A 10h sur RMC, "Les Grandes Gueules" fêtent leurs 10 ans, en direct du Palais des Glaces à Paris. Une longévité rare en radio, pour une émission quotidienne en direct, jours fériés compris. Selon le dernier sondage Médiamétrie, elle a gagné 78.000 auditeurs entre 10h et 13h, à 823.000 fidèles en moyenne. Un record. De 10h à midi, Marschall et Truchot sont même devant Europe 1 et France Inter. Rencontre avec les deux journalistes, qui officient aussi sur BFMTV.
Propos recueillis par Julien Bellver.
puremedias.com : "Les Grandes Gueules" fêtent leurs 10 ans ce matin sur RMC. Vous avez vu le temps passer ?
OT : Quand on voit nos visages lors de la première, on se rend compte qu'on a un peu ramassé oui (Rires) ! Plus sérieusement, on sait qu'en radio, le succès est long à se construire. Au départ, c'était une émission très innovante, avec un concept assez singulier. Dix ans après, on réalise notre meilleure audience. Mais tout ça a pris du temps.
Quels sont les critères de sélection d'une "Grande Gueule" ?
OT : Il n'y a aucun critère, c'est une sélection empirique ! L'idée est de recruter des non-professionnels de la radio, on ne voulait pas les habituels commentateurs des émissions d'actualité, on ne voulait pas d'éditorialiste. On voulait des Français de la vraie vie, qui ont un métier, une vie. Leur métier justement, ce n'est pas de faire de la radio ! Certains auditeurs sont mêmes devenus des "Grandes Gueules".
Certaines "Grandes Gueules" font acte de candidature ?
AM : Oui, mais ce ne sont pas ceux qu'on recrute. On cherche à entendre des gens que nous n'entendons pas ailleurs. On crève de ces émissions où ce sont systématiquement les mêmes qui sont invités, avec les mêmes opinions. On essaye de passer par d'autres chemins pour les recruter, on fuit un peu les habitués des plateaux.
On parle souvent des audiences de la matinale de RMC mais "Les Grandes Gueules" n'ont pas arrêté de progresser depuis leur mise à l'antenne.
AM : Le meilleur quart d'heure de RMC, c'est celui des "Grandes Gueules" ! Le succès, il est dû au côté complètement atypique de cette émission. Il y a un mot que je n'aime pas trop, c'est "la société civile". Ce sont des gens du quotidien ! On consulte bien les Français sur les référendums, on les fait voter. Nous, on met des Français engagés par leur opinion et leur travail autour de la table. Ca ressemble aux repas de famille où on a le tonton chef d'entreprise, le frangin qui est instituteur, le cousin médecin. Au bout de deux heures, tout le monde s'est engueulé mais a passé quand même un bon moment. C'est ça, "Les Grandes Gueules" !
Ce concept, vous l'assumez malgré les critiques...
OT : J'en ai marre qu'on traite de populistes ceux qui donnent la parole au peuple, c'est ahurissant ! C'est même méprisant d'entendre ça. Le succès de l'émission, c'est parce que justement on donne la parole à ceux qui habituellement ne l'ont pas. Ca ne veut pas dire qu'ils ont raison sur les autres !
Le succès ne s'explique-t-il pas aussi par la situation de crise actuellement traversée par le pays ? Les Français ont besoin d'un défouloir...
AM : Oui, sûrement ! C'est ce qui a fait le succès de RMC et des GG en particulier : ouvrir l'antenne et laisser parler les gens ! C'est une émission d'expression d'opinions. Quand des bêtises sont dites, on les corrige. Avant, en radio, l'auditeur était considéré comme quelqu'un qui venait pour gagner un cadeau ou faire monter la cagnotte, on lui disait merci et au revoir.
Comment éviter les dérapages à l'antenne ?
OT : Il y a la responsabilisation de tout le monde, on parle tous les jours à 1,8 million de personnes. Avec Alain, on fait en sorte que la loi soit respectée, la liberté d'expression est très encadrée. Mais on entend souvent des choses que nous n'entendons pas ailleurs. Car il y a moins d'autocensure et plus de tolérance aux idées.
AM : On a aussi une équipe de standard et de production. Ce n'est pas parce que le téléphone sonne qu'on va prendre la personne à l'antenne ! C'est souvent à partir de mails, où il y a un raisonnement construit, qu'on recueille les témoignages.
Le succès de l'émission doit donner envie à la concurrence de vous débaucher, non ?
OT : Oui, cela nous arrive bien sûr d'être courtisés. C'est une aventure avec un groupe aussi (NextRadioTV, ndlr), on est là depuis le début de l'aventure RMC, on est des gens fidèles, on a une totale confiance de la part d'Alain Weill et Frank Lanoux, on nous laisse une liberté totale. On nous a donné du temps, ce qui est rare en radio ! Maintenant, quand une émission ne marche pas, on la change illico. On a toujours dit non aux sollicitations extérieures.
10 ans de couple aussi, comment vous vous supportez ?
AM : On a la chance d'être depuis le début dans une aventure commune, on est tous partis de rien, il n'y a jamais eu de compétition entre nous. On a fait cause commune pour que ça marche. A la télé avec BFMTV, on a eu aussi une autre aventure possible, au sein-même de l'entreprise ! On est dans la même boutique et jusqu'à présent, je crois qu'aucun de nous deux ne s'est trompé.
"Les Grandes Gueules" déclinées en télé, c'est possible ?
OT : Alain Weill l'a évoqué tout de suite, dès qu'il a obtenu BFMTV. Mais ce n'est pas un format pour la télé. "Les Grandes Gueules" en télé perdraient de leur saveur, d'autant plus qu'il ne s'agit pas de professionnels des médias. Si on leur met des caméras, on les maquille, ils perdraient toute leur originalité. Ce serait une erreur !
AM : La radio permet cette spontanéité, même si la radio est filmée, ça reste de la radio. "Les Grandes Gueules" n'ont pas peur d'avoir une certaine notoriété mais cette spontanéité, ils la gardent parce que c'est de la radio.