La tension monte d'un cran à France Télévisions. Hier, les salariés de France 2 ont évoqué lors d'une assemblée générale une possible mise au vote d'une motion de défiance contre la présidente de France Télévisions,Delphine Ernotte. Cette votation pourrait être organisée dans les jours à venir si et seulement si la patronne de l'audiovisuel public ne reçoit pas les représentants de journalistes de France 2 dans les plus brefs délais, et si les pistes d'économies pour l'info de la chaîne ne sont pas amendées.
Depuis la fin de la semaine dernière, l'inquiétude est vive chez les journalistes de France 2 après que la direction de l'information de France Télé a annoncé réfléchir à un changement de programmation des "Jeudis de l'info", la soirée continue réunissant les magazines "Envoyé Spécial" d'Elise Lucet, "Complément d'enquête" de Thomas Sotto, "L'émission politique" de Léa Salamé et "L'angle éco" de François Lenglet. Alors que France Télévisions a été contraint par le gouvernement de réaliser 50 millions d'euros d'économies en 2018, ces magazines emblématiques de la première chaîne publique devraient être amenés à réduire la voilure dans les mois qui viennent.
La direction de l'information de France Télé envisage ainsi de supprimer dès le début de l'année prochaine les magazines d'information le jeudi soir en deuxième partie de soirée, et de proposer "Complément d'enquête" en prime-time. Mécaniquement, cette décision provoquerait une réduction du nombre de numéros du programme de Thomas Sotto, ainsi que de celui d'Elise Lucet, actuellement programmés trois fois par mois, en première et en deuxième partie de soirée. Selon le nouveau schéma, ces derniers seraient programmés en alternance en prime time avec "L'émission politique" une fois par mois (comme aujourd'hui) mais aussi avec "L'angle éco" de François Lenglet. Selon les journalistes de France 2, ce changement de programmation des "Jeudis de l'info" se traduirait aussi par la suppression de nombreux postes en CDD au sein des rédactions des magazines.
Invité mercredi 22 novembre de France Inter, Yannick Letranchant a confirmé que ces changements de programmation étaient une des pistes actuellement à l'étude. "Tout se regarde. A ce jour, aucune décision n'est prise. On est encore dans la réflexion", avait déclaré le directeur de l'information de France Télévisions au micro de Sonia Devillers. "Ce n'est pas exclu car aucun périmètre, aucune direction, aucune émission n'échappe au regard des économies qu'on peut faire", avait-il ajouté.
Dans un mail envoyé à ses équipes hier soir - dont puremedias.com a pris connaissance - Yannick Letranchant rappelle que son service doit "prendre (sa) part aux efforts de l'entreprise". "Je m'attache à contribuer à ce plan d'économies de manière la plus équitable possible pour les équipes (JT et magazines), et la plus pertinente pour les téléspectateurs", écrit-il. Rappelant une nouvelle fois qu'aucune décision n'est prise à ce stade, le patron de l'info de FTV précise qu'à "aucun moment", il n'a été envisagé de "porter atteinte aux marques 'Envoyé Spécial' et 'Complément d'enquête' qui sont au coeur de notre identité de service public". Et Yannick Letranchant d'en appeler à la "compréhension" de ses équipes et à leur "sens des responsabilités".
Dotée d'un budget de 240 millions d'euros, l'information nationale de France Télé (France 2, France 3 national, franceinfo:, numérique) va, comme les autres services de l'entreprise, être mise à contribution. Comptant actuellement près de 1340 ETP (équivalents temps plein), cette direction s'est vue demander de supprimer une soixantaine de ces ETP dès 2018, un chiffre inatteignable de l'aveu même de ses patrons. Selon nos informations, l'objectif est que l'info de France Télé réalise au total entre 5 et 6 millions d'euros d'économies l'année prochaine, soit environ 1/10e de l'effort financier exigé par le gouvernement.
Ces économies ne devraient pas toucher uniquement les magazines de France 2. Les JT seront eux aussi mis à contribution, même si on ignore encore dans quelle proportion exacte. Parmi les pistes avancées par exemple, la suppression des "Soir 3" le week-end sur France 3 dès le début de l'année prochaine. Les JT de deuxième partie de soirée du service public ne devraient ainsi plus être assurés que par franceinfo:, la chaîne info du groupe public. Il appartient désormais à Delphine Ernotte de trancher ces dossiers brûlants. La présidente de France Télévisions devrait rendre ses arbitrages en début de semaine prochaine.