Il avait mis le feu aux poudres il y a deux ans. En décembre 2012, le producteur Vincent Maraval dénonçait dans une tribune au vitriol les salaires trop importants des stars du cinéma français et surtout la déconnexion entre leurs cachets et les résultats en salles des films. Sa sortie avait immédiatement créé un vif débat au sein des milieux culturels.
Deux ans plus tard, le CNC a finalement décidé de s'attaquer à ce problème. Vendredi dernier, il a décidé de refuser d'accorder des financements aux projets de films (compte de soutien automatique ou aides sélectives) si la rémunération prévue pour une "star" (acteur, réalisateur, scénariste...) était trop importante. Pour un film dont le budget est inférieur à 4 millions d'euros, la rémunération maximale d'une star devra par exemple se limiter à 15% de ce budget.
Interrogé aujourd'hui sur cette mesure par Le Monde, Vincent Maraval l'a jugée très positive. "C'est très bien. (...) Ce ne sont pas des mesures révolutionnaires, c'est le retour du bon sens. Mais ça n'allait pas de soi non plus. Le CNC a été courageux de le faire" a-t-il commenté. Le producteur estime malgré tout que les agents sauront facilement trouver la parade à ce nouveau dispositif. "Ils limiteront les salaires et voudront être payés plus en retour. Moi, ça me va. Si ça fait baisser les devis et donc que ça réduit notre risque, c'est sain" a-t-il expliqué.
Vincent Maraval aurait cependant aimé que les mesures prises par le CNC aillent plus loin en réduisant notamment le poids des chaînes de télévision dans le pré-financement des films. Pour ce faire, le producteur voudrait notamment exclure des obligations des chaînes, la "part antenne", autrement dit le pré-achat par une chaîne des droits de diffusion à la télé d'un film. Les chaînes seraient alors surtout des co-producteurs de films intéressés par leurs résultats en salles et pas seulement lors de leur diffusion à la télévision.
"Le seul moyen d'intéresser des investisseurs privés, c'est de cantonner les obligations d'investissement des chaînes de télévision à de la coproduction. Il faudrait que la 'part-antenne' (le pré-achat de la diffusion à l'antenne) cesse de relever de ces obligations. Les chaînes cesseraient d'investir dans des films calibrés pour la télévision et financeraient des films destinés au public des salles de cinéma" a expliqué Vincent Maraval.
Les chaînes de télévision sont depuis longtemps dans le viseur du fondateur de la société de distribution Wild Bunch. "Si les acteurs ont des salaires si élevés, c'est en grande partie à cause de la télévision" a-t-il ainsi de nouveau expliqué au cours de son entretien. "Les chaînes vont exiger, en échange de leur apport, des acteurs qui plaisent aux ménagères de moins de 50 ans, mais pas au public de cinéma. Elles choisiront toujours 'Turf' (le film à gros budget de Fabien Onteniente, ndlr) plutôt que 'La guerre est déclarée' (le long métrage à faible budget de Valérie Donzelli, ndlr)" a analysé Vincent Maraval.