'est le camarade Jean-Jacques.
Votre départ de RMC était assez inattendu. Que s'est-il passé ?
J'ai tissé beaucoup d'amitiés là-bas. Je m'entends avec tout le monde à RMC. C'est une maison très fraternelle. Mais j'avais une souffrance. Je voulais adapter le concept de mon émission à la radio sur BFMTV. Avec la présidentielle qui approche, j'avais envie de bâtir mon projet sur une chaîne d'information. Ça n'a pas été possible sur BFMTV. C'est la raison pour laquelle je me suis rapproché d'une chaîne que j'adore. Pour moi, LCI, c'est beaucoup. Je la regarde quasiment en boucle depuis des années. Le jour où Fabien Namias a été en mesure de me dire : "On peut ensemble construire le projet auquel tu rêves". Ce jour-là, j'ai dit : "On y va". Ça s'est décidé au mois de juillet. Ça a été pour moi douloureux de quitter mes amis de RMC.
"Quand vous vivez en province, ce parisianisme devient un peu agaçant."
La crise sanitaire a-t-elle changé votre manière de travailler ?
Ça a été très particulier. J'ai vécu mon confinement dans le Sud-Ouest pendant deux mois et demi. Et j'ai continué à présenter mon émission de deux heures. Ça a été une expérience très étrange. La peur se mêlait à une forme de bien-être rural. Comme beaucoup de Français en télé-travail, on a beaucoup travaillé. Ce n'était pas de tout repos. Le résultat était bien. Mais c'était très étrange. Je ne sais pas si on revivra ça un jour.
Les chaînes de télévision se sont d'ailleurs adaptées au confinement en faisant intervenir des personnes par Skype. Est-ce ces nouvelles méthodes qui vous ont donné l'idée de "Brunet Direct" ?
Cette idée, je l'avais déjà en tête depuis bien longtemps. Elle n'est pas d'une originalité extraordinaire. Quand j'ai vu ça à la télévision, je me suis dit que c'était énorme. Pourquoi ? Pas parce que LCI sera à même de mettre en place des Skype à l'antenne. Mais parce que je me suis dit que les Français eux-mêmes, mes téléspectateurs, sont en train de se familiariser avec cet outil. Peu importe l'âge, on est devenu familier car il y a eu des réunions hebdomadaires sur Skype ou des apéros en ligne. Quasiment tous les Français savent désormais utiliser cet outil. C'est un facteur de progrès considérable.
Un bon outil pour interroger également les personnalités, comme le professeur Didier Raoult qui refuse de venir à la capitale.
Oui. C'est très souple. Je vais interroger toutes les personnes qui ne peuvent pas se rendre à Paris. Moi, je suis un provincial. Il faut décloisonner tout ça. Il faut aller chercher l'expertise dans nos territoires. Je suis assez hanté par ça. La vidéo va permettre de déconcentrer l'information. Quand vous vivez à Clermont-Ferrand, à Quimper ou ailleurs, ce parisianisme devient un petit peu agaçant.
La ministre du Travail Elisabeth Borne a fait savoir que le port du masque pourrait être obligatoire à l'antenne. Vous verra-t-on avec un masque sur LCI ?
C'est très curieux. Moi, je n'ai pas l'âme d'un rebelle. Si c'est une obligation, je le porterai. Ça me paraît quand même étonnant. Pour les présentateurs d'émission de talk, la distance même élargie me semble préférable au port du masque. A LCI, je porte le masque partout. Dès que je rentre dans le studio, je l'enlève. J'ai personne à moins de deux mètres. Il me semble qu'on peut continuer à travailler sans masque.