Une structure pour toutes les émissions de flux. Newen annonce ce matin la création de Production Valley pour "renforcer" la position de Newen dans l'univers de l'entertainment. Production Valley est la quatrième filiale du groupe, aux côtés de Telfrance ("Plus belle la vie"), CAPA et 17 Juin. Rencontre avec Bibiane Godfroid, directrice générale déléguée en charge des contenus de Newen et Alexandra Crucq, directrice générale de Production Valley.
Propos recueillis par Julien Bellver.
Le groupe Newen rassemble plusieurs sociétés de production. Vous avez décidé de regrouper les activités de flux. Pourquoi ?
Bibiane Godfroid. Oui, au sein de Production Valley. Cette structure sera spécialisée dans le flux divertissement et entertainement. Le jeu en fera aussi partie, avec "Harry" sur France 3. Toutes les nouvelles créations de jeux et de divertissements seront développées par Production Valley, comme le pilote de "On Fire". Il fallait qu'on puisse produire tous les formats développés par le groupe dans une structure dédiée. Ainsi Newen aura une organisation plus claire.
Alexandra Crucq. On va travailler en priorité sur des formats d'émissions quotidiennes et de prime time qui peuvent s'exporter et tenter le plus possible de répondre aux besoins des chaînes.
Le premier format Production Valley pourrait arriver quand ?
BG. Très vite, j'espère. Malheureusement, à quelques jours près, on ne peut pas vous faire d'annonce mais un très beau projet d'une émission de première partie de soirée est en cours de signature avec M6. On a aussi deux projets de jeu en développement avancé. D'ici deux mois, on aura des choses à annoncer.
L'objectif, c'est aussi de venir concurrencer Endemol et Shine ?
BG. Non. Notre objectif est vraiment de mettre en avant les formats créés par la direction du développement et d'être plus proches des chaînes dans ce travail de création.
AC. Il n'y a plus de gros formats à l'international aujourd'hui. Les grands groupes qui faisaient historiquement du flux ont tous fait un virage vers la fiction depuis deux ans. Il y a un déficit créatif sur le flux et Newen a envie d'occuper le terrain.
Newen n'a pas de gros talent show dans son catalogue. Vous pourriez en développer ou en acquérir avec Production Valley ?
BG. Inventer de toute pièce un talent show, c'est très compliqué. On ne peut le faire qu'en collaboration avec une chaîne comme ce fut le cas de "The Voice". Il y a une vraie voie à explorer dans le co-développement avec les diffuseurs, pour qu'on ne perde pas de temps à créer des formats dont ils n'ont pas besoin.
AC. La compétition sur l'acquisition de formats est extrêmement forte. Il y a peu de killer formats, et on les veut tous. On est face à des groupes qui mettent énormément d'argent. Quand on voit que "The Voice" va basculer de Shine à ITV, cela prouve qu'on n'est propriétaire de rien quand on produit un format. Le format dont on détient les droits aujourd'hui ne nous appartient plus demain ! Ce danger-là, alors que vous avez fait tout le travail d'adaptation et de vente à la chaîne, c'est assez désespérant pour tout producteur.
Le jeu, ce sera aussi l'un des axes de développement de 'Production Valley' ?
AC. Oui. Il y a très peu d'acteurs en France qui sont positionnés sur la création de jeux, c'est un genre très particulier et difficile.
Les chaînes ont envie de quoi en ce moment, de feel good ?
BG. Pour le flux, il faut être dans le positif. Pour l'info, on ne doit pas être anxiogène. Sur la fiction, je vois tout autre chose, c'est un peu l'inverse comme si elle avait un effet catharsis. A Capa, on travaille sur un magazine de société qui pourrait être potentiellement sur le service public et la chaîne nous demande des sujets de fond mais légers. Sur les jeux, les chaînes nous disent, "on ne veut plus de jeux de tension, on veut du divertissement". C'est difficile parce que le non-anxiogène, c'est souvent tiède. Même dans un jeu, on doit raconter une histoire et en France, les téléspectateurs ont vraiment besoin d'une dramaturgie pour y adhérer.
AC. La valeur du dépassement de soi irrigue beaucoup de programmes en ce moment. "A l'état sauvage", "Koh Lanta" après dix saisons, "Ninja Warrior", "The Island"... Des personnalités qui se transcendent dans une expérience télévisuelle. C'est une valeur extrêmement positive mais qui crée du spectacle et de la tension.
Les jeunes regardent de moins en moins la télévision. On fait comment pour les ramener devant le poste ?
BG. Le digital, c'est un moyen de communication pour les attirer mais cela ne va pas les faire venir devant la télévision. Seule la qualité du programme les emmènera. On doit trouver des programmes qui permettent une écoute conjointe. Sur "Ninja Warrior", je pense que ce sont les enfants qui ont emmené leurs parents devant le poste. Il ne faut surtout pas renoncer, c'est pour cela qu'on doit créer des programmes événementiels qui rassemblent toute la famille. J'attends de voir comment les "millenials" vont se comporter quand ils auront 35 ans, à la maison avec des enfants. Il ne faut pas confondre poste de télévision et télévision.
Depuis la rentrée, Capa produit aussi les sujets de "L'hebdo Cinéma" sur Canal+. Les audiences sont assez confidentielles. C'est une déception ?
BG. On ne fait que fournir les sujets de l'émission, Canal+ a choisi une diffusion moitié claire moitié cryptée. Sur une chaîne dont les piliers sont le cinéma et le sport, ils ont besoin d'une émission de cinéma et je suis heureuse de travailler pour eux dans ce genre.
"Pop Up" avec Audrey Pulvar sera aussi produit par Capa, dans une case assez étonnante, le samedi à 11h sur C8... Vous partez avec un sérieux handicap !
BG. J'ai dit au patron des programmes de C8 qu'il allait falloir faire exister cette case. On est très fier de faire une émission de culture pour C8, c'est un bel enjeu, une recherche de positionnement pour la chaîne. La culture pour tout le monde, cela peut être vraiment fédérateur. Les parents vont tout apprendre sur les Pikachu et certains enfants vont tout apprendre sur Magritte. C'est un vrai pari, c'est statutaire pour C8. Notre objectif est avant tout de faire une belle émission et j'espère que l'audience suivra. On a des numéros commandés jusqu'à la fin de l'année.
Est-ce que CAPA va continuer à produire des sujets pour la nouvelle formule de "Envoyé Spécial" ?
BG. On a un sujet qui a été commandé et sera diffusé l'année prochaine. Mais France 2 a choisi de réinternaliser une grande partie de la production des reportages et les émissions politiques ont la priorité.
Newen a pris le virage de la TNT, notamment sur RMC Découverte ("Hors de contrôle"), c'est rentable de produire pour les petites nouvelles chaînes de la TNT ou c'est un pari sur l'avenir ?
Les deux à la fois. Cela n'est rentable que si on travaille en série. On doit prendre des risques sur les premières commandes d'unitaires. Quand la chaîne nous commande plusieurs numéros, cela devient rentable.