Des prises de parole très largement masculines. L'Institut national de l'audiovisuel vient de dévoiler les résultats d'une longue et vaste enquête scientifique sur la radio et la télévision. Pour les besoins de celle-ci, l'INA a créé un logiciel d'analyse acoustique pour mesurer le temps de parole des femmes. Au total, ce sont ainsi 700.000 heures de programmes - 468.000 heures en radio et 270.000 heures en TV - qui ont été analysées, soit "le plus gros volume de données jamais analysé au monde" selon l'INA. Les données récoltées l'ont été sur la période 2001-2018 pour la radio et 2010-2018 pour la télévision.
Les résultats laissent apparaître une nette disparité entre la parole masculine et la parole féminine, de proportion comparable en télévision et en radio. Sur le petit écran, la parole des femmes ne représente que 32,7% du total tandis que pour le poste de radio, ce taux s'élève à seulement 31,2%. Dans le détail, la parole féminine est minoritaire sur l'ensemble des chaînes de télévision. Chaînes ciblant un public féminin, Chérie25 et Téva sont toutefois celles qui s'en sortent le mieux, devant France 24, tandis que les chaînes sportives Eurosport (7,4%) et L'Équipe (16,5%) sont celles où le taux d'expression des femmes est le plus faible. Du côté des généralistes, M6 (40,9%) et TF1 (36,1%), qui visent prioritairement le public féminin, sont les chaînes qui affichent le meilleur taux. Les chaînes à programmation culturelle ou éducative, comme Arte et France 5, affichent en revanche un taux d'expression bien plus faible (moins de 30%).
L'INA s'est également intéressée aux temps de parole sur les créneaux de forte audience. Il en ressort que, sur les chaînes de télévision privées, les femmes parlent moins aux heures de forte audience. Sur le créneau 19h-21h, une nette disparité est ainsi observée entre chaînes publiques (37,7%) et chaînes privées (24,6%). L'étude pointe aussi des disparités régionales en s'appuyant sur l'analyse des JT régionaux de France 3 sur l'année 2016. Le pourcentage de parole attribué aux femmes dans les 24 éditions régionales varie ainsi entre 25,9% et 52,9%. L'Alsace et le Nord-Pas-de-Calais sont les seules éditions où le temps de parole des femmes est supérieur à celui des hommes tandis que celui des hommes est majoritaire de plus de deux tiers en Lorraine, Midi-Pyrénées, Auvergne et Aquitaine.
Accablant, le constat dressé par l'étude de l'INA tend à se nuancer au fil des années. "Ces inégalités de représentation tendent à se réduire", note ainsi l'Institut dans son compte-rendu. En radio, le temps de parole des femmes a progressé, passant d'un taux moyen de 25,1% en 2001 à 34,4% en 2018. Une forte progression a été observée sur France Musique (+17,1%), Europe 1 (+17%) et RTL2 (+13,1%). À l'inverse, le temps de parole féminin continue de baisser sur RMC (-7,7%) et Skyrock (-2,1%). En télévision, le taux moyen est passé de 30,4% en 2010 à 35,1% en 2018. Les chaînes publiques progressent sensiblement à l'image de France 5 (+9,3%) et France 2 (+8,8%). En revanche, le temps de parole féminin est en recul sur L'Équipe (-10,1%) et CNews (-8,0%).