Jean-Luc Mélenchon a fait depuis longtemps de la dénonciation publique des journalistes une marque de fabrique. Les exemples ne manquent pas. Invité hier de "C à vous" sur France 5, il s'en est une nouvelle fois pris à l'un d'entre eux. Sa cible du jour, Christophe Barbier.
Le patron du Front de Gauche était invité à réagir à un petit magnéto décalé dans lequel la production demandait à plusieurs éditorialistes comme Nicolas Demorand, Franz-Olivier Giesbert ou Christophe Barbier de dresser le portrait chinois de l'homme politique. Dans le cadre de cet exercice, le patron de L'Express a ainsi comparé successivement Jean-Luc Mélenchon à "un marteau", "un chien" ou "un fusil mitrailleur". Il a également affirmé que le mot définissant le mieux l'homme politique était "trop" "parce qu'il en fait trop, il en dit trop, il va trop loin, il est trop tout". Invité à réagir à cette séquence par Anne-Sophie Lapix, Jean-Luc Mélenchon a expliqué : "Bah rien, je retrouve des gens que je connais. Les gens ne le savent pas. Ils regardent. Ils se disent : 'c'est des journalistes'. Non, ce ne sont pas des journalistes". Avant de lâcher, en guise d'exemple : "Barbier est un militant politique très proche de l'extrême droite".
"Non, non, non, vous ne pouvez pas dire ça" a immédiatement réagi Patrick Cohen, lui-même ancienne victime de la verve de Jean-Luc Mélenchon. "Si, si, je peux, j'ai le droit quand même" s'est alors offusqué l'homme politique. "Ce n'est pas parce qu'il a dit des choses désagréables dans son journal qu'il faut le diffamer de cette façon" a fait valoir le matinalier de France Inter. "Je ne le diffame pas" s'est défendu Jean-Luc Mélenchon. "Si, c'est de la diffamation". "Bon d'accord, allez, c'est de la diffamation. Vous avez raison, on ne peut rien dire. Donc, ne me posez pas de question" a rétorqué, agacé, le leader du Front de Gauche.
Patrick Cohen a ensuite développé. "Jean-Luc Mélenchon, disqualifier quelqu'un en disant qu'il n'est pas journaliste et que c'est un militant d'extrême droite, c'est de la diffamation. Surtout s'agissant de quelqu'un comme Christophe Barbier". "Bravo, vous avez raison. Je vous donne raison. Vous avez raison. Bravo. On ne peut rien dire" s'est contenté de répéter Jean-Luc Mélenchon. "Vous pouvez le dire" a corrigé son interlocuteur. L'ancien candidat à la présidentielle a alors choisi d'ironiser. "Non, non, non, sans soulever votre sainte colère. Ça me fait de la peine, vous allez mal manger. Vous allez avoir l'estomac aigri". "Acceptez qu'à votre propre colère répondent parfois les colères de journalistes qui vous font face" a répondu le matinalier.
Ne désarmant pas, Jean-Luc Mélenchon a tenu à justifier son violent jugement sur Christophe Barbier. Il a ainsi voulu rappeler que le patron de L'Express s'en était pris à sa personne de manière excessive selon lui lors de la dernière campagne présidentielle. "C'est de la politique, c'est du commentaire" a défendu Patrick Cohen. "Oui, mais alors il ne dit pas qu'il est journaliste, il est militant et proche d'une mouvance politique" a protesté Jean-Luc Mélenchon. "C'est quand même lui qui a inventé la Une de L'Express où on voit des gens avec un voile sur la tête aller aux allocations familiales. Ça, c'est la propagande de l'extrême droite. Enfin, Monsieur Cohen, admettez-le, c'est quand même des choses assez voisines" s'est écrié l'homme politique. Et ce dernier de se défendre de toute insulte, "l'extrême droite, ce n'est pas une injure, c'est une ligne politique".
Contacté par puremedias.com, Christophe Barbier a affirmé qu'il ne donnerait "aucune suite" aux propos de Jean-Luc Mélenchon, se déclarant favorable à un débat public "total" et opposé à sa judiciarisation, particulièrement entre journalistes et responsables politiques. Sur le fond, le patron de L'Express a déploré "l'excès qui confine au délire" du leader du Front de Gauche et a estimé avoir été "très bien défendu" par Patrick Cohen. Déclarant avoir de nombreux points d'accord politiques avec Jean-Luc Mélenchon, Christophe Barbier a cependant déploré son refus de débattre et son boycott des journalistes de L'Express depuis plusieurs mois. Avant de conclure d'une célèbre formule de Talleyrand : "Tout ce qui est excessif est insignifiant".