De la parole aux actes. "Libération" consacre aujourd'hui sa Une et six pages à la mobilisation de plus d'une centaine de femmes du cinéma français, qui ont décidé de mettre leur célébrité au service des femmes victimes de harcèlement, d'agressions sexuelles et de viols. "Actrices et action, les mots sont cousins", écrit Laurent Joffrin, le directeur de la rédaction, dans son éditorial. "Elles manifesteront vendredi, discrètes mais déterminées, lors de la cérémonie des César", précise-t-il. En effet, ce soir-là, les participants sont invités à porter un ruban blanc pour symboliser leur engagement sur ce sujet sensible.
Le but des personnalités qui font la couverture du quotidien est de récolter des fonds pour permettre aux femmes victimes de financer leurs actions en justice, sur le modèle du projet "Time's Up" initié pendant la cérémonie des Golden Globes aux Etats-Unis. "Twitter ne saurait être un tribunal", souligne Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, qui lance un appel dans "Libération" pour inciter à l'action. Un appel signé par des femmes (Sandrine Bonnaire, Valérie Bonneton, Virginie Efira...) et par quelques hommes comme Mouloud Achour ou Cédric Klapisch. "L'idée n'est pas de rester focalisé sur le cinéma français, mais de profiter de la visibilité qu'ont les actrices et les réalisatrices pour aider les femmes dans tous les secteurs de la société", poursuit Anne-Cécile Mailfert.
Bérénice Vincent, porte-parole du collectif "5050 pour 2020", qui défend la parité, l'égalité et la diversité dans le cinéma français, constate de son côté que "malgré l'onde de choc #MeToo, le cinéma français n'a pas vraiment été ébranlé par l'affaire Weinstein et rien de concret n'en est sorti". S'agit-il d'une bombe à retardement, qui attend une cérémonie aussi médiatisée que les César, retransmis ce vendredi en direct sur Canal+, pour éclater ?
"Libération" relate en tout cas que lors d'une réunion interne à Canal+ il y a quelques semaines, l'éventualité d'un débordement en direct sur le sujet a été évoquée et prise au sérieux. "Le risque existe, comme celui d'une invasion intempestive d'intermittents pouvait planer sur les cérémonies passées, et suscite l'élaboration de scénarios de crise et de parades de réalisation afin de conserver 'la maîtrise de l'antenne' exigée de la chaîne par le CSA", explique le quotidien de gauche. "Libération" évoque une possible séquence consacrée au harcèlement et aux agressions subis par les femmes, calée dans "le conducteur interminable de l'émission". Un moment "bien encadré et censé canaliser les velléités vindicatives", résume le journal.