Des vidéos réalisées en direct et en continu sur les réseaux sociaux : depuis le début du mouvement des Gilets jaunes en novembre, le phénomène n'a cessé de croître. Des médias tel que le pure player "Brut" ou la chaîne russe RT France s'en sont fait une spécialité avec des lives diffusés des heures durant. A ces médias sont venus s'ajouter tous ces citoyens qui désormais systématiquement filment en direct les manifestations auxquelles ils participent.
Une façon de faire qui ne convainc pas la directrice de la rédaction de BFMTV. Dans une interview à paraître ce jeudi dans "Valeurs actuelles", Céline Pigalle est interrogée sur ce phénomène. Ainsi, lorsque le journaliste lui fait remarquer qu'"un média comme 'Brut' s'est attiré la sympathie des Gilets jaunes" et a réalisé de très bonnes audiences en diffusant simplement des images des manifestations épurées de tout commentaire", la responsable ne manque pas de partager son scepticisme.
Si elle ne se prononce pas sur le cas de "Brut" en particulier, elle estime que "de manière générale, prendre une caméra, la laisser tourner et diffuser en direct, cela ne s'appelle pas du journalisme mais de la vidéosurveillance". Pour Céline Pigalle, si chaque citoyen a parfaitement le droit de filmer, elle ne considère pas pour autant qu'il s'agisse de journalisme. La différence ? "Face à des acteurs qui ont chacun des intérêts divers, le journaliste est un observateur qui essaye d'avoir une position la plus honnête et juste possible, et de confronter les points de vue. C'est aussi ce rôle d'intermédiaire qui a été contesté", pointe-t-elle.
La directrice de la rédaction de BFMTV fait cependant son autocritique en constatant que "cette crise a permis de mettre sur le tapis certaines de nos pratiques qui étaient modestement contestées, et qui apparaissent aujourd'hui insupportables". Elle pense notamment au défilement d'images en boucle sur son antenne - "ce n'est plus acceptable" - et aux titres affichés à l'écran, qui vont être retravaillés pour "pour trouver comment avoir plus de caractère tout en présentant les choses de manière nuancée". "Enfin, nous devons mieux faire la différence entre les images diffusées en direct et celles qui sont rediffusées a posteriori, pour ne pas induire le téléspectateur en erreur", conclut-elle.