France 2 veut-elle "nuire" à Vincent Bolloré ? Hier soir, la chaîne publique rediffusait à 22h40 le document "Vincent Bolloré, un ami qui vous veut du bien ?", un numéro du magazine "Complément d'Enquête" présenté par Nicolas Poincaré le 7 avril dernier. Dans cette enquête, les deux journalistes du service public Tristan Waleckx et Mathieu Rénier avaient suivi pendant six mois les activités de l'industriel breton, patron du groupe Canal+ depuis l'été dernier. Les deux journalistes s'étaient rendus au Cameroun et en Guinée pour dévoiler la face cachée du business du numéro un du groupe Vivendi et avaient notamment découvert des travailleurs mineurs évoluant dans des conditions extrêmement difficiles.
Un portrait peu élogieux que Vincent Bolloré avait pris soin de démonter lors de l'assemblée générale de son groupe en juin dernier. "Je ne sais pas si vous avez vu 'Complément d'Enquête' (...) Le moment le plus important, celui qui fait pleurer les chaumières (sic) : on voit un type sur un tracteur, il a un gant troué et il dit : 'Vous voyez ça ? M. Bolloré, il veut pas me donner de gants" avait-il alors lancé en ironisant la situation. Quant à l'âge des travailleurs, l'industriel de 64 ans avait nié en bloc l'existence de personnels mineurs au sein des ses propriétés.
"Il y a des huissiers qui sont partis sur place. Et j'ai les exploits d'huissiers avec moi. Donc le jeune homme qui avait soi-disant 14 ans, il a 20 ans ! Et il a été payé pour dire qu'il avait 14 ans ! Le monsieur sur le tracteur n'a jamais travaillé chez nous". Et de poursuive auprès de ses actionnaires : "Quand vous êtes (...) dans une mauvaise foi, dans un mensonge qui a pour but de déstabiliser, de décrédibiliser, il y a un moment où malheureusement, vous êtes obligé de dire 'Halte au feu !'. On arrête de parler. On laisse passer. Et je le regrette franchement", avait-il lancé, considérant que la Deux souhaitait le "faire partir".
Face aux propos du patron du groupe Vivendi suite à la diffusion de ce reportage, Nicolas Poincaré, s'était empressé de dénoncer des accusations jugées mensongères. "Evidemment, nous démentons formellement avoir payé ce garçon pour tricher sur son âge. Ce ne sont pas nos méthodes à 'Complément d'enquête'. Nous n'avons jamais payé personne pour mentir" avait-il déclaré 9 juin dernier. Et de poursuivre : "De même que nous n'avons jamais payé ces autres adolescents que Tristan Waleckx avait filmés sur place et que nous n'avions pas diffusés".
L'affrontement a connu un nouveau rebondissement ce matin. Car hier, la chaîne a décidé de rediffuser ce reportage, trois mois seulement après sa diffusion originale. Une deuxième exposition qui a fortement déplu à Vincent Bolloré, qui assigne France 2 pour avoir reprogrammé "cette émission totalement à charge et à l'encontre du groupe Bolloré". Selon lui, ce geste "caractérise désormais une volonté avérée de lui nuire en le dénigrant gravement. Ceci port(ant) atteinte à ses intérêts commerciaux".
"Afin de mettre un terme à cette campagne insidieuse et de protéger tant les intérêts de ses salariés que de ses actionnaires, le groupe Bolloré a assigné France 2 afin d'obtenir réparation devant le Tribunal de Commerce de Paris de son préjudice évalué à 50 millions d'euros", affirme le communiqué. France 2 n'a pour l'heure pas réagi à l'offensive de Vincent Bolloré.