Combien de gays et lesbiennes dans les allées du pouvoir politique, à la télévision, à la tête des grandes entreprises ? Autant qu'ailleurs, probablement. Mais rares sont les personnalités à avoir fait leur "coming out", c'est-à-dire en révélant leur homosexualité au grand public. A la veille de la Gay Pride parisienne, un collectif de journalistes appelle dans Le Monde les célébrités à "sortir du placard", pour faire avancer la cause. "Mais surtout pour celles et ceux qui, parce qu'ils occupent des postes en vue, ont accès à la parole publique. Qu'ils/elles le veuillent ou non, ils/elles constituent des exemples... mais sont encore bien trop nombreux à rester silencieux" peut-on lire.
Car la communauté gay, lesbienne bi et trans souffre selon ce collectif d'un manque cruel de visibilité. "Puisque nous sommes si nombreux, pourquoi si peu de gays et de lesbiennes connu-e-s parmi les journalistes, les présentatrices et présentateurs de télévision, les actrices et les acteurs, les dirigeantes et les dirigeants d'entreprises privées ou d'institutions publiques, les sportifs, les responsables syndicaux et patronaux, les élu-e-s ?" s'interrogent Lucas Armati, journaliste ; Alix Béranger, consultante ; David Belliard, journaliste ; Alice Coffin, journaliste ; Mathieu Magnaudeix, journaliste et Anne Susset, travailleuse associative.
Sur plus de 900 parlementaires, seuls trois, Frank Riester, Roger Karoutchi (UMP) et Corinne Bouchoux (Europe Ecologie-Les Verts), ont aujourd'hui affiché publiquement leur orientation sexuelle. Les 879 autres seraient-ils tous et toutes hétérosexuel-le-s ? "Evidemment non. La très grande majorité continue de ne rien dire, au nom d'un prétendu droit à l'indifférence. Quand les journalistes leur posent - rarement - la question, ils préfèrent esquiver" note le collectif.
Tous dénoncent une "autocensure" et des "tournures hypocrites" des grands médias lorsque il s'agit d'aborder la vie privée de certaines personnalités publiques. Rappel est fait du cas Richard Descoing, décédé à New York récemment. "Quand le directeur de l'Institut d'études politiques Richard Descoings est mort le 3 avril, son homosexualité a été évoquée avec une extrême prudence comme s'il s'agissait d'une odieuse intrusion dans la vie privée, l'expression d'une insupportable tyrannie de la transparence" note le collectif.
Pour le collectif, "se dire homo, juste le dire, c'est montrer à la société ce que nous sommes réellement, dans notre diversité. C'est aussi offrir aux plus jeunes d'entre nous, aux plus fragiles, à celles et ceux qui vivent dans des milieux pas ou peu tolérants, des points d'accroche pour se construire et avancer." Les journalistes craignent que les prochains débats sur le mariage gay et l'adoption "réveillent la haine et l'homophobie." Un combat qui se ferait plus facile à mener si les "lesbiennes, gays, bi, trans, ayant accès aux médias ou à toute forme de parole publique disent enfin qui "ils sont".