Polémique aux Etats-Unis. Le 5 mai à New York, le PEN American Center a prévu de remettre à "Charlie Hebdo" un prix pour "le courage et la liberté d'expression". L'initiative de cette association mondiale d'écrivains passe mal auprès de nombreux auteurs. 145 romanciers, dont les noms ont été publiés sur The Intercept, ont ainsi décidé de boycotter cette remise de prix. Parmi eux, Craig Lucas, Wallace Shawn, Joyce Carol Oates, Eve Ensler ou Francine Prose.
Une vingtaine d'entre-eux ont expliqué leur démarche mercredi 30 avril dans une lettre collectivement signée. Condamnant l'attentat du 7 janvier dernier contre la rédaction de "Charlie Hebdo", ils ont cependant accusé le journal satirique de se moquer avec les caricatures de Mahommet "d'une partie de la population française déjà marginalisée et victimisée". Selon eux, les caricatures de Mahomet par "Charlie Hebdo" "doivent être interprétées comme une volonté délibérée de causer une plus grande humiliation et souffrance" pour une catégorie de la population française qui est "façonnée par un héritage colonial et dont une large partie est musulmane pratiquante".
De son côté, le PEN American Center a précisé que "la récompense n'est pas nécessairement en accord avec le contenu exprimé". "Si nous approuvions la liberté d'expression seulement à ceux avec qui on est d'accord, la notion même de liberté d'expression serait très limitée", a expliqué au Guardian Andrew Solomon, président américain de l'association.
Lors d'une rencontre organisée hier à Washington par l'association Freedom House pour les libertés, le rédacteur en chef de "Charlie Hebdo", Gérard Biard, et le journaliste de l'hebdomadaire Jean-Baptiste Thoret ont réagi à cette polémique. "Je crois qu'il y a un petit malentendu", a affirmé ce dernier, d'après des propos rapportés par l'AFP. "A mon avis, ils pensent que le prix est attribué à 'Charlie Hebdo' pour son contenu", a-t-il ajouté. Avant de préciser : "Il y a confusion, c'est un prix attribué au principe de la liberté d'expression".
"Nous n'avons jamais publié de dessins racistes (...) Historiquement, nous sommes un journal anti-raciste, c'est dans notre ADN" a précisé de son côté Gérard Biard. "Mahomet est un symbole, une icône. A 'Charlie Hebdo', nous sommes contre les icônes, de la même manière que nous sommes contre le foot !", a ajouté le rédacteur en chef du journal satirique.