Un pavé dans la mare. Jérôme Seydoux, 87 ans, mène aujourd'hui la charge contre le cinéma français dans "Le Figaro". Le président de Pathé, producteur et distributeurs de films, lui reproche son insuffisante adaptation à la nouvelle donne engendrée par les plateformes de streaming. "La France est le Vatican du cinéma, c'est un pays très dogmatique !", assène-t-il dans les colonnes du quotidien, estimant que le 7e art hexagonal devra fatalement "se réformer en profondeur pour prendre en compte la réalité d'un secteur qui a changé".
Parmi les priorités selon lui, l'acceptation des films produits par les plateformes dans les festivals de cinéma. "Le Festival de Cannes est le seul au monde qui n'accepte pas encore les films produits par les plateformes. C'est le dernier des Mohicans", peste-t-il par exemple.
La chronologie des médias, pourtant récemment revue, doit aussi être selon lui repenser. "Cette chronologie censée protéger la salle peut se révéler être contre-productive. Les plateformes pourraient décider de sortir leurs films rapidement dans les salles des autres pays européens où n'existe pas cette chronologie. Partout... sauf en France ! Tôt ou tard, il faudra que notre pays sorte de ses dogmes et se rapproche du régime international", estime le dirigeant de Pathé.
Jérôme Seydoux en veut aussi à la production française de films. "En France, il est facile de faire des mauvais films et très difficile d'en faire de bons. Nous avons à coeur de défendre au maximum la diversité des films. Mais ce sont les consommateurs qui choisissent et les gens ne vont pas voir des films où ils s'ennuient !", tacle le producteur de "Camping 3". Et de viser le système de financement des oeuvres : "En France, il n'y a pas assez de talents pour produire 340 films par an. Nous ferions mieux de produire moins de films mais de meilleure qualité, et le CNC devrait arrêter de saupoudrer les aides pour davantage les concentrer", estime-t-il.
Le patron de Pathé prédit enfin une baisse durable de 20% du nombre d'entrées en France, pour un niveau qui devrait être proche selon lui des 160 millions de tickets chaque année. "Demain, les plateformes choisiront de sortir en salle quelques films pour une fenêtre d'exploitation réduite de 30 à 60 jours, car ils ont besoin de mettre en valeur leurs productions", prédit-il. Avant de recommander une montée en gamme des salles de cinéma pour capter ce nouveau marché. "Les exploitants de salles devront donc s'adapter en investissant massivement dans la rénovation des complexes pour offrir des grands écrans et des sièges très confortables". "Forcément, les prix augmenteront", prévient-il.