La suppression de la redevance sera effective dès cette année 2022. Le Conseil constitutionnel, saisi par plus de 120 députés et sénateurs de gauche, a validé avec des réserves, ce vendredi 12 août, les deux textes de loi sur le pouvoir d'achat. Avec ces deux décisions, les Sages ont également validé avec des "réserves d'interprétation" la suppression de la redevance audiovisuelle.
Le gouvernement peut donc pousser un ouf de soulagement. En juillet, selon "Le Monde", les inspections générales des finances, d'un côté, et des affaires culturelles, de l'autre, avaient pointé un risque de censure par l'institution de la rue Montpensier d'un projet qui reviendrait à substituer "une ressource dédiée à un financement par le budget de l'État".
S'agissant du projet de loi de finances rectificatives, second volet du projet de loi pouvoir d'achat, le Conseil constitutionnel, saisi par l'intergroupe de la Nupes et les sénateurs socialistes, a jugé conforme à la Constitution la suppression de la redevance audiovisuelle. Il a toutefois souligné que cette suppression était "susceptible d'affecter la garantie des ressources du secteur de l'audiovisuel public, qui constitue un élément de son indépendance".
L'inquiétude est la même du côté des organisations syndicales de France Télévisions et Radio France. Lors du mouvement de grève, qui avait notamment perturbé les antennes de ces deux groupes publics le 28 juin dernier, elles jugeaient que le budget de l'audiovisuel public "ne peut être décidé par le gouvernement et soumis aux aléas du vote des lois de finances annuelles". "Il doit disposer d'une ressource affectée, garantissant au mieux son indépendance économique et politique tant en termes d'information que de diversité culturelle", poursuivaient-elles.
Les députés de la Nupes avaient, par ailleurs, jugé, dans leur recours, que le dispositif de financement alternatif proposé (allocation d'une partie de la TVA) "ne permet pas d'assurer la sécurité du financement des établissements" audiovisuels. Les Sages ont donc enjoint au gouvernement de "fixer le montant de ces recettes afin que les sociétés et l'établissement audiovisuel public soient à même d'exercer les missions de service public". Et de prévenir que le Conseil constitutionnel "sera le juge du respect de ces exigences".
La subvention aux sociétés de l'audiovisuel public "sera versée en une fois dès le début de l'année", avait précisé le 20 juillet Gabriel Attal. Le ministre délégué chargé des Comptes publics avait également garanti une "visibilité" sur le budget des années à venir, "pour qu'elles sachent quelle va être la trajectoire de leur budget et pour qu'elles puissent faire des choix", a-t-il dit.
Mais selon Julia Cagé, économiste et spécialiste des médias, la majorité omet d'indiquer que "le poids de la TVA pèse beaucoup plus sur les modestes que sur les plus aisés" et "qu'une ressource qui dépend du produit de la TVA est une ressource tout sauf pérenne", a estimé la signataire d'une tribune dans "Libération" pour le maintien d'une "contribution audiovisuelle, universelle et progressive".
La suppression de la principale source de financement de l'audiovisuel public (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (France 24, RFI), Arte et l'Ina) - 3 milliards d'euros en 2020 - au profit d'un budget courant sur plusieurs années a été annoncée par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle, au motif de la préservation du pouvoir d'achat des Français. D'un montant de 138 euros en métropole et 88 euros outre-mer, la redevance ne concerne que les foyers qui détiennent un téléviseur. Les autres ne la payent pas, même s'ils regardent des programmes sur ordinateur, tablette ou smartphone.