A 20h45, la chaîne publique diffuse "Affaire Merah : Itinéraire d'un tueur", un documentaire choc réalisé par Jean-Charles Doria et produit par Tony Comiti Productions. Il propose un portrait de celui qui, en mars 2012, a tué 7 personnes, dont 3 enfants de moins de 10 ans. Pour comprendre pourquoi et comment le jeune au scooter a pu commettre de tels crimes de sang froid, France 3 est allée voir ses proches.
La mère de Mohamed Merah a accepté pour la première fois de répondre à des journalistes. "J'ai rien compris. Il était beau gosse, il était gentil. D'un coup, il a changé. Je ne sais pas pourquoi. Il est mort et il a pris beaucoup de gens avec lui", dit-elle en pleurs dans le sujet. Elle indique ne jamais avoir entendu son fils parler de jihad et s'interroge sur sa part de responsabilité dans la dérive criminelle de son fils. Souad, la soeur de Mohamed Merah, intervient également dans le documentaire.
Un an presque jour pour jour après les faits, les familles des victimes n'apprécient pas qu'un coup de projecteur soit mis sur l'assassin de leurs proches. Leurs avocats ont demandé la déprogrammation du reportage estimant qu'il y a "une forme d'indécence et d'obscénité à mettre en avant les deux personnes les plus proches de Mohamed Merah, tant familialement qu'idéologiquement." Ariel Goldmann, l'avocat de la famille Sandler, estime " contestable tout ce qui contribue à rendre humain quelqu'un qui (pour nous), a eu une attitude ignoble et qui n'est pas une attitude humaine."
France 3 n'a pas cédé mais a décidé d'organiser un débat à la suite de la diffusion du sujet. A 22h30, après le documentaire, Samuel Etienne s'entretiendra pendant une quinzaine de minutes avec plusieurs représentants des familles des victimes. Puis dans un numéro spécial du magazine "Pièces à conviction", Patricia Loison reviendra sur les zones d'ombres qui entourent l'enquête et recevra Manuel Valls, le ministre de l'Intérieur.
Mais la soirée spéciale de France 3 a ému bien au-delà du cercle des proches des victimes. Dans une lettre ouverte aux médias, le réalisateur de cinéma Alexandre Arcady s'interroge sur la fascination suscitée par les bourreaux. "Je ne connais pas le contenu de ce programme mais j'entends la publicité qui lui est déjà faite pour créer l'évènement et je m'interroge sur cette fascination (...) Sous le prétexte de vérité ne dissimule t'on pas une sorte de voyeurisme détourné et d'autant plus répugnant", dénonce-t-il.
"Je refuse qu'on puisse accorder une quelconque indulgence aux bourreaux, ceux d'hier, les nazis les plus abjects, comme ceux d'aujourd'hui : les fondamentalistes du 11 septembre, les bouchers du GIA, les meurtriers de Casablanca, de Madrid, ou de Londres", conclut le réalisateur qui prévient qu'à montrer des assassins, on risque d'en faire des "légendes" et des "héros".
Mise à jour 17h45 : Selon Le Parisien, la famille d'une des victimes a engagé ce matin une procédure en référé pour faire interdire la diffusion "Affaire Merah : Itinéraire d'un tueur". Le tribunal de grande instance de Paris statuera en fin d'après-midi, quelques minutes avant la diffusion du documentaire sur France 3.