C'est une démarche médiatique peu commune. Une ministre de la République en fonction fait aujourd'hui le choix de révéler au Monde qu'elle souffre d'un cancer. L'information fait même la Une de l'édition du quotidien cet après-midi.
Dans un long article signé Marion Van Renterghem, la ministre déléguée à la Famille, Dominique Bertinotti explique ainsi dans le détail qu'elle combat depuis près de huit mois un cancer du sein en parallèle de son activité de ministre. Une prise de parole dans les médias assez inédite comme le souligne, dans son papier, la journaliste ayant recueilli la confession. "Les hommes et les femmes politiques ne parlent jamais de leur cancer. A croire que cette maladie omniprésente dans nos vies modernes épargne étrangement les représentants de l'Etat français. Il faut aller au Danemark, dans la série télévisée "Borgen", pour trouver une ministre en prise avec le cancer du sein" s'étonne même Marion Van Renterghem.
Le silence autour de la maladie concerne particulièrement la politique française. Avec Georges Pompidou et François Mitterrand, la Vème République a ainsi déjà connu deux présidents de la République en exercice ayant caché le plus longtemps possible, et parfois avec la complicité de la presse, les très graves maladies qui les rongeaient. "La politique ne laisserait-elle place à aucun aveu de fragilité, en particulier en France, où l'on persiste à vouloir l'Etat protecteur et prométhéen ?" s'interroge ainsi l'auteur de l'article.
Pour justifier sa démarche, Dominique Bertinotti affirme quant à elle vouloir "aider à faire évoluer le regard de la société sur cette maladie dont le nom est terriblement anxiogène". La ministre avoue cependant avoir hésité à "raconter son cancer" à la presse, ayant peur, dit-elle, d'"être réduite" à cette maladie. Le choix de Dominique Bertinotti doit-il faire jurisprudence ? Les responsables politiques au pouvoir doivent-ils révéler au public, via les médias, les graves maladies qui affectent leur travail quotidien ? Sur ces questions, la principale concernée n'a pas d'avis tranché. "Ce choix du silence est de l'ordre de l'intime. Chacun a sa façon d'entrer en maladie" affirme ainsi la ministre de la Famille.